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AN. 125'1.

Albert. Stad.

au contraire ; & pour le foutenir il procura fon mariage avec la fille d'Otton, duc de Brunfvic. Or le comte Guillaume avoit grand befoin d'appui ; il s'étoit enga- Matth. Par. gé témérairement à accepter l'empire, & fut réduit à P. 698. fe retirer dans le comté de Hollande qu'il avoit même donné à fon frere, & à vivre aux dépens d'autrui. Auffi malgré tous les efforts du pape, fon parti devenoit de plus en plus méprifable par tout l'empire. Le pape avoit d'abord fait élire roi des Romains le lantgrave de Thuringe, qui mourut de chagrin après avoir été défait honteufement. Le comte de Gueldre, le sup.1. LxxxI duc de Brabant & le comte de Cornouaille, refuse- ”. 36. rent cette dignité. Enfin le pape l'offrit à Haquin, roi de Norvége, que dans cette vue il avoit fait facrer roi; mais ce prince déclara publiquement qu'il vouloit toujours combattre les ennemis de l'église, mais non pas tous ceux du pape. Il me l'a dit à moi-même, dit Matthieu Paris, & avec un grand ferment.

Christien ar

Mayence dé

Ap. Serrar.

Sifrid ou Sigefroi, archevêque de Mayence, mou- XXVII. rut le neuvieme jour de Mars 1249. Un auteur du tems chevêque de le loue comme un grand guerrier, ajoutant qu'il ne po négligeoit pas fes fonctions fpirituelles, ni le gouver- p. 839. nement de son état temporel. Après sa mort le chapi- p. 840. tre de Mayence poftula Conrad, archevêque de Cologne; mais le ne voulut pape ne pas admettre la poftulation. Le chapitre élut donc Christien, prévôt de l'églife de Mayence, où il avoit été élevé dès l'enfance. Son élection fut confirmée par le légat qui étoit préfent, & il reçut l'inveftiture du roi Guillaume le jour de S. Pierre, vingt-neuviéme de Juin 1249. Il fut facré, & reçut le pallium la même année. Tous les gens de biens fe réjouiffoient de fa promotion, efpé

AN. 1251.

p. 841.

lo. XVIII.

.1. P. 279..

rant qu'il procureroit la paix, principalement parce
qu'il n'étoit point exercé au métier de la guerre; mais
c'eft ce qui lui nuifit. On l'accufa auprès du pape d'ê-
tre entierement inutile à l'églife, & d'aller à regret
aux expéditions militaires quand il y étoit appellé par
de roi. Cela étoit vrai, & la raifon de Christien, est
que
l'on commettoit des incendies, on coupoit les
vignes, on gâtoit les moiffons. Or, difoit-il, ces ra-
vages ne conviennent point à un évêque ; mais je ferai
très volontiers tout ce qu'on peut faire par le glaive
fpirituel. Et comme on l'exhortoit à fuivre les traces
de fes prédéceffeurs, il répondit : Il est écrit : Mets
ton épée au foureau.

Cette conduite lui attira la haine du roi Guillaume & de plufieurs laïcs, qui l'ayant accufé, obtinrent du pape qu'il fût dépofé de l'épifcopat. Ce décret fut exécuté par le légat Hugues de faint Cher ou de S. Thiéri, de l'ordre des freres Prêcheurs, cardinal prêtre du Gall. Chr.t. titre de fainte Sabine, qui avoit pour adjoint Henri de Sufe, archevêque d'Embrun, auparavant évêque de Sisteron, & depuis cardinal évêque d'Oftie. Chriftien acquiefça volontiers, & céda le fiége de Mayence en 1251. Le légat lui donna pour fucceffeur un jeune homme nommé Gérard, qui n'étoit encore que foudiacre, fils du comte Conrad, furnommé le fauvage. Le légat fit ce choix à la persuasion de l'archevêque d'Embrun, qui pour cet effet avoit reçu secrétement deux cens marcs d'argent. On voit ici combien la difcipline étoit changée; car autrefois on auroit déposé Sup. L. xxxiv. un évêque qui auroit porté les armes. C'étoit un des reproches contre Salonius & Sagittaire en 576. Et cette obfervation eft d'autant plus importante, que

n. 38.

Hugues de faint Cher & Henri de Sufe, furent deux des plus fameux docteurs de leur fiécle; Hugues pour l'explication de l'écriture fainte, & Henri pour le droit canonique.

La reine Blanche fçachant que le pape fe difpofoit à quitter Lyon pour retourner en Italie, lui envoya offrir fon royaume & tout ce qui dépendoit d'elle, & témoigner le defir qu'elle avoit de l'aller vifiter avant fon départ. Il l'en remercia très affectueufement, mais il la pria de n'en point prendre la peine, attendu fa mauvaise fanté, & de fa part qu'il étoit preffé de partir. La lettre eft du dix-huitième de Mars. Enfuite il s'excufa de-même envers le roi d'Angleterre qui vouloit auffi le venir voir; mais il lui refufa une décime qu'il demandoit fur les biens ecclésiastiques d'Ecoffe: étant inoui de l'accorder à un prince dans le royaume

d'un autre.

