Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Couchant, eft de trente-huit toifes de hauteur, & l'on diftingue encore les foffés qui défendoient le Levant & le Midi; ils étoient creufés de trente toifes, pour féparer cette Ville des collines, qui en font très-peu éloignées, & qui la commandoient abfolument, pour la mettre en état de défenfe. En conféquence, elle étoit fermée par une muraille conftruite à chaux & à fable, mais plus épaiffe & bâtie de pierres plus groffes au Levant & au Midi du côté. de ces foffés, qu'elle ne l'étoit au Nord & au Couchant défendus par l'efcarpement. La Ville avoit deux cens quatre-vingts toises de longueur, & neuf cens foixante de circuit. On diftingue encore les ruines d'une de fes portes.

Elle étoit éloignée de cinq lieuës à l'Ouest de Bourbon-les-bains, d'un bon quart de lieuë au Nord d'Hériffon, de neuf lieuës au Sud-Sud-Eft d'Alichamps, de cinq lieuës au Sud-Sud-Eft de Drevant, & de fept lieuës au Nord de Néris.

A une Médiocre diftance de cette Ville, on trouve dans le bois de Soulangé une ancienne voie Romaine.

Nous ne fommes pas plus inftruits de l'hiftoire de cette Ville, que de celle de Drevant, & de plufieurs autres Villes anciennes des peuples Bituriges. La fituation & les ruines de la Cité de Cordes prouvent qu'elle a été une Place forte fous l'Empire Romain. Les lieux, qui confervent en France le nom de Cité, ont été des Villes, ou du moins des habitations confidérables du tems des Romains. La voie Romaine, indiquée fur la colonne d'Alichamps, & dont on retrouve encore les veftiges, conduifoit de: Néris à Bourges, en paffant par Cordes, par Drevant, & par Alichamps. On n'avoit aucune connoiffance de cette voie, ni de la position de ces anciennes & magnifiques habitations des Romains.

[blocks in formation]

LES foins que l'on prend en France pour les chemins publics, produifent de tems en tems la découverte de quelque monument antique; ces travaux méritent, à ce titre, une confidération particulière de la part d'un Antiquaire. Mais l'utilité publique & les grands objets qu'on fe propose dans ces ouvrages immenfes, doivent fixer l'attention de tous les Citoyens ; & le Lecteur feroit furpris avec raison de ne pas trouver leur éloge dans un Livre qui, dans la recherche de l'antiquité, n'a pour objet que l'avantage des Arts & des Artiftes. En effet, ces grandes entreprises, commencées depuis vingt ans avec autant de fageffe que d'ardeur, & continuées dans toutes les Provinces du Royaume, font exécutées avec une magnificence, dont l'Hiftoire ancienne fournit peu d'exemples. On peut leur comparer les monumens des Romains en ce genre; mais je crois que l'examen des faits présentera les objets à notre avantage.

Les Romains ont conftruit les grandes routes Appia, Flaminia, Æmilia, qui traverfoient l'Italie. Ces ouvrages feront toujours célèbres; leur longueur & leur folidité, puifqu'elles fubfiftent encore en plufieurs endroits, méritent les plus grands éloges ; & je regarde ces chemins comme audeffus de toute comparaison, malgré l'incommodité & le danger dont leur pavé étoit pour les chevaux & pour ceux qui les montoient. Je ne parlerai donc que des voies ordinaires , que ce peuple guerrier conftruifoit dans les pays qu'il avoit conquis. On les nommoit chemins militaires: ils éroient conftruits pour faciliter la marche des troupes, & pour le tranfport des munitions; mais ces chemins étoient étroits, ordinairement élevés en forme de chauffée, & ne servoient à aucun autre ufage. Il eft conftant du moins que

leur peu de largeur & leur difpofition ne permettoient pas aux charrois de s'engager dans des efpaces trop étroits pour deux voitures. Les grands chemins de la France au contraire font recommandables par leur largeur, par la forme d'anfe de pannier, par l'égale proportion des ponts ou des chauffées, par la difpofition du pavé, enfin par la plantation des bordures, qui diffipent le Voyageur, & lui perfuadent qu'il ne voyage pas, mais qu'il fe promène. Les Romains n'étoient point occupés de cette partie du gouvernement, qui facilite toutes les efpèces de communication; ils ne penfoient qu'à la confervation de leurs conquêtes : & fi l'on calculoit l'efpace que leurs chemins occupoient, on trouveroit, malgré l'étendue de leur Empire, que la répétition des grands chemins répandus dans la France, présente une entreprise fupérieure en travail à celle dont l'Hiftoire Romaine fait mention, & dont les preuves fubfiftent en plufieurs endroits..

