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eft l'Eglife, & qu'il n'a pas voulu fouffric dans le fien propre par des raifons d'une fagefle divine. Les hommes ont quelquefois étendu leur cruauté au-delà de la mort, en traitant indignement les corps des Martyrs. Mais Jefus Chrift n'a point voulu de cette humiliation, pour montrer que toutes fes humiliations étoient finies par fa mort; & qu'il étoit entré dans un état de grandeur & de puiffance. Ainfi il arrêta tout d'un coup la fureur des Juifs. Il infpira à Nicodême & à Jofeph d'Arimathie le courage de demander fon corps quoique cette demande fût dangereufe. Pilate fe rendit facile à leur priere. Les Juifs n'en empêcherent point l'execution. Jefus Chrift fut donc enfeveli & mis dans le fepulcre ; & par le miniftere de ces deux Saints deftinés particulierement à cette œuvre, & principalement par celui de la fainte Vierge. Pourquoi tout cela? Ceft qu'il falloit que fon fepulcre fût glo- Ifai. 11 vieux: comme les Prophetes l'avoient prédit ; qu'il fût à jamais le témoin de sa mort & de la réfurrection; qu'il fût une marque éclatante parmi tous les peuples, de la victoire de Jefus-Chrift. Et airfi il falloit que fon corps mort y fût mis, & que les Juifs en fuffent les témoins & les gardiens. Il paroît que Nicodême & Jofeph d'Arimathie étoient réfervés pour ce faine

10.

miniftere. Ils n'avoient pas cru fe dea voir opposer formellement aux Juifs, quand ils pourfuivirent la mort de Jefus-Chrift, ni faire paroître à contre-tems leur zele pour lui avant fa mort; parceque Dieu leur faifoit connoître que leur oppofition auroit été inutile : mais ils le font paroître après la mort d'une maniere admirable, parceque la fépulture de Jefus-Chrift étoit leur ceuvre. Dieu defti ne ainfi certaines ames pour certains emplois & certaines œuvres fingulieres, & les fanctifie par-là fans qu'ils ayent be foin d'autre chofe. Il n'y a rien de fi petit dans le royaume de Jefus-Chrift qui ne fuffife à la fanctification de ceux qu'il y applique par fa grace. Heureux ceux qui diftinguent par la lumiere de Dieu les œuvres aufquelles il les deftine de celles aufquelles il ne les deftine pas! Car l'un n'eft pas moins néceffaire que l'autre, & fouvent en confumant inuti lement fa vie à dos emplois aufquels on n'eft point appelé, on fe rend par là incapable de ceux aufquels Dieu nous appeloit.

III.

Comme le corps mort de Jefus-Chrift n'étoit pas feulement la figure du vieilhomme enfeveli, mais auffi l'image de

Ceux qui après avoir été vivifiés par Jefus-Chrift ceffent d'être animés par lon efprit, & perdent la foi qu'ils avoient eue, il voulut n'être enfeveli que par des Saints, afin qu'ils répandiffent leurs larmes fur fon corps mort. L'extinction de la foi & de la vie de l'ame des Chrétiens n'eft fenfible qu'aux Saints, & aux ames fpirituelles. Il n'y a qu'elles qui pleurent fur ces morts fpirituels ; & cependant ce devroit être l'unique objet de nos larmes. Car qu'eft-ce que toutes les autres pertes au prix de celle de la vie de l'ame dont on a fi peu de pitié ? Qu'il eft à craindre que ceux qui y font fi infenfibles ne foient eux-mêmes de ces morts fpirituels!

Il n'y a donc de fages que ceux qui font une des principales occupations de leur vie de pleurer la mort fpirituelle de leurs freres. Leurs larmes ne contribuent pas feulement à la réfurrection de ceux pour lefquels ils les répandent, mais elles font encore utiles à eux-mêmes. Car on ne contribue jamais au falut des autres,qu'on n'acquere un nouveau degré de vie & de réfurrection pour foi même.

DESCENTE DE JESÚS aux Enfers.

I.

IA defcente de Jefus Chrift aux enfers atteftée dans l'Ecriture, par la tradition & par divers Symboles de l'Eglife, appartient déja à cet état inconnu dans lequel il eft entré après la mort. On ne peut favoir ce qu'il fit aux enfers, que par conjecture, excepté qu'il eft certain qu'il en tira les ames des juftes qui fe trouverent en état d'entrer dans la gloire, & entr'aurres celle d'Adam. Il n'eft pas inutile neanmoins de fe reprelenter l'état où le trouverent tous ces Rois, Princes, Conquerans, qui n'avoient point eu d'autre loi de juftice que leur force: Sap. 2. Sit fortitudo noftra lex juftitia, lorsqu'ils virent ce Roi de juftice triomphant & glorieux, & qu'ils fe virent devant lui fans force & dans l'extremité de la foibleffe & de l'impuiffance. Il n'eft pas inutile de concevoir la rage des démons, lorfqu'ils fe virent enlever les juftes dont la captivité confoloit leur malignité, ni de pe fer quelle put être la joye des ames faintes lorfqu'elles virent celui qu'elles avoient attendu durant tant de tems. Tout cet efpace fi long ne leur parut

qu'un néant, quand elles commencerent de poffeder celui qu'elles avoient tant defiré. La captivité d'Adam & d'Eve, & ce qu'ils avoient fouffert depuis leur mort difparut à leur esprit. Tout confifte à bien mourir. Les manx longs ou courts, grans ou petits s'évanouiflent & fe perdent dans l'éternité. On n'y connoît plus ces petites differences qui nous effrayent fi fort. Tâchons d'avoir l'éternité dans le cœur, & tout nous paroîtra égal; richefles, pauvreté, santé, maladie, grandeurs, baffeffe, gloire, ignominie. Mais fi nous fentons fi vivement ces differenc'est que nous tenons au tems, & que notre part eft dans le tems.

ces,

II.

28.18

Toute puiffance ayant été donnée à Matth. Jefus-Chrift après fa mort, & le monde entier étant l'heritage qu'il avoit acquis, il étoit jufte qu'il commençât à sen mettre en poffeffion en fe failant reconnoître dans les lieux qu'il ne devoit plus honorer de fa préfence vifible après la réfurrection. Mais cet empire de Jefus-Chrift qui fit la joye & la confolation des uns, fut & fera à jamais le defefpoir éternel des autres. Tous les réprouvés frémirenr de crainte à la vue de celui qui combla les élûs de joye. Quel étrange aveuglement eft donc celui des

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