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lir fon ennemie. On peut juger d'après ces circonftances fi deux femmes, deux maîtreffes, l'une du Roi, l'autre du Dauphin, fe haïffoient mortellement, & fi cette haine s'étendoit aux partisans de l'une & de l'autre. Montmorenci, foit par égard pour le Dauphin, foit par inclination pour Diane de Poitiers, avoit toujours paru affez attaché aux intérêts de celle-ci ; il s'allia même dans la fuite avec elle par le mariage de Henri de Montmorenci fon fecond fils (1), avec Antoinette de la Marck, petite-fille de Diane. Ces liaisons, une certaine jaloufie dont le Roi n'étoit pas incapable, & qui lui faifoit refufer sa confiance aux cœurs trop partagés entre fon fils & lui, une maniere trifte & chagrine d'envifager les objets, fruit de l'altération de fa fanté, telles furent les caufes du dégoût qu'il conçut pour le Connétable. S'il étoit vrai, comme Mé

(1) Qui fut depuis le Connétable Hen:i, non moins illuftre que fon pere.

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zerai l'infinue, que le Connétable
eût pouffé l'attachement pour le
Dauphin, jufqu'à traverser
par des
cabales l'aggrandiffement du Duc
d'Orléans, en engageant l'Empereur
à lui refufer fa niece & l'inveftiture
du Milanès, il feroit abfolument
inexcufable; cette idée rentre dans
l'accufation de trahison, & nous
avons fait voir combien elle étoit
peu vraisemblable. D'ailleurs, toute
la conduite de l'Empereur ne prouve-
t-elle pas que fon parti étoit pris
depuis long-temps de garder le Mi-
lanès, & qu'il n'avoit befoin pour
cela des confeils ni des infinuations
de perfonne ?

François traita le Connétable en favori difgracié, non en coupable, il fe contenta de l'éloigner de la Cour & des affaires; Montmorenci alla porter à Chantilly les lauriers dont il étoit couvert, & le regret de devenir inutile (1); il y laissoit

(1) Ce fut pendant cette difgrace qu'il bâtit le Château d'Ecouen. On dit que par une al'ufion puérile au nom d'Ecouen, mais par une a'lufiou fage & noble à fa faveur & à fa difgrace, il fit

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éclater avec une liberté hardie fa haine pour la Ducheffe d'Estampes fon mépris pour les courtifans, en présence de courtisans même, qui venoient épier fes fentimens & fes difcours. On ne le verra plus paroître dans le Miniftere fous ce regne. Le Roi se priva du plus illuftre des Généraux qui lui reftoient, & de fon plus grand Miniftre.

Le Maréchal de Trivulce, qui s'étoit trouvé à dix-huit batailles, n'avoit rien vu d'égal à la bataille de Marignan ; Anne (1) de Montmorenci, qui, comme lui étoit à celle-ci, fe trouva de plus à un Brant. hom. grand nombre d'autres, finon auffi Anne de opiniâtres que celle de Marignan Montmoren- du moins auffi célébres & auffi meur

illuft. art.

gi.

trieres; il n'y en eut aucune où il n'ait été, comme dit Brantôme, ou pris, ou bleffé, ou mort. En 1512, il étoit avec le Duc de Nemours à

graver fur la porte de ce Château, ces mots de l'Ode d'Horace à Dellius:

EQUAM memento rebus in arduis

Servare mentem.

(1) 11 fe nommoit Anne du nom d'Anne de Bretagne, Reine de France, dont il étoit le filleul.

celle de Ravenne; en 1522, il avoit fait des prodiges de valeur à la bataille de la Bicoque où il penfa périr mille fois. A Pavie, il avoit été fait prifonnier avec le Roi (1). Dans le cours de cette guerre de 1521, il s'étoit fignalé par divers exploits; il avoit mérité de commander en chefdans celle de 1536. Cette même année il fauva la Provence par une conduite qui lui mérita le titre de fage Cunctateur & de Fabius François. L'année fuivante il força le paffage de Suze, exploit rare & important, il foutint la gloire des armes Françoises tant en Artois qu'en Piémont. Sa carriere militaire ne finit point à fa difgrace ni avec le regne de François I. Malheureux fans ceffer d'être grand & vaincu fans rien. perdre de fa gloire, il fut fait prifonnier aux batailles de S. Quentin & de Dreux. Honteux de tant de captivité, il jura avant la bataille de S. Denis qu'on ne le reverroit

(1) Mais fans avoir affifté à la bataille. Vois le chap. 9. du bix. 2. ~

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que mort ou victorieux ; il revint victorieux & couvert de bleffures mortelles que lui attira un courage inflexible, trop fupérieur à fon âge & à fes forces. Il en mourut le lendemain 12 Novembre 1567, chargé d'ans & d'honneurs.

Comme Général, nous ne voyons fous le regne de François I perfonne qui puiffe lui être comparé que le Connétable de Bourbon, qui l'égale & même le furpaffe, & le Comte d'Anguien qui périt dès l'aurore de fa gloire. Les Lautrec, les Bonnivet, les Brion, les Saluces, les d'Annebaut ne valent pas Montmorenci. Nous ne parlons que des Généraux de François I, & non de ceux de l'Empereur.

Pour juger de fes talens comme Miniftre, il ne faut le confidérer ni fous le regne de Henri II. où il gouverna moins qu'il n'obéit à la Ducheffe de Valentinois, ni fous les regnes orageux de François II. & de Charles IX. où le vieux refpect dû à fon nom & le fouvenir de fa grandeur paffée, ne pouvoient

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