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AN. 1518.

XCIX. L'empereur veut aflurer

dinand fon petit-fils.

lendemain du jour auquel on lui avoit prêté le ferment de fidelité, il donna la main à baiser à plus de mille perfonnes, outre ceux qui avoient ce droit.

L'infant frere de Charles étoit arrivé à Vienne, & fçut fi bien s'infinuer dans l'efprit de l'empereur MaT'empire à Fer- ximilien, qu'il lui infpirât les mêmes fentimens qu'avoit eû autrefois pour lui le roi catholique. Ce prince prit la réfolution de lui ceder les états que la maifon d'Au triche poffedoit en Allemagne, & de lui affurer l'empire. La diete fut convoquée pour cet effet à Ausbourg pour la fin de l'été. Charles en ayant eu avis employa le cardinal de Trente, felon les hiftoriens Espagnols, ou le cardinal de Sion, felon les hiftoriens Flamands, pour traverser ce deffein. Celui des deux qui fut chargé de cette commiffion, allegua de fi fortes raifons à l'empereur pour lui faire entendre combien il importoit à la gloire de la maifon d'Autriche, que l'Empire fût donné à Charles, que fa majefté imperiale s'y rendît, Maximilien ne vécut que fix mois après la diete, & le roi d'Espagne les employa utilement à gagner les fuffrages des électeurs, par l'argent qu'il fçut diftribuer à. propos. Peu de tenis après il tint le chapitre de l'ordre de la Toifon, & maria la reine Germaine veuve de Ferdinand le Catholique, à Ferdinand d'Arragon duc de Calabre, fils du dernier roi de Naples, qui ne fongeoit qu'à fon plaifir, fans s'embarraffer d'aucune affaire.

C.

Le roi de

rentrer dans

Tournay.

Le cardinal Volfey premier miniftre du roi d'AnFrance tente de gleterre, & qui étoit fort avant dans fa faveur, étoit toujours fort attentif aux démarches du roi de France; craignoit que fa majesté trés-chrétienne ne se servît de la ligue qu'elle avoit faite avec Henri, pour recou vrer la ville de Tournai. De plus, Charles roi d'Efpas

27.

Polyd Virgil. ift. Anglic. 1.

il

gne tâchoit de mettre ce cardinal dans fes interêts, en cas qu'il vînt à fe broüiller avec la France. Il lui avoit affigné cette année une pension annuelle de trois mille livres. Toutes ces complaisances de Charles ne prévalurent point fur les démarches du roi de France; il fçavoit que le miniftre Anglois étoit ambitieux & avare, qu'il aimoit les dignitez & l'argent; il joignit donc fes ptéfens à ses caresses : il envoya en Angleterre Guillau me Gouffier feigneur de Bonnivet, amiral de France, pour gagner ce cardinal ; & la négociation étoit devenue beaucoup moins difficile, depuis qu'il étoit archevêque d'York, ce qui le rendoit plus indifferent pour l'évêché de Tournay, c'eft ce qui lui fit recevoir les of fres fecrets que François lui fit faire de le récompenfer largement, s'il pouvoit porter le roi fon maître à rendre cette ville à la France.

Ainfi les flatteries, les promeffes & les préfens du roi François I. changerent les difpofitions de Volfey, & au lieu que ce miniftre avoit autrefois repréfenté au roi fon maître, qu'il étoit de fon interêt, & de celui du royaume, de conferver une place d'une fi grande importance, & qu'on regardoit comme un monument perpetuel de fes victoires, l'argent de France lui fit changer de maxime; il perfuada à Henri que cette mê-me place lui étoit inutile, que l'entretien de la garnifon furpaffoit de beaucoup tous les avantages qu'on en pouvoit retirer; qu'il valoit mieux la ceder au roi de France, qui la demandoit inftamment, que de laiffer le roi d'Espagne s'en rendre maître, quand il le jugeroit à propos; qu'il falloit profiter de cette occafion pour tirer une bonne fomme d'argent en la place de Tournay, qui fe trouvant à une trop grande distance

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AN.1518.

CII. Ambaffadeurs de France envoyez au roi

de Calais, tomberoit infalliblement à la premiere rup ture qu'il y auroit entre les deux couronnes ; que parlà le roi fe feroit un puissant ami du roi de France, qui faifoit toutes les avances pour obtenir fon amitié,& qui pour la ferrer d'un nœud indiffoluble, propofoit le mariage du dauphin fon fils, avec la princefle Marie, fille unique d'Henri. La force de ces raisons l'emporta fur le defir de conferver Tournay, & le roi d'Angleterre ayant confenti à ce que le cardinal propofoit, il ne fut plus queftion que de traiter de cette reftitution qui fut terminée en moins de fix femaines.

