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VII. Ann. 945.

de moine, ils ne purent retenir leurs larmes. Le vieillard les embraffa en CONSTASHIN disant ces paroles d'Ifaïe: j'ai mis des enfans au monde; je les ai élevés en honneur, & ils m'ont méprife. Après quelques momens d'entretien, on les obligea de fe féparer. Etienne fut conduit dans l'ifle de Proconèfe, enfuite à Rhodes, & enfin à Mitylene. Il foutint fon malheur avec courage,' & vêcut encore dix-neuf ans. Ce ne fut pas fans donner de l'inquiétude à la Cour. Dans la troisieme année de fon exil, Porphyrogenète découvrit un complot formé pour l'enlever &. le ramener à Conftantinople. Les principaux conjurés furent punis. Etienne, qui peut-être même n'étoit pas inftruit de leur deffein, ne reçut aucun mauvais traitement. Mais peu de temps après la mort de Romain II fils de Porphyrogenète, Etienne devint fufpect à Théophano veuve de Romain & à Jofeph Bringas qui difpofoit de tout dans l'Empire. Le Samedi Saint, comme il fortoit de la fainte Table, il tomba mort fubitement, fans aucune cause apparente

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de maladie. On ne douta pas que CONSTANTIN Théophano, exercée à l'ufage des Ann. 945. poifons dont elle avoit déja fait périr fon beaupere & fon mari, ne l'eût fait empoifonner. Son frere Conftantin fut d'abord relégué à Tenedos, enfuite en Samothrace. Plus impétueux qu'Etienne, quoiqu'il eût au›. paravant paru plus modéré, après avoir plufieurs fois tenté de s'enfuir, il crut enfin s'échapper en tuant l'écuyer Nicétas chargé de le garder. Mais les autres gardes vengerent la mort de leur capitaine, en le massacrant lui-même. C'étoit la feconde année de fon exil. Il fut enterré avec honneur dans le Monaftere que fon pere avoit fait bâtir, & dans lequel Hélene fa premiere femme avoit reçu la fépulture. Il laiffoit un fils nommé Romain, qui vivoit encore fous le regne de Zimiscès.

Conduite

IV. Liutprand auteur contemporain, de Romain mais un peu romanefque, raconte dans le Mo- d'une maniere plus agréable l'entrevue de Romain & de fes deux fils. Il

naftere.

dit

que Romain apprenant leur arrivée rendit graces à Dieu, & qu'étant

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allé au devant d'eux, il les reçut à bras ouverts, les traitant de confre- CONSTANTIN res par raillerie, & leur offrant de Ann. 945. partager avec lui fon eau fraîche & fes légumes, comme il avoit autrefois partagé l'Empire avec eux. Tous les auteurs conviennent que ce Prince détrôné vêcut gai & tranquille. Il répétoit fouvent aux Moines fes confreres, qu'il régnoit plus véritablement en fervant humblement les ferviteurs de Dieu, qu'il n'avoit régné en commandant avec hauteur à des sujets auffi méchans que lui. Comme il étoit fort ignorant, fa dévotion ne pouvoit manquer d'être fuperftitieuse. Frappé d'un fonge effrayant, la nuit même de la mort de fon fils Conftantin, qu'il avoit vû précipiter en enfer, il envoya des exprès jufqu'à Jérufalem & à Rome pour demander des prieres, & dépêcha des courriers à tous les Monafteres du voifinage, pour inviter les Moines à fe rendre auprès de lui. Il en vint trois cens. A la Meffe du Jeudi Saint, lorfque l'officiant en étoit à l'élévation, Romain se dépouilla de fa tuni

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que, & fe tenant debout en chemife CONSTANTIN au milieu de l'Eglife, il lut à haute Ann. 945. voix un écrit qu'il tenoit à la main; c'étoit fa confeflion générale. A tous les articles, qui devoient être nombreux, les Moines verfant des larmes s'écrioient, Seigneur ayez pitié de lui. Cette lecture achevée, Romain alla demander à tous les Moines l'un après l'autre l'abfolution de fes péchés, en s'inclinant profondément devant-eux. Après l'avoir reçue il communia; & s'étant retiré avec les Moines pour prendre le repas ordinaire, tandis que les autres fe mettoient à table, il fe faifoit fouetter les jambes par un petit garçon, qui avoit ordre de crier, mets-toi à table, méchant vieillard. Il ne s'affit qu'après les autres en pleurant & en gémissant. Non content de cette confeffion publique, il en envoya des copies fcellées de fon fceau aux Caloyers qui ne s'étoient pas trouvés préfens, avec de riches aumônes, les conjurant de prier Dieu pour le falut de fon ame. L'anonyme contemporain, qui rapporte cette pieuse scene, y ajoute des

il

CONSTANTIN

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Mort de

miracles, fans doute poffibles à Dieu, mais qui pour mériter d'être placés dans l'hiftoire, auroient befoin d'une Ann. 945° autorité plus grande que la fienne. Malgré cette ferveur de pénitence, y a cependant grande apparence Romain. que ce n'étoit qu'un accès paffager. Du moins voit-on que l'ambition vivoit encore fous la cendre monaftique, & elle fe ralluma par les follicitations de fon fils le patriarche Théophylacte, du chambellan Théophane & de deux grands Officiers du palais, George & Thomas. Ils conçurent le deffein de le remettre fur le trône, & n'eurent pas de peine à l'y faire consentir. Mais tandis qu'ils attendoient le moment favorable, ils furent découverts & punis de flagellation & d'exil. Il paroît cependant que Théophylacte fut épargné, & que l'Empereur lui pardonna une entreprise formée en faveur de fon pere. Romain peu fenfible à ce mauvais fuccès ne perdit rien de fa gaieté ordinaire, & mourut paisiblement dans fon ifle le 15 Juin 948. Son corps fut rapporté à Conftantinople & en

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