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avec plaifir le Spectateur; la Tragédie fe propofe de nous infpirer de l'horreur pour le crime, par les fuites funeftes qu'il entraîne après lui, & du refpect pour la vertu par les juftes louanges & les récompenfes quila. fuivent. L'on admire parmi les Grecs les Tragédies d'Ariftophane, de Sophocle & d'Euripide. Dans notre nation Corneille & Racine ont excellés. dans ce genre d'écrire, & depuis eux, Voltaire, Lamotte & Crebillon nous ont donnés des Ouvrages dignes de la postérité.

La Comédie eft une représentation naïve & enjoüée de quelqu'action ou avanture agréable, arrivée entre des perfonnes communes, à laquelle on à coûtume de joindre la Satyre honnête pour corriger les mœurs. Terence l'a emporté fur tous les Poëtes comiques Latins, & Moliere, dans notre fiécle, n'a trouvé perfonne qui l'ait égalé dans ce genre d'écrire. La Comédie & la Satyre fe propofent de

nous corriger en nous divertiffant, de combattre fans ceffe nos vices, & de nous faire fentir nos ridicules en s'en mocquant. On appelle Satyre un Ouvrage en Vers affez fort, concis, pour cenfurer les actions, la laideur, ou le peu de mérite de certaines perfonnes. La véritable Satyre doit nous faire rire, sans nous faire rougir. Il faut qu'elle inftruise agréablement, & qu'elle n'offenfe perfonne.

Il y a deux fortes de Satyres, les unes férieufes, & les autres railleufes. Les premieres ont quelque chofe de dégoûtant, & portent toujours avec elles la mauvaise humeur de leur Auteur. Les dernieres font trop piquantes, ce font deux écueils qu'on ne peut éviter qu'avec peine. Il faut que la belle Satyre foit remplie de cette érudition, & de cette politeffe que l'on acquiert dans le commerce des honnêtes gens & des perfonnes d'efprit. Horace a réuffi parfaitement dans la Satyre dans le fiécle d'Au

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gufte, & l'on peut dire que Defpreaux, dans le nôtre, a été son égal. L'Ode doit être regardée comme le langage dont les Hommes fe fervoient pour parler aux Dieux ; l'on appelle communément les Odes des Poëfies lyriques; parce que les Odes des Anciens fe chantoient fur la Lyre. L'Ode eft un Ouvrage magnifique, propre à repréfenter l'entrée & le triomphe de quelques Héros, & à célébrer fes exploits, afin d'engager par là les Hommes à les imiter. Il faut toujours commencer l'Ode par quelqu'action fublime & furprenante, & la finir heureufement, en foutenant fon style magnifique & majeftueux. Pindare, Anacreon & Horace ont paffés chez les Anciens pour les meilleurs Poëtes lyriques. Dans notre fiécle Rouffeau nous a donné des Pfeaumes & des Odes prophanes, qui fon des Ouvrages achevés. La Motte nous a donné auffi de très-belles Piéces dans ce genre.

L'Epigramme eft une espèce de Poëfie, courte, fufceptible de toutes, fortes de fujets, qui doit finir par une penfée vive, nette & jufte, qui renferme un certain fel. L'elegie fe propose de verfer des pleurs fur le tombeau des perfonnes qui méritent d'être regretées. L'Eglogue fe propofe de chanter les plaifirs innocens de la vie champêtre.

Comme le goût dans la Poëfie, ainfique dans toutes fortes d'Ouvrages, eft abfolument néceffaire pour pouvoir y réuffir, j'ai crû qu'il étoit à propos d'en dire la définition.

Le Goût & le Jugement ne font en effet qu'une même chofe, une même difpofition, une même habitude de l'ame, à laquelle on donne differens noms, felon les differentes manieres qu'elle prend pour agir; on l'appelle gout quand elle agit par fentiment, & à la premiere impreffion des objets, on l'appelle jugement, quand elle agit par raifonnement; & après avoir exa

miné les Ouvrages fur les régles de l'Art, & par les lumieres de la vérité; deforte que l'on peut dire que le goût eft le jugement de la nature, & que le jugement de la nature eft le goût de la raifon. Le terme de jugement eft plus propre pour exprimer le fentiment que l'on a des Ouvrages, où l'efprit a plus de part que l'imagination, comme font ceux des Mathématiques, de Théologie & de Morale. Au contrai re, celui du goût convient mieux, lorfqu'il s'agit des ouvrages qui appartiennent autant à l'imagination qu'à l'efprit; comme font ceux de Poëfie, d'Architecture & de Peintu re. Un Auteur après avoir cherché le bon goût dans ce qu'il écrit, doit donner fon application, autant qu'il lui eft poffible,à fe rendre utile à son Lecteur. La plupart des perfonnes ne lifent les piéces de Poëfies que pour s'amufer & pour paffer le tems, & l'inftruction n'eft guéres le motif de leur lecture. Si l'on vouloit donc en

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