Dara pace al dolor,
Il mio fedel ardor,
Pol ben far
Triomphar

Questo mifero cuor.
SCAPIN.

Peut-eftre que l'Italien ne vous plaift pas, il faut vous fervir à la Françoise.

Scapin va chercher fix femmes déguisées avec des Manteaux rouges, qui viennent en danfant, & font un Spectacle.

SCAPIN.

Amis, tenez vous tout prefts,
La befte eft dans nos filets.
Lors qu'un vieux fou s'échape
D'eftre amoureux fur fes vieux ans
Il faut qu'il mette la nape,
Et qu'on boive à fes dépens.
LE CHOEUR.

Il faut qu'il mette la nape
Et qu'on boive à fes dépens.
AIR.

Vive la jeunesse,
Vive le Printemps,
C'est le temps

De la tendreffe.

Fuyez d'icy fombre vieilleffe;

,

Car en amour les vieillards ne font bons
Qu'à payer les Violons.
UNE MUSICIENNE.
Un jour un vieux bibou

Se mit dans la cervelle

D'épouser une hirondelle,
Jeune & belle,

Dont l'Amour l'avoit rendu fou.

Il pria les oyfeaux de chanter à la fefte,

Tout s'enfuit en voyant une fi laide befte,
Il n'y refta que le coucou.

Mr. GRIFON.

Monfieur le Muficien, voila de vilaines paroles. SCAPIN.

Pardonnez-moy, Monfieur, ce font des paroles nouvelles qui furent faite à la noce de Vénus & de Vulcain. Mais allons au fait.

Les Violons jouent un air, fur lesquels les femmes de la Serenade danfent, & en danfant elles mettent le piftolet fous le nez de Monfieur Grifon & de Scapin.

Mr. GRIFON.

Mifericorde des piftolets, Mr. le Muficien!
SCAPIN.

Paix, paix, ne faifons point de bruit, nous ne sommes pas les plus forts.

Ils

Mr. GRIFON.

prennent mon chapeau, Mr. le Muficien.
SCAPIN.

Et paix, paix, ils prennent le mien, & je ne dis

mot.

Mr. GRIFON.

Ils me deshabillent, Mr. le Muficien.

SCAPIN.

Hé comme vous criez! faut-il faire tant de bruit pour un méchant jufte-au-corps?

Mr. GRIFON.

Ils foüillent dans mes poches, Mr. le Muficien, & prennent ma bourse.

SCAPIN.

Ils foüillent auffi dans les miennes; mais il n'y a rien, ils feront bien attrapez.

Mr. GRIFON.

Ils me prennent un Colier de quatre cens pistoles, Mr. le Muficien.

SCAPIN.

Bon, bon, ils ne tueront perfonne.

Mr. GRIFON.

Ah! la maudite Serenade!

SCENE DERNIERE.

VALERE, SCAPIN, Mr. GRIFON, LEONORE, MARINE,

DANSEURS.

VALERE.

AH, mon Pere: comme vous voila! & d'où ve

nez-vous ?

SCAPIN.

Nous venons de donner une Serenade.

Mr. GRIFON.

Ah Valere, je fuis mort, on vient de me voler un Colier de quatre cens pistoles.

VALERE.

Ne vous allarmez point, mon Pere, je vous ame◄ ne vos Voleurs.

Leonore

Marine jettent leurs Manteaux.
Mr. GRIFON.

Mifericorde Leonore, Marine!

MARINE.

Ouy, Monfieur, c'eft nous qui avons fait le coup.

SCAPIN.
Ah! coquine, tu iras au Galeres.

VALERE.

Si vous voulez confentir que j'épouse Leonore, je vous montreray votre Colier.

Mr. GRIFON.

Mon Colier? Ah! je te promets que fi je le retrouve, je confens à tout.

VALERE.

Je n'iray pas loin.

Mr. GRIFON voulant prendre le Colier. Ah, mon cher Colier !

VALERE.

Ah, tout beau, s'il vous plaift, mon Pere; je vous ay dit que je vous le ferois voir, mais je ne vous ay pas dit que je vous le rendrois. Quand une fille se marie, elle a befoin d'un Colier, en voila un tout trouvé. Je vous prie, Mademoiselle, de l'accepter pour l'amour de moy.

Mr. GRIFON.

Comment donc ?

SCAPIN.

Vous voulez bien, Monfieur, que je vous faffe auffi mes petites excufes, & que je vous dife que le borgne à qui vous avez tantôt donné deux cens Louis, c'eftoit moy, & que je ne fuis qu'une façon de Muficien. Mr. GRIFON.

Double pendart. Ah! je fuis affaffiné. Quelle maudite journée! Non, je ne veux jamais entendre parler By de fils, ny de maîtreffe, ny d'amour, ny de mariage, & je vous donne tous à tous les diables.

MARINE.

Tant mieux. Voila peut-eftre la premiere chofe qu' il ait donné de fa vie.

SCAPIN chante, & le Chœur repete.
F'offre icy mon fçavoir faire

A tous ceux qui n'ont point d'argent,
Je croy que le nombre en eft grand,
Et je n'auray pas peu d'affaire.

Malgré toute ma ressource,
Gardez-vous d'un fexe enchanteur;
Non content de prendre le cœur,
Il en veut encore à la bourse.

FIN.

LE BAL,

COMEDIE,

REPRESENTE'E EN 1694: