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manquera pas d'augmenter avec le tems, nous preffer de faire des offres 1683. pour notre liberté ; mais comme Dieu Juillet. nous fait la grace de connoître & de fentir le bonheur qu'il y a d'endurer pour Jefus-Chrift,ce ne fera pas, comme je l'efpere, notre impatience qui enrichira nos perfecuteurs. Notre pauvreté nous affure pour long-tems le tréfor de fes fouffrances dont nous fommes en poffeffion. Plût à Dieu que les miennes duraffent autant que ma vie ; il ne nous manqueroit que les moyens d'annoncer fon Saint Nom dans la prifon pour rendre notre bonheur complet. Dieu donne beaucoup de courage à nos douze fervens Chrétiens, qui ont été mis comme nous dans les fers; je les recommande beaucoup plus que nous à vos prieres & à vos foins charitables. On pourra les délivrer avec moins de dépenfe que nous, & cette charité touchant toute cette Nation, en portera un fort grand nombre à embraffer les verités Catholiques. On nous a déclaré depuis que j'ai écrit au Reverend Pere Cliffon, que notre prifon ne finiroit que par le payement de fix cens piaftres pour nous, & cinq cens pour nos douze Catholiques c'est-à-dire, qu'elle durera long-tems,

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1683.

Juillet.

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à moins qu'elle ne finiffe par des ex torfions horribles fur les pauvres Catholiques; nous tâcherons de les empêcher, elles nous cauferoient beaucoup plus de douleur que tout ce que nous fouffrons ici, & feroient beaucoup de tort à la Religion. je ne vous dis rien mon Reverend Pere, fur tout cela, je connois votre bon cœur, & je fçai ce qu'on doit attendre de votre zele dans une occafion comme celle ci, que je puis dire être une des plus impor antes qu'il puiffe y avoir pour l'établiffement de la vraye Foi en ces quartiers à caufe des fuites. Si Dieu 'veut que nous foyons délivrés de ces cachots, penfés à nous procurer auprès des perfonnes qui aiment ardemment la gloire de Dieu & le falut du prochain, dequoi acquerir la maison où nous demeurions, afin de faire un bien ft ble & permanent dans ces Miffions. Si j'avois pu trouver quatre cens piaftres à emprunter, e l'aurois achetée, me fiant fur vos foins, pour nous faire: retrouver cette fomme dans les tréfors de la Divine Providence, à laquelle nous ne pouvons manquer d'avoir une confiance fans bornes, après les expe riences que nous en avons faites dans nos extrêmes befoins; qu'elle foit &

jamais louée & glorifiée. Ne nous oubliez fur-tout à l'Autel, & croyez- 168;. pas moi cordialement & dans le Saint Juli Amour de celui qui nous a uni par les fouffrances & par fa mort, mon Reverend Pere, votre très-humble & très-obéiffant ferviteur MICHEL NAU, de la Compagnie de Jesus.

Extrait d'une Lettre du Pere Laftringant Superieur General des Mif fions de la Compagnie de fefus en Grece, au Reverend Pere Verjus Procureur General des Miffions de la même Compagnie en Orient.

De Conftantinople le 26. d'Avril 1682

Je ne vous dirai rien ici du foin & du fuccès avec lequel les Miffionnai res que vous nous avez envoyés de nouveau s'appliquent à apprendre les Langues du Païs, pour être en état de fecourir un grand nombre de perfon nes de diverfes Nations. Nous appli querons d'abord à l'Armenien le premier qui nous viendra de France, parce que nous voyons maintenant part experience le grand bien qu'on peut faire auprès de ceux de cette Nation, non-feulement à Conftantinople où il

y en a plus de trente à quarante mille, 1683. mais encore dans tout l'Orient, où l'on Juillet. en trouve par tout d'établis en grand nombre. Je ne vous toucherai non plus rien de la neceffité de nos Miffions volantes dans l'Archipel, ni du travail infatigable de nos Peres de Smyrne, de Naxie, de Santorin, & de Negrepont, non plus que de tous nos divers emplois de cette Ville, auxquels il a plû à la bonté de Dieu de donner beaucoup de benedictions. Vous aurez appris tout cela de nos Lettres precedentes, & par les relations que nous vous en avons envoyées, & que j'efpere que vous aurez bien reçûës. Il ne me reste donc qu'à vous donner deux, nouvelles, qui ne regardent pas tout à fait ces Miffions de Grece & de l'Archipel, & qui n'ont pas laiffé de nous donner bien de la joye. L'une eft que tous les efforts des Heretiques pour exclure le Patriarche Catholique des Syriens du trône où il avoit été établi, par le zele infatigable du Pere Nau & de nos Peres de Syrie, ont été inutiles. On ne peut affez louer les foins & le zele de M. l'Ambaffadeur, pour lui obtenir le Barat ou la Patente neceffaire pour le maintenir dans ce pofte; vous fçavez de quelle importance étoit cete

te affaire pour la Religion; c'est pourquoi nous y avons contribué prefque la moitié du petit fecours que vous nous avez envoyé, & nous n'avons pas plaint une partie de notre fubfiftance pour laquelle nous n'aurions pas dû plaindre notre vie, s'il avoit fallu la donner pour en affûrer le fuccès. Ce Patriarche eft parti avec ce Barat, en

réfolution d'imiter en toutes chofes le Patriarche André fon Saint Predeceffeur, & d'établir la créance des veri tés Catholiques dans toutes les Eglifes qui dépendent de lui.

L'autre nouvelle qui ne donne de la joye qu'autant qu'on la confidere avec les yeux de la foi, & dans l'efprit de la perfection de l'Evangile, eft que le Peré Nau, le Pere Pilon, & notre Frere Hilaire, qui leur étoit d'un grand fecours pour affifter les malades, ont été jugés dignes avec douze Catholiques de fouffrir l'opprobre de la prifon & des chaînes pour JesusChrift. Autant que cette avanie injufte a affligé tous les bons Catholiques que ces Peres avoient reconciliés à l'Eglife, & indigné même ceux d'entre les Turcs qui ont quelque probité naturelle, autant la patience & le courage de ces genereux Captifs ont édifié

1683. Juillet,

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