CHAP. I. maux, nous empêchoient de nous attacher à la vertu. JESUS-CHRIST en renonçant à ces biens dont l'amour nous affoibliffoit, les a dégradés & deshonorés, & nous les a rendu méprifables. Et en acceptant les maux dont la crainte nous faifoit abandonner la vérité & la juftice, il les a vaincus pour lui & pour nous, & il a mis en poudre tous les obsta» Ibid. n. 32. cles qui nous retenoient. Omnia qua habere cupientes non rectè vivebamus, carendo vilia fecit. Omnia qua vitare cupientes à ftudio deviabamus veritatis, perpetiendo dejecit. Tota vita ejus in terris, difciplina morum fuit. S. II. CHAP. I. Defcription de l'état où étoit l'uni- i. AVANT la Croix de JESUS-CHRIST CHRIT crucifié CHAT. I. rités les plus conftantes, & obscurci par leurs vains raifonnemens les anciennes traditions fur l'immortalité de l'ame, la résurrection des corps, les biens ou les maux préparés à la vertu ou au vice, que le fimple peuple, malgré fes ténébres, confervoit plus religieufement que les philofophes Ceux d'entre-eux à qui Dieu avoit manifefté fon unité, fa providence, & fa juftice, n'avoient-ils pas. retenu ces connoiffances dans le fecret par une ingrate & timide lâcheté: Un feul d'entre-eux s'eft-il élevé contre l'impiété qui avoit fubftitué au Dieu vivant & véritable des idoles muettes, & des figures non feulement d'hommes, mais de bêtes & de reptiles? Un feul s'eft-il abftenu d'aller dans les temples, quoiqu'il Scholas ha- n'approuvât pas dans fon cœur les bebant priva- culte fuperftitieux qu'il autorifoit par communia. S. fa préfence & par fon exemple : L'uAug. nique dont la religion fut mife à l'épreuve, ne traita-t-il pas de calomniateurs ceux qui l'accufoient de n'adorer pas les dieux que les Athé tas, & templa Socrates. Xenophon. niens adoroient? Son Apologiste, qui étