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erreur, avec les autres où elle avoit engagé ce grand Philofophe ; mais en dépouillant avec railon le repos de toute activité, il est allé jusques à en faire une simple negation, un rien. Cependant quand on dit, l'état d'un corps qui applique fa furface constamment aux mêmes parties; l'état d'un corps qui conferve la méme fituation & les mémes relations de diftance ; il me femble que ces termes fignifient, & que les idées qui leur repondent sont des idées réelles & pofitives, aufquelles repond par consequent une maniere d'être réelle & pofitive.

Les argumens par lefquels le Pere Malebranche pretendoit établir le neant du repos, ne me paroiffent pas

conclüans.

Détruifés le mouvement d'un corps, dit-il, cela suffit pour le mettre en repos. Il naît donc d'une simple ceffation. On ne peut pas dire reciproquement, ajoutet-il, Detruifés le repos, par là même le mouvement. naîtra, car il faut le determiner vers un terme, il faut en regler les degrés.

Je repons par un exemple; detruifés toute courbure dans une surface, elle fera plane par là même. Vous ne pouvés pas dire, ajoûterai-je, detruifés cette forme plane, la courbure lui fuccedera, & elle ne fera que la ceffation de la portion plane; car il y a une infinité de courbures; il faut en introduire une determinée. Mais. conclüra-t-on delà, que la position des parties d'une furface plane, n'eft qu'une fimple negation, que cette pofition n'eft rien de réel, & qu'elle ne doit avoir qu'une definition negative ?

Dès que le mouvement ceffe, le repos lui fuccede infailliblement & neceffairement. : Cela eft vrai, mais il y a une caufe réelle, la nature de l'étenduë, qui exige neceffairement un contact; fi ce n'eft pas un contact fucceflif, c'eft un contact permanent; elle exige neçeffairement & elle emporte une fituation ou fixe ou variée.

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Mais fi l'intelligence fuprême ordonnoit l'existence-d'un corps fans rien determiner fur fon mouvement, il exifteroit en repos, & ce repos feroit un rien, puifqu'il n'auroit point de caufe. Je repons que les idées de Dieu font des idées determinées & non pas fimplement des idées vagues. Quand il ordonne l'existence d'un corps, il fe reprefente determinément ce corps à qui il commande d'e

xifter. Donc fon repos, s'il naît en repos, fera l'effet

de la volonté divine ordonnant l'existence d'un corps en repos, d'un corps répondant à fon idée. Dieu commandant l'existence d'un corps, fe le reprefente auffi déterminément par rapport à l'état de repos ou de mouvement, que par rapport à sa groffeur, que par rapport à fa figure.

Mais c'eft là une queftion veritablement Metaphyfique plûtôt que Physique, & qui roule fur une certaine precifion d'idées. Pour l'explication des Phenomenes de Phyfique, il fuffit de convenir que le mouvement eft actif, & que le repos ne l'eft pas.

L'activité du mouvement eft ailée à prouver. Un corps qui fe meut change de place, il déplace donc il pouffe ce qu'il rencontre. Mais pour le repos comment feroit-il actif, puifque fi tout demeuroit en repos, il ne fe feroit aucun changement, & il ne fe produiroit aucun effet ? Pourquoi un corps en repos refifteroit-il au mouvement, puifque l'étendue eft également fufceptible de l'un & de l'autre de ces deux états, & fe prête aufh ailément à l'un qu'à l'autre ? A la verité un corps qui eft en repos ne fe mettra pas en mouvement de lui même ; il eft déterminé à demeurer dans l'état où il fe trouve, non par aucune repugnance au mouvement, très-conforme à la nature & autant conforme que le repos, mais parce qu'il ne fe fait rien fans caufe, & que la caufe du mouvement ne fe trouve point dans un corps en repos. Il ne s'y trouve que la fufceptibilité du mouvement, la facilité parfaite à le recevoir

Mouve ment actif

il ne le

pour

Si un corps de deux onces en repos ne pouvoit pas -être entraîné par un mobile d'une once, roit pas être par un mobile de trois. Je le prouve. De deux forces égales agiffant fur le même fujet, l'une ne peut pas avoir de l'effet fi l'autre n'en a point. Or un mobile d'ane once qui a parcouru dans une minute fix piés, a la même quantité de mouvement, & par conTequent la même force, qu'un mobile de trois onces qui en a parcouru deux dans le même temps. Donc fi un corps de deux onces en repos refifte à l'un de ces chocs, il refiftera à l'autre, puifque la vigueur de l'un n'excele pas celle de l'autre.

