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leur ferveur emportoit, & leur faifoit dire, qu'il falloit appaifer le peuple infidele, afin qu'il ne demandât pas la perte de cet homme jufte. Il les connut d'abord par l'efprit; les falüa tous, les pria d'avoir pour lui une vraye charité, & de ne lui pas envier le bonheur d'aller au Seigneur : leur en difant encore plus que dans fa lettre aux Romains. Il fe mit à genoux avec tous les freres, & pria le fils de Dieu pour les églifes, pour la ceffation de la perfecution, pour la charité mutuelle des freres, puis il fut mené en hâte à l'amphithéatre, & auffi-tôt exposé aux bêtes: pour fervir à la folemnité prophane que les Romains nommoient Sigillaria, & qu'ils celebroient le treiziéme des Calendes de Janvier, c'est-à-dire le vingtiéme jour de Decembre. Le peuple étoit venu en foule au fpectacle: & les bêtes furent fi cruelles, que le martyr fut aussi-tôt dévoré. Il ne resta de fon corps que les plus gros os ; & fuivant son defir, perfonne ne fut embaraffé de recueillir fes reliques. Le peu qui reftoit fut enveloppé dans un linge, & reporté à Antioche comme un trefor inestimable: & ce fut une grande confolation pour les fideles de tous les lieux où pafferent ces précieufes reliques. Elles furent miles dans une chryf. 504. to. châffe, & ensevelies dans le cimetiere qui étoit .. Ox. près de la porte de Daphné. Ceux qui ont écrit Hier. fcript. Igna Î'histoire du martyre de S. Ignace, la terminent ainfi. Ceci se paffa le treiziéme des Calendes de Janvier, fous les confuls.Sura & Senecion, pour

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An. 107.

:

la seconde fois ; c'eft l'an cent fept de J. C. Nous en fûmes nous-mêmes fpectateurs avec larmes : & dans la maison nous veillâmes toute la nuit, & avec beaucoup de genuflexions & de prieres, nous demandions à Dieu de nous fortifier en notre foibleffe, nous faifant connoître ce qui s'étoit paffé. Nous nous endormîmes un peu : & quelquesuns virent Ignace comme prefent tout d'un coup & nous embraffant les autres, comme priant pour nous ; & au fortir d'un grand travail, se prefentant au Seigneur, avec une grande confiance & une gloire ineffable. Cette vûe nous a remplis de joye: ainsi glorifiant Dieu, & loüant le Saint, nous vous avons declaré le jour & l'année de fon martyre: afin que nous afsemblant en ce même temps, nous ayons part à ce genereux atlete, glorifiant en fa fainte mémoire N. S. J. C.. Cependant S. Polycarpe ne fachant Epitre de S. Po- re ce qui étoit arrivé à S. Ignace depuis fon départ, écrivit aux Philippiens pour en apprendre des nouvelles en répondant à une lettre qu'ils. lui avoient écrite. Nous avons encore celle de S. Polycarpe, connue & reverée de toute l'antiquité. Elle commence ainfi : Polycarpe, & les prêtres qui font avec lui, à l'églife de Dieu qui eft à Philippi: que la mifericorde & la paix fe multiplie fur vous, de la part de Dieu tout-puiffant, & du Seigneur J.C. notre Sauveur. J'ai pris grande part à la joye que vous avez euë en N.S.de recevoir les modeles de la vraye chari

XIII.

lycarpe.
Edit. Coteler.

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té, & d'avoir conduit, comme il nous convenoit, ceux qui étoient chargez de chaînes facrées, qui font les diadémes des vrais élûs de Dieu : & de ce que votre foi folide & publiée dés les premiers temps, demeure jufques à prefent, & fructifie pour N. S. Il parle dans la reception qu'ils avoient faite à S. Ignace, & aux compagnons de fon

voyage.