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Matth. Par

Stero. ann.

Sup. L.LXXXII.

Le pape acheva de passer le carême à Lyon, où le jour du jeudi - faint treiziéme d'Avril, en présence de p. 712. plufieurs évêques, il réïtéra l'excommunication contre la mémoire de Fridéric & contre Conrad fon fils, comme s'étant approprié, fans le confentement de l'église Romaine, l'empire & le royaume de Sicile. En même tems il confirma l'élection de Guillaume de 1251. Hollande roi des Romains. Le dix-neuviéme du n. 14. pour même mois, qui étoit le mercredi de la semaine de Pâque, le pape partit de Lyon après y avoir demeuré fix ans & quatre mois. Il étoit accompagné de plufieurs cardinaux, de quantité de noblelle & de Philippe de Savoye, élu archevêque de Lyon, à la tête d'une nombreufe escorte de gens armés, pour le garantir des infultes du parti de Fridéric. Après avoir évité plusieurs

Matth.Paris. P. 707.710.

AN. 1251.

Mon. Pad.

P. 593.
Rain. n. 30.

ce.

XXIX.

Mouvement

P.710.

742.

14.

périls, il arriva à Gènes, fa patrie, où tous les grands de Lombardie, qui fuivoient fon parti vinrent lui faire la révérence ; il y féjourna jufqu'au vingt-deuxiéme de Juin.

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La France étoit cependant agitée d'un terrible moudes Paftou- vement. Il y avoit un Hongrois nommé Jacob, âgé reaux en Fran- d'environ foixante ans, qui dans fa jeunesse, quarante Matth. Par. ans auparavant, avoit excité la croifade d'enfans dont Piftor. 1. p. j'ai parlé en fon lieu. Il étoit apoftat de l'ordre de CîL. LXXVII.A. teaux, & fçavoit plufieurs langues, entr'autres le Latin, le François & l'Alleman. Sur la nouvelle de la prise de faint Louis, il fe mit à faire le prophéte, difant qu'il avoit vu des Anges, & que la Vierge même lui avoit apparu,& lui avoit commandé de prêcher la croifade: mais feulement aux bergers & aux gens du petit peuple, parce que Dieu, rejettant l'orgueil de la nobleffe, avoit réfervé aux petits & aux fimples la délivrance du roi & de la terre fainte. Il tenoit une main toujours fermée, difant, qu'il y gardoit l'ordre par écrit qu'il avoit reçu de la Vierge. Il attira premierement des bergers & des laboureurs, qui laillant leurs troupeaux & leurs charues, le fuivoient à grandes troupes,fans fe mettre en peine de leur fubfiftance,dont en effet ils ne manquoient point. Et le peuple difoit que les vivres multiplioient entre leurs mains. Jacob leur donnoit à tous la croix fur l'épaule, & on les nomma les pastoureaux.

Mais à ces premiers qui le fuivoient par fimplicité, fe joignirent des vagabonds, des voleurs, des bannis, des excommuniés, & tous ceux qu'en langage du tems on nommoit Ribaux: enforte que bien - tôt ils compoferent une armée de cent mille hommes, distri

buée

buée par troupes fous différens chefs avec cinq cens enseignes, où étoit représentée la croix & un agneau, avec les vifions que Jacob prétendoit avoir eues. On le nommoit le maître de Hongrie ; & il avoit fous lui deux autres principaux maîtres. Ces prétendus difciples de l'agneau portoient des épées, des poignards, des coignées, des maffues, & toutes les armes qu'ils avoient pu ramaffer; & quand le maître prêchoit, il étoit environné des mieux armés, prêts à fe jetter fur quiconque oferoit le contredire : car Jacob & les maîtres fubalternes prêchoient de leur autorité quoique laïcs,&difoient quantité d'extravagances même contre la foi. Ils prétendoient donner la rémission des péchés & faire des mariages à leur gré. Ils déclamoient contre les eccléfiaftiques & les religieux, principalement les freres prêcheurs & les Mineurs, qu'ils traitoient de vagabonds & d'hypocrites. Ils taxoient les Cifterciens d'avarice & d'attachement à leurs terres & à leurs beftiaux, les moines noirs de gourmandife & d'orgueil. Les chanoines étoient felon eux demi laïcs, & adonnés à la bonne chere : les évêques & leurs officiaux, occupés à amasser de l'argent, & vivant dans toutes fortes de délices. Quant à la cour de Rome ils en difoient des infamies qu'on n'ofoit répéter. Le peuple déja prévenu de haine & de mépris pour le clergé, applaudifsoit à ces discours.

AN, 1251.

XI. Sp.p.538.

Les Paftoureaux commencerent à paroître après Pâques l'an 1251, & l'éloignement du pape augmenta leur hardieffe. Ils s'affemblérent premiérement en Nang. Chr. f. Flandre & en Picardie, où les peuples font plus fimples; & ils étoient déja en très-grand nombre quand ils entrerent en France. En passant dans les villes &

Tome XVII.

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