Mouve- Le

ment ma

repos

& le mouvement font deux manieres d'être niere d'être continuelles l'une & l'autre, & qui ne fçauroient foufrir continuelle. aucune interruption, fans changer de nature. Un corps dont l'application fucceffive celle pendant une heure, a certainement paffé de l'état de mouvement à celui de Il repos.. y a encore paffé fi fon application fucceffive ceffe pendant la dixiéme partie d'une heure, fi elle ceffe pendant la foixantiéme, pendant celle que voudrés ; car pourquoi pouroit-il ceffer de s'appliquer fucceffivement & de changer de fituation, c'est-à-dire, de fe mouvoir pendant un très petit intervale, fans ceffer d'être en mouvement? Si le mouvement peut pre pendant un petit intervale, & fe reprendre enfuite, fans qu'aucune caufe le rende & le faffe renaître ; pourquoi la même chose n'arriveroit-elle pas après deux petits intervales? Le fecond pouroit-il ce que le premier égal à lui, & précisement de même nature, pas

Sans ato

due.

pu?

s'interrom

n'a

Si le mouvement confifte dans une application conmes d'éten- tinuellement fucceffive, il ne peut y avoir d'atomes; car déja un atome ne fçauroit parcourir un atome, puif" qu'un atome eft fans étendue. Or fi un atome fuperieur couvre fon inferieur fans le parcourir, le mouvement ne peut pas être fucceffif pendant ce temps là. Deplus

un atome fuperieur pofé fur un inferieur égal à lui, ou
le quitte avant que de fe placer fur le fuivant ( & où
(&
feroit-il pendant cet intervale ?) ou il fe pofe fur le fui-
vant avant que de quitter celui fur lequel il étoit, &.
eft encore fur le premier en même temps qu'il paffe sur
le fecond, & dans ces deux derniers cas, un atome fe
roit en même temps dans deux lieux differens ; il oc-
cuperoit en même
en même temps deux places égales chacune à
lui, & par là il feroit double de ce qu'il eft.

Cette difficulté n'a plus lieu dès qu'on ne reconnoît point de terme dans la divifion, mais qu'on la conçoit pouvant fe poufler de petit en petit, fans fin & fans cefle.

On ne difconviendra pas que ab ne puiffe avancer de Fig. II. la longueur be, en même temps que da avance de la longueur ab=bc; ce qui étant fait, db fe trouve fur ac fon égale. Je diviferai ab en deux parties, comme j'ai divifé db, & je raisonnerai de même. La furface qui s'applique & celle contre laquelle elle s'applique, font toujours égales, mais il y a un flux continuel, & la partie pofterieure de quelque portion que ce foit, quitte autant de place que la partie anterieure en occupe.

Il ne peu pas y avoir non plus des atomes de tems & des inftans indivifibles; car déja pendant un temps. indivifible, une partie divifible ne fçauroit être parcouruë. Un atome d'efpace ne fauroit non plus être parcouru, car abfolument il ne peut pas l'être : Ainfi dans un premier inftant il ne fe parcourt rien: Dans un second non plus égal au premier, il ne fe parcourra quoique ce foit; de forte que dans deux inftans, il ne fe parcourt rien de plus que dans un.

Le temps eft donc divifible comme l'espace, de petit en petit fans fin & fans ceffe.

temps

Ni de

Cette divifibilité du temps fert à réfoudre une objec- Sophifme tion, que l'on tire de la divifibilité de l'efpace, contre refola le mouvement. Une premiere moitié d'un espace, dit

on, doit être parcouruë avant la feconde : Cette premiere moitié en renferme deux, dont la premiere encore doit être parcouruë avant la feconde, &ainfi de faite à l'infini. Quand eft ce même qu'un efpace commencera d'être parcouru? Car un commencement doit être precedé d'un autre ; celui-ci encore d'un autre, & cela fans fin & fans ceffe: Quand eft-ce que le premier de tous aura lieu, puifqu'il eft infiniment éloigné de quelque terme qu'on entreprenne d'affigner?

L'objection feroit concluante, fi tous les temps étoient égaux ; car la fomme d'une infinité de tems égaux & finis, monteroit à une fomme infinie; mais dans la même proportion que les moitiés d'efpace decroiffent à l'infini, les temps deftinés à les parcourir decroiffent de même. L'une & l'autre de ces progreffions ne fait qu'une fomme finie. Pouffés là fi loin que vous voudrés, il fe manquera toûjours le dernier des termes où vous ferés parvenu, que la fomme de toutes vos divifions & fubdivifions dès le premier terme, n'égale ce premier. Pourvû que la longueur du temps pendant lequel le mouvement doit fe faire, foit proportionnée à la longueur de l'efpace qui doit être parcouru, ce fera fuffifant, & le mobile aura le temps temps de parcourir cet efpace.

Tout efpace affignable eft fini en un fens & infini en un autre : Il commence à un terme & ne s'étend pas au delà d'un autre ; mais l'étenduë renfermée entre ces deux termes eft compofée de deux moitiés, la premiere de celle-ci de deux autres, & ainfi à l'infini. Il en eft de même du temps: L'heure dixiéme commence & fon commencement fuit immediatement la fin de la neuviéme. Entre cette fin de la neuviéme & le commencement de la dixiéme, il n'y a aucun intervale, quoique l'un de ces termes ne foit pas l'autre. L'heure dixiéme a fon dernier terme comme fon premier, & la fin eft immediatement fuivie du commen

cement

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