Il leur donne enfuite plufieurs inftructions utiles; & descendant au particulier, il veut que les femmes ayent un amour fincere pour leurs maris, & une charité égale pour tous les autres, dans une pureté parfaite : & qu'elles inftruisent leurs enfans dans la crainte de Dieu. Que les veuves, il faut entendre principalement les diaconeffes, foient moderées dans ce qui regarde la foi : c'est à dire qu'elles ne veuillent pas en favoir trop. Qu'elles prient fans ceffe pour tous: entierement éloignées de la calomnie, de la médisance, de l'avarice & de tout mal: fachant qu'elles font les autels de Dieu qu'il voit tout ce qui eft en nous,

&

que rien ne lui eft caché, jufques aux pensées les plus fecrettes du cœur. De même les diacres doivent être fans reproche, comme ministres de Dieu & de J. C. & non des hommes. Ni calomniateurs, ni doubles en leurs paroles, ni avares: mais retenus en toutes chofes. Compatiffans, foigneux, marchant felon la verité de Dieu. Que le premier foin des jeunes gens foit de conferver la pureté, & de tenir en bride leurs defirs. Qu'ils Aaa iij

n. 4.

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foient foumis aux prêtres & aux diacres, comme à Dieu, & à J. C. que les vierges confervent fans tache la pureté de leur confcience. Que les prêtres foient tendres & compatiffans envers tous : qu'ils ramenent les égarez, qu'ils vifitent les malades, & ne negligent pas la veuve, l'orfelin & le pauvre. Qu'ils s'éloignent entierement de la colere, de la préoccupation & de l'injustice dans les jugemens de l'avarice. Qu'ils ne croyent pas legerement le mal, & ne foient pas trop feveres; fachant que nous fommes tous pecheurs.

pas

Il recommande de s'éloigner des fcandaleux & des faux freres, qui fe couvrent fauffement du nom du Seigneur, & seduisent les esprits legers. Quiconque ne confeffe pas que J. C. est venu dans la chair est un antechrift. Et celui qui ne confesfe la verité de la croix eft du démon : & celui qui détourne la parole de Dieu suivant ses défirs, & dit qu'il n'y a ni réfurrection, ni jugement, eft le fils aîné de fatan. Quittons donc les vains discours & les fauffes doctrines de plufieurs, pour nous en tenir à ce qui nous a été enseigné du commencement: appliquons-nous à veiller, à prier, à jeûner. Il dit enfuite: Je vous exhorte donc tous d'obéïr à la parole de Justice, & de vous exercer en tout à la patience, dont vous avez veû des exemples de vos yeux : non-seulement dans les bienheureux Ignace, Zofime & Rufe, mais dans les autres d'entre vous: dans Paul lui-même, & dans le refte des apôtres.

Decemb.

Etant perfuadez que tous ces grands hommes n'ont pas couru en vain, & qu'ils font arrivez au lieu qui leur étoit d'eû aprés le Seigneur, avec lequel ils,ont fouffert. On croit que Zofime & Ru- Martyrol, 18. fe étoient des premiers qui avoient fondé l'église de Philippi. S. Polycarpe leur joint S. Ignace comme déja mort jugeant bien qu'il devoit avoir fouffert le martyre, quoiqu'il n'en eût pas encore des nouvelles particulieres.'

S. Polycarpe parle enfuite d'un certain Valens qui avoit été prêtre à Philippi : & qui s'étoit rendu indigne de fon rang. Je suis fort affligé, dit-il, pour lui, & pour fa femme : & je prie Dieu de leur donner une veritable penitence. Ne les regardez pas comme des ennemis, mais comme des membres malades; rapellez - les afin de fauver tout votre corps. Je m'affure que vous êtes bien exercez dans les faintes lettres, & que rien ne vous eft caché. Et enfuite: Priez pour tous les Saints. Priez auffi pour les rois, les princes, & les puiffances, & pour ceux qui vous perfécutent & vous haïffent, & pour les ennemis de la croix ; afin que le fruit de votre foi foit manifeste à tout le monde.

Vous m'avez écrit, vous & Ignace, que fi quelqu'un va en Syrie, il porte auffi vos lettres: ce que je ferai fi je trouve le temps propre, foit moi, foit celui que j'envoyerai, comme député pour vous & pour nous. Je vous envoye, comme vous l'avez mandé, les lettres qu'Ignace nous a écri

n. IL.

17. 12,

7. 13.

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