[ocr errors]

On peut encore citer Sémiramis, à l'occafion de quelques entreprises pareilles. Cette Princeffe a fait de grands ouvrages: ce que les Hiftoriens nous en difent, étonne, & élève l'imagination; mais les routes qu'elle a fait faire, n'avoient d'autre objet que le paffage & la marche de fes armées. Au contraire, la coupe des montagnes & le comblement des vallées, fi fréquemment répétés dans les chemins de la France, préfentent une étonnante multiplication de travaux, fur-tout en confidérant la furface de la France; car on ne fe contente pas de travailler aux grandes routes, les mêmes foins s'étendent déjà aux trayerfes de quelque importance: il eft vrai qu'elles font, & qu'elles doivent être tenues d'une plus petite proportion.

Enfin, l'admiration qu'excitent ces travaux immenses ne fera pas bornée à ce fiècle; & les précautions que l'on prend, donne lieu de croire que ces grandes entreprises feront fucceffivement continuées avec la même intelligence. En effet, on apporte les mêmes foins, & l'on

donne une pareille éducation aux jeunes gens qui fe deftinent à ce genre d'architecture. Ils auront donc les talens & les lumières des hommes expérimentés, qui dirigent aujourd'hui avec tant de fuccès ces grands objets de communication.

En travaillant l'année dernière au grand chemin qui conduit de Bayeux à Ifigny, & qui paffe fur la montagne de Vaucelle, fituée environ à une demi-lieuë de cette première Ville, on a découvert le vafe d'albâtre, dont ce Numero préfente le deffein. Sa forme eft agréable, fes anfes placées avec goût conftatent fon antiquité, d'autant que ce monument rappelle l'idée des vases funéraires. Le pied fur lequel celui-ci étoit porté autrefois, ne fubfifte plus; ce qui n'eft pas étonnant, puifqu'il n'étoit pas tourné dans le même morceau. Il m'a été impoffible d'avoir aucun détail fur les médailles dont on m'a mandé que ce vafe étoit rempli, lorsqu'on en a fait la découverte; mais on doit regarder comme un bonheur de fauver quelqu'objet que ce puiffe être, des mains de ceux qui travaillent à la terre; l'ignorance & la cupidité, auffi groffière que maladroite, de cette espèce d'ouvriers, donnent une feconde fecouffe aux monumens; elle eft peut-être plus cruelle que celle qu'ils ont anciennement reçue des Barbares, qui fouvent n'étoient pas de fens-froid, & ne détruifoient pas fi complétement. Ainfi, je m'eftime heureux d'avoir reçu les morceaux de ce vafe. Je les ai raffemblés, & je possède ce monument à peu près dans fon entier. Indépendamment de l'intérêt que les François doivent prendre à ce qui regarde les Gaules, je devois rapporter cette preuve du féjour & de la magnificence des Romains, par la singularité fuivante.

L'albâtre de ce vafe eft compofé de deux lits de matières différentes, placées à une médiocre distance, & répétées fucceffivement dans la totalité du morceau: les fels de la terre ont enlevé le poliment, & ont attaqué

plus

plus profondément la veine d'une des deux matières ; & ces veines n'étant ni horifontales, ni placées fymmétriquement, l'égalité affez générale, avec laquelle les fels les ont attaquées, a produit fur la furface extérieure, un ouvrage brute, ou plûtôt ce qu'on appelle dans l'ornement, un travail ruftique, que le ciseau auroit beaucoup de peine à imiter, ou du moins à rendre avec autant d'agrément : j'ai fait mon poffible pour donner par la gravûre, une idée de cet accident naturel.

Hauteur préfente du Vafe, huit pouces neuf lignes: plus grande largeur extérieure dix pouces deux lignes: épaiffeur un pouce.

N°. II & III.

POUR me confoler du peu d'éclairciffement fur les mé'dailles, dont j'ai parlé, on m'a envoyé cette petite Figure que le vafe du Numero précédent renfermoit; elle eft également d'albâtre, & n'eft entière que jufqu'à la ceinture; le travail en eft mauvais, & le goût en eft petit; elle a cependant tout le caractère de l'antiquité, & fi le vafe eft meilleur dans fa forme & dans fon exécution, la raison en eft fimple: les moyens des Arts ne peuvent varier, & l'on conçoit aifément, qu'il a toujours été plus facile, même dans la capitale, de copier un Vafe, que de compofer une Figure. Cette réfléxion acquiert encore plus de force, à l'égard d'une ville, auffi éloignée de Rome que Bayeux.

Cette jeune Divinité me paroît représenter Flore: la plante fleurie qu'elle tient d'une main, les fleurs dont elle eft coëffée, avec affez de profufion, la corbeille qu'elle foutient de l'autre main, & qui fe trouve également remplie de fleurs, ne préfentent l'idée d'aucune autre Divinité; elle pouvoit être tutélaire d'un jardin particulier. Le pays, où ce petit monument a été trouvé, autorise tout Tome III. Ccc

« AnteriorContinuar »