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qu'il eft à lui-même un Antechrift en tierement oppofé à Jefus-Chrift, & qu'il le renonce par une apoftafie & une idolatrie veritable, felon l'apôtre. S'il ne paroît pas vifiblement dans le parti de l'homme de peché, c'cft que cet ennemi de Dieu n'eft pas encore venu; mais comme fon parti fe forme & s'entretient depuis le commencement du monde, il est certain que les amateurs des richeffes y font déja entrez, & qu'ils le fuivent.

Lors auffi que l'Antechrit commencera de paroître en fa propre perfonne, tous les folitaires qui aimeront le bien fe déclareront ouvertement & vifiblement pour lui: & il les enlevera tout d'un coup comme le vent enleve la paille. Quelqu'apparence de pieté qu'ils ayent au dehors, & quelques faints que foient leurs difcours, leurs actions prévaudront à leurs paroles, & le tyran prendra poffeffion de la place que l'amour du monde lui aura préparé dans leur cœur. Les richeffes & les honneurs feront les armes dont il fe fervira pour s'en rendre maître : & il perdra ces faux folitaires par l'abondance qu'ils rechercheront: In copia rerum omnium occidet plurimos. Ils ne

devront

devront pas même fe flater de ce qu'ils fe pafferont peut-être de plufieurs chofes, s'il y en a d'autres dont ils ne voudront pas fe paffer, toute forte d'abondance eft fufpecte dans les plus petits fujets, puifque l'ennemi de Dieu s'en fervira contre nous, & qu'il en furmontera quelques-uns par le moindre defir du bien: il faudra que ceux qui defireront de le vaincre environnent leur folitude des murailles d'une entiere & parfaite pauvreté, dont faintClaire avoit foin d'environner & dee fortifier fes maifons: car fi Daniel nous affure que l'Antechrift perdra les hommés par l'abondance, il s'enfuit de-là que Jefus-Chrift ne fauvera les fiens que par l'amour de la pauvreté & de la croix, & par le mépris & l'éloignement du monde. Ce font auffi les bafes de la folitude evangelique, ou plûtôt c'est ce qui forme la veritable folitude, qui eft principalement neceffaire dans le temps de la perfecution, & encore plus au temps de la derniere, qui ferla plus cruelle, la plus violente & la plus dangereufe de toutes.

Comme enfin il y aura peu de veritables folitudes dans ce malheureux temps, & comme l'ennemi de Dieu Tome II. LI

fe les affujettira presque toutes par l'amour du fiecle;nous devons beaucoup prier Dieu en tout temps qu'il nous préferve ou nous délivre d'un fi pernicieux amour, fans lequel aucun temps ni aucune autre chose ne sauroit nous nuire.

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DES MALADIES

Ι

I.

L n'y a rien qui nous foit fi utile & fi capable de nous fanctifier que les maladies, fi nous les confiderons dans la lumiere de la foi & fi nous les fupportons avec patience, ou même avec action de graces, & avec une joie interieure;car le chrétien ne doit point avoir d'autre joie que d'être feparé du monde, & d'être en état de n'y prendre plus de part que celle que Jefus-Chrifty a voulu prendre. Or les maladies font en cet état : & ainfi rien n'eft fi capable d'effacer en nous l'image de toutes les chofes terreftres que les maladies, ni de nous donner de la haine pour tout ce qui eft dans le monde, & de nous dégager de fes chaînes. En effet, nous lifons de plufieurs faints, qu'ils ont commencé à fe vaincre parfaitement dans leurs maladies, & que la foibleffe de leurs corps a été dans leurs ames

ne fource de ferveur.

II.

Le fecond avantage que nous devons efperer des maladies, c'eft qu'elles nous donnent les moyens de faire penitence, & qu'elles font une penitence qui feule peut expier tous nos pechez, & nous préparer à la mort. Souvent pendant la fanté nous cherchons la voie étroite fans la pouvoir trouver; fouvent nous y entrons fans y perfeverer ; & il arrive même fouvent qu'au lieu de porter la croix de Jefus-Chrift, nous en prenons d'autres qui ne nous fanctifient pas; mais quand Dieu nous rend malades,nous ne pouvons douter que ce ne foit fon joug, ni que ce joug ne foit utile, & ce fardeau très-leger en le portant:nous fommes affurez que nous faifons la volonté de Dieu; & la foumiffion avec laquelle nous nous conformons à fa volonté nous rend fes enfans. Jefus-Chrift nous traite auffi comme fes freres, en nous donnant la feule part qu'il a eu au monde pendant fa vie mortelle, qui font les fouffrances, les travaux ; & il nous réferve la part qu'il a dans le ciel, fon immortalité & fa gloire.

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