Après J. C. répondit que le Khan étant regardé comme le fils de l'Empereur, il ne pouvoit pas époufer une fille de ce pi-kiaPrince qui devenoit fa fœur, réponse dont le Khan sen- khan, tit tout le ridicule : auffi repliqua-t-il que les autres Rois étrangers qui avoient été adoptés par la famille Impériale, n'étoient pas tellement regardés de cette famille, qu'ils n'en euffent époufé des Princeffes; que d'ailleurs celle qu'il demandoit n'étoit pas fille de l'Empereur: il ajouta que l'opiniâtreté de l'Empereur à lui refufer cette grace pouvoit à la fin le rendre méprifable aux yeux des Turcs fes fujets. L'ambassadeur Chinois lui promit de folliciter en fa faveur, & l'engagea en même-tems d'envoyer à la Cour un de fes principaux Miniftres avec des préfens. Le Grand Khan chargea de cette commiffion Afete-kieli-fa. Ce Turc arrivé à la Chine accompagna l'Empereur dans le grand facrifice qu'il alla faire à la montagne Taichan dans le Chan-tong. Après la cérémonie commee on ne vouloit point accorder la Princeffe, il refufa de retourner en Tartarie; mais à force de préfens on le fit partir fans avoir rien obtenu. Plufieurs autres ambaffadeurs envoyés par le Khan pour le même fujet ne réuffirent pas d'avantage. Les peuples du Tou-fan ou Tibet étoient alors gouver- L'an 727. nés par des Princes puiffans, dont la domination s'éten- Lie-tai-kidoit jufques dans l'Inde, & qui faifoient dans les Provin- u. ces occidentales de la Chine, ce que les Turcs faifoient Kam-me. dans celles du nord ; c'est-à-dire beaucoup de ravages. Leur Roi prenoit le titre de Tfan-pou ou Ghiam pou; c'est-à-dire Roi abfolu: occupé alors à faire le fiége de Kua-tcheou à l'occident du Chenfy dans le défert, & infftruit des fujets de mécontement que le Grand Khan avoit contre la Chine, il crut pouvoir l'engager à fe joindre à lui. Il lui en envoya faire la propofition; mais le Grand Khan qui ne défiroit rien de plus qu'à faire alliance avec les Chinois, fit remettre auffitôt la lettre à l'Empereur Hiuen-tçung: complaifance qui lui valut pour fes fujets la liberté de commercer avec les Chinois dans la ville de Cheou-kiang-tching au nord du pays d Ortous. Les Chinois tirerent de ce commerce beaucoup de chevaux dont Tome I. Mmm Tam-chou. Après J. C. Pi-kiakhan. ils avoient befoin, & les Turcs un grand nombre d'étof fes de toute efpece. Il y avoit alors de grands troubles dans le pays des Li Kitans ; leur Roi appellé Li-chao-ko venoit d'être tué : un L'an 720. Su. de fes miniftres nommé Ko-lo- kan fe fauva avec tous ceux de fon parti auprès du Grand Khan , pendant que la Reine des Kitans, qui étoit Chinoise, se retira à la Chine, ce qui donna naissance à une guerre à laquelle les Turcs eurent quelque part; mais qui finit au désavantaLie-tai-ki- ge des rebelles. L'année fuivante Kiue-te-le Vice - Roi d'occident dans le Turkeftan mourut, l'Empereur de la Tam-chou. Chine envoya faire des complimens de condoléance au L'an 731. Ju. L'an 734. Su. Kam-mo. Tam chou. Grand Khan, & des ouvriers pour éléver un monument en l'honneur de Kiue-te-le. On bâtit en Tartarie un temple fur les murailles duquel on peignit les belles actions de cet Officier, & on lui dreffa une ftatue. Toutes ces chofes frapperent les Turcs qui n'étoient pas accoutu més à voir de pareils monumens, & le Grand Khan, à la vûe de ces peintures fut touché. Il fit demander de nouveau Lie-tai-ki- la Princeffe Chinoife; l'Empereur la lui accorda cette fois: mais à peine eut-il obtenu cette grace qu'il demandoit depuis fi long-tems, qu'il fut empoifonné par un de Ven-bien- fes officiers nommé Moei-lou-tcho. L'Empereur de la Chine lui fit rendre les mêmes honneurs qu'à Kiue - te-le. Moei-lou-tcho fut mis à mort avec toute fa famille, & Y-gen-khan fils de Pi-kia-khan fut proclamé Khan. Ce Prince envoya plufieurs ambassades à la Chine, & mourut après un regne de huit ans. Il eut pour fucceffeur fon frere Pi kia-kou-to-lo-khan qui reçut de l'Empereur de la L'an 742. Chine l'inveftiture de fa nouvelle dignité avec le titre de Tem-li-khan, après quoi il fit des préfens considérables à l'Empereur pour le premier jour de l'an. tum-kao. Y-genkhan. L'an 41. Tam-chou. Tem likhan. La mere de ce Khan avoit quelques intrigues de galanterie avec un officier de la Cour; cela fit naître des troubles. Comme elle avoit beacoup de part dans le gouvernement, elle fe réunit avec fon fils pour faire périr deux oncles de ce