Le roi de France envoya àLondres, Etienne Poncher évêque de Paris, & Nicolas de Neuville feigneur de Vild'Angletetre. leroy, & fecretaire d'état, pour se joindre à l'amiral de Bonnivet qui y étoit déja, & conduire le traité à sa perfection. Ils étoient munis de pleins pouvoirs pour traiter du renouvellement d'amitié entre les deux rois; d'une ligue avec le pape & avec tous les princes Chrétiens qui voudroient y entrer; du mariage du dauphin avec la princeffe Marie; de la reftitution de Tournay avec fes dépendances, qui étoient Mortagne & SaintAmand; & d'une entrevue entre les deux rois. De plus ils portoient des lettres patentes de François I. par lefquelles il s'engageoit à payer au cardinal Yolfey, que fa majesté appelloit, fon cher ami, une pension annuelle de douze mille livres, en confideration de ce qu'il vouloit bien fe défifter de l'administration de l'évêché de Tournay. Ce miniftre avec les ambaffadeurs de France, fe mit auffi-tôt à travailler au traité, dont le premier article concernoit le mariage de la princeffe Marie, qui n'avoit pas cinq ans, avec le dauphin qui n'avoit pas encore un an. On convint qu'il s'accompliroit auffi

CIII

Traité entre les rois de

France & d'An

gleterre. Raynald. an.

1518.n. 154.

τός

tôt que le prince auroit quatorze ans. Que la dot de AN.1518.

Marie feroit de trois cens trente-trois mille écus d'or

dont la moitié seroit payée le jour des nôces, & l'autre un an après, & que chacun des deux rois s'engageroit à payer cinq cens mille écus, en cas que l'affaire manquât par la faute de l'un ou de l'autre.

Le fecond article regardoit la reftitution de Tournay, fur laquelle il y eut quelques difficultez. Les Anglois vouloient que cette ville tînt lieu de dot à leur princesse, & les François n'y pouvoient consentir, parce qu'il auroit fallu attendre trop long-tems pour eux à rentrer dans cette place. Le temperamment qu'on y trouva fut que Tournay feroit remise à la France avec fes dépendances, à condition de payer à Henri VIII. fix cens mille pieces qu'on appelloit couronnes d'or, valant trente-cinq fols tournois chacune, pour le rembourfer des dépenfes faites à la conftruction de la citadelle, & pour les munitions de guerre & de bouche qu'on y laifferoit, outre cinquante mille livres tournois qui étoient dûës à ce prince par les habitans; mais fur ces deux fommes François I. devoit retenir la dot de la princeffe Marie. Quant au payement, il s'obligeoit à compter cinquante mille livres en fe mettant en poffeffion de la place, & vingt-cinq mille livres de six en six mois, jufqu'à ce que toute la fomme fût payée; que cependant le roi très-chrétien donneroit huit ôtages des plus illuftres maifons du royaume; & ces ôtages furent François de Montmorency, feigneur de Rochepot; Charles de Mouy, feigneur de la Meilleraye; Antoine Defprez, feigneur de Montpefat; Charles de Solieres, feigneur de Morette en Piémont; le fils aîné du fieur de Hugueville; le cadet de Mortemar, & les fieurs de MeTome XXV Aaaa

AN. 1518.

CIV.

fe mettent en poffeffion de

Tournai.

lun & de Grimaut. Le maréchal de Chatillon, après les avoir livrez aux Anglois, fut mis en poffeffion de TourLes François nay. Les deux monarques convinrent d'une entrevuë à Sundinfelt, village entre Ardres & Guines; que le roi de France rappelleroit le duc d'Albanie, & que le roi d'Ecoffe entreroit dans le traité. Tous ces articles furent signez le quatorziéme d'Octobre, & dès qu'ils eurent été ratifiez par les deux rois, & jurez folemnellement à Londres & à Paris, le roi & la reine de France, agiffant au nom du dauphin leur fils, fiancerent la princeffe Marie, représentée par le comte de Sommerfet fon procureur. Cette céremonie fe fit à Paris le feiziéme Decembre. François I. crut pouvoir tenter de même de se mettre en poffeffion de Calais ; mais le roi d'Espagne détourna le coup en mettant Volfey dans fes interêts.

Polyd. Virgil.

6270

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Tout paroiffoit affurer le duché de Milan au roi de France; il venoit de renouveller l'alliance avec le roi d'Angleterre; l'empereur étoit trop pauvre pour l'attaquer; le roi d'Espagne avoit interêt de vivre en bonne intelligence avec lui, jufqu'à ce qu'il fe fût fermement établi dans les royaumes de Caftille & d'Arragon Il n'avoit donc à craindre que de la part de ceux qu'il avoit prépofez au gouvernement de cet état; & ce fut juftement ce qui arriva par la jaloufie, ou par un zele peu reglé de Lautrec, qui jetta dans le duché de Milan les femences d'une guerre civile. Jean Jacques Trivulce s'étoit retiré dans la capitale de cet état, & y vivoit en homme privé, fans aucun éclat. Ses ancêtres lui avoient laiffé d'affez grands biens, & fa vertu le rendoit fort refpectable. Le trop grand attachement qu'il avoit au parti des Guelphes dont il étoit regardé comme le chef, l'avoit fait bannir de fon pays. Il étoit entré au service

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