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montrer l'utilité, & l'on peut dire que, ARISTOpour trouver les argumens, il n'est TE. rien tel que d'être inftruit, non pas des sciences, mais du fujet qu'on doit traiter. Après tout, c'eft ce qu'Ariftote recommande particulierement, & il n'a donné le refte de la methode, que pour indiquer ce qu'il faut apprendre ailleurs qu'en Rhétorique, ou tout au plus pour donner des vues à l'efprit.

Victor. in A

rift. p. 120.

À l'art de trouver les argumens, il joint celui de les choifir, qui eft de les prendre convenables à la matiere, à l'auditeur, à l'Orateur même, vifs, nouveaux, intelligibles. Il donne l'art de les tourner, qui eft de les ferrer, ou d'y joindre ce qui prend l'adverfaire par lui-même. A quoi il faut ajoûter que, reconnoiffant la Rhétorique également propre à perfuader le pour & le contre, il veut pourtant qu'on L. 2. c. 22. ne défende que la juftice, & décide qu'il y a un abus trés-criminel à la combattre, dont neanmoins l'Art en lui-même n'est point coupable, mais celui qui fait un mauvais ufage de l'Art. Et il fait une reflexion remarquable; Que la bonne caufe est toujours fans comparaifon bien plus facile à fou

ARISTO- tenir que la mauvaise.

TE.

Tel étoit le fentiment de ce Philo.

fophe fur la faculté de traiter le pour & le contre. De forte que, fi Alexandre le Grand croyant un jour voir quelque ufage de cette Dialectique dans Caßandre. une chofe de bon fens qu'un Seigneur de fa fuite lui difoit pour juftifier Antipatre. fon pere; fi, dis je, en cette occafion il échappa à ce Prince de dire qu'il voyoit là les preftiges ou les fophifmes Plutarch. in d'Ariftote, on ne peut regarder ce terAlexan. fub fin. Voff. de me injurieux, que comme un mouvenat. &confi. ment de colere, quidui faifoit blâmer Rhet. p. 46. une bonne chofe, lors même qu'on s'en fervoit à propos, felon les principes de fon Maître.

pas

Mais fi, avant Ariftote, les Rhéteurs n'avoient cultivé cette partie de leur Art qui traite de la preuve, ceux qui étoient venus depuis, trompez peut-être par fa doctrine malentendue, avoient pris le contre-pied des Anciens, &, pour s'attacher trop à la preuve, avoient negligé les autres moyens de perfuader, & les ornemens. Que fait fur cela Ciceron (5)? Il nous

(5) Qui Ariftotelico more in utramq; partem dicere poffit, &

Rhetoricum ufum adjungat, is verus, is perfectus,is folus Ora

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Idem 3. de Orat. n. 70

71.

apprend que le vrai Orateur, le vrai Orateur, l'Ora- ARISTOteur parfait, & le feul qui merite ce TE. nom, eft celui qui, felon les principes d'Ariftote, peut joindre la beauté des ornemens à la folidité de la preuve. Et ailleurs: La fechereffe de l'Orateur, dit-il, ,ne vous fait-elle pas de peine ? & êtes-vous content de lui, pourvû « que, felon la doctrine des Maîtres « ordinaires, il puiffe ou nier le fait, « ou le foûtenir legitime, ou non con- «< traire à la Loi, ou en rejetter la fau- « te fur autrui, ou l'excufer, ou en « éviter le jugement? Vous lui épargnez bien de la peine: mais fi vous «< demandez un Periclés, un Démo- « fthene, en un mot, un parfait Ora. « il vous faut (6) fuivre les re- « gles de Carneade ou d'Ariftofte. Ce Philofophe en effet a joint à la preuve deux autres moyens de perfuader, qui font les paffions & les mœurs; celles-là pour la force, celles-ci pour la douceur du difcours. Sur quoi je puis premierement rapporter ce que remarque M. l'Abbé Fleury, que Platon & les autres Grecs de fon

teur,

tor. Cic. 3. de Orat. 22.80.

(6) Aut hæc Carnea

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dia vis, aut illa Ari-
ftotelia comprehen-
denda eft. Ibid. n.71.

Traité du choix des ét s

des. p. 304.

TE.

mosth. p. 28.

ARISTO tems ont excellé dans la connoiffance des mœurs, des paffions & des inclinations des hommes; parce que cette loüange generale, comme l'on voit convient fans doute à Ariftote auffibien qu'à Platon. J'ajoûterai en fecond lieu, qu'au jugement du Pere Compar. de Rapin, perfonne n'a jamais fi bien Cic. & de De- connu ni fi bien enfeigné qu'Ariftote, l'Art de fe rendre maître des efprits par la perfuafion. C'eft le feul qui ait bien fçû pénetrer le cœur de l'homme, la chofe du monde la plus impénetrable; qui ait fondé la profondeur de cet abyfme, & qui ait trouvé le moyen de reconnoître & de démêler les détours qu'il faut prendre pour y entrer, & y pratiquer des intelligences par les paffions: & fes principes font fi infaillibles, que, pourvû qu'on les fuive, on ne peut manquer d'arriver à la fin qu'on le propofe. De Eloquent. A l'égard des paffions, le Pere Cauffacra & prof. 4. 3. p. 460. fin, rapportant la divifion la divifion que faint Thomas en a faite, celle de Gallien, celle des Stoïciens, celle de Platon celle d'Ariftote, les approuve toutes; mais il préfere la derniere comme Vist. Com- plus propre en fait de Rhétorique. Viment, in Rhet. &torius, qui eft un fameux Commen

Arift.

,

,

ARISTO

tateur d'Ariftote, dit, qu'encore que
les Maîtres, avant ce Philofophe, ne TE.
fe fuffent appliquez qu'à traiter cette
matiere, néanmoins il y a mieux réuf-
fi qu'eux. A dire vrai, il n'y oublie
rien il fait voir qu'il y a trois cho-
ses à traiter fur chaque paffion pour
l'ufage de l'Orateur, & il les traite
avec beaucoup de foin. La premiere
eft de favoir quelle eft la difpofition
de ceux qui font fufceptibles d'une tel-
le ou telle paffion, afin de faire naî-
tre en eux cette difpofition par le dif-
cours; la feconde eft de favoir à l'é-
gard de qui ils entrent dans cette dif-
pofition, afin de faire voir que ceux
dont on parle font de ce nombre; en-
fin la troifiéme eft de favoir quelles
causes font naître chaque paffion, afin
de montrer que ces caufes font dans
le fujet que l'on traite. Par exemple,
dit-il, fur la colere, il faut favoir en
quel état fe trouvent ceux qui font
fujets à cette paffion; contre quelles
fortes de perfonnes ils fe fâchent; à
quelle occafion & pour quelle raison
ils le font ; & tant fur ces trois ar-
ticles, que fur ce qu'il y a d'ailleurs
de curieux dans les paffions, comme
fur le plaifir, ou fur la douleur qui

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