Prince, dont elle étoit jaloufe, à cause du grand crédit qu'ils avoient parmi les troupes. Ils avoient Kam-mo. la dignité de Che-hou, l'un d'Orient, l'autre d'Occident. Ce dernier eut la tête tranchée; l'autre nommé Puon - kiue- Après J C. te-le avec tous fes fujets fe fauva, & après avoir raffem- Lie-tai-kiblé des troupes vint attaquer le Grand Khan,& le tua. Il mit fu fur le trône un fils de Pi-kia-khan qui fut auffi-tôt dépo- Tam-chous fé & tué par Ko-tou-che-hou, qui déféra l'Empire à un au- Ven-bientre fils de Pi-kia-khan: celui-ci ne refta pas plus long- tum-kaotems fur le trône, Che-hou le fit mourir & prit lui-même le titre de Che-hou-khan. L'Empereur de la Chine voulant profiter de tous ces troubles nomma un général Che-houpour aller en Tartarie, & le fit fçavoir en même-tems aux khan. Hoei-ke,aux Ko-lo-lou & aux Pa-fi-mi. Ces trois Hordes de Tartares mirent fur pied une armée , attaquerent Chehou-khan & le tuerent: toutes ces Nations convinrent de mettre fur le trône le chef des Pa-fi-mi, qui prit le titre de Kie-pi-y-chi-khan, & les deux chefs des Hoei-ke & des Ko-lo-lou eurent la dignité de Che-hou, l'un d'Orient & l'autre d'Occident. Cela n'empêcha pas que les Turcs ne fe rassemblaffent & ne nommaffent un Khan de leur Nation, qui étoit fils de Puon-kiue-te-le. Celui-ci prit le titre d'Ou-fou- mi - chi-khan, & donna à fon fils Ko-la-to la dignité de Che-hou d'Occident. L'Empereur lui fit propofer de venir fe rendre aux Chinois, mais n'ayant pas voulu le faire, la Cour de la Chine engagea les Hoei-ke, les Ko-lo-lou & les Pa-fi-mi à le venir attaquer d'un côté, pendant que les Chinois l'attaqueroient d'un autre. Ou-foumi-chi-khan prit la fuite & le Che-hou d'Occident nommé Opouse, avec un grand nombre de familles Turques, vint e rendre aux Chinois. Lie-tai-ki Ven bien Les Hoei-ke & les Ko-lo-lou avoient rejoint le Grand L'an 744: Khan, & lui avoient coupé la tête qu'ils avoient envoyé f à la Chine: les Turcs donnerent alors le titre de Khan à Tam-chu. Hou-long-fou-pe-moei-te-le, 'plus connu fous le titre de Kam-mo. Pe-moei-khan. Celui-ci ne fit que paroître fur le trône tum-kao. chancelant de cet Empire, & les Turcs à caufe de toutes ces divifions, reconnurent Khan le chef des Pa-fi-mi, L'Empereur de la Chine envoya le général Vam-tchungfe qui s'avança jufqu'aux montagnes près de la riviere : San-ho, & remporta fur les Turcs une grande victoire; Après J. C. de forte qu'il ne reftoit plus d'indépendans qu'un chef de Horde avec fes fujets d'un autre côté les Hoei-ke & les Ko-lo-lou fe réunirent contre le Khan des Pa-fi-mi, & le tuerent. Le chef des Hoei-ke prit le titre de Khan, & s'empara de tout le pays que les Turcs avoient poffedé. Pe-moei-khan fut arrêté & tué, & fa tête envoyée par les Hoei-ke à l'Empereur de la Chine. La Khatoun fon épouse vint à la Cour où on lui fournit de quoi vivre. Alors l'Empire des Turcs fut entiérement détruit. Il avoit fubfifté pendant 211 ans. Un chef nommé Opouse qui s'étoit rendu quelque tems auparavant aux Chinois avec fes fujets, & que l'on avoit placé à la Chine y eut dans la fuite quelque mécontement, & repaffa au nord du défert où il fut battu par les Hoei-ke: toutes fes Hordes se foumirent aux Chinois, & il fut tué. On a dû remarquer que ces peuples Turcs imitoient en tout les Huns leurs ancêtres : cependant le tems & peutêtre le commerce avec d'autres Nations ont dû y apporter dans la fuite quelques changemens. Ils élévoient fur un feutre le Prince qu'ils vouloient proclamer Grand Khan, le promenoient neuf fois en rond, aux acclamations de toute la Nation assemblée, le faifoient enfuite monter fur un cheval, lui enveloppoient le col d'une piéce de foye, & le ferroie nt fi fort qu'ils lui faifoient perdre la refpiration. Les premiéres paroles qu'il prononçoit dans cette efpéce d'évanouiffement, après qu'on lui avoit ôté cette étoffe, étoient interprêtées fuperftitieusement, & de-là on jugeoit de la durée de son regne. : Il Il y avoit dans cet Empire vingt-huit charges principales (a). La taxe ou l'impofition des tributs étoit indi quée par des hoches qu'ils faifoient fur un baton. Une commandans des troupes.Ko-lo-piennoir, De-là le titre de Ko-lo-tchue attribué aux vieillards, ce mot répond à celui de Cara en Turc. So-ka un cheval, de-là So-ka Tou-tun,un Gouverneur de Province. Pou-ni-che-han, du vin, de-là la di gnité de Che-han. Gan-tchin, de la Après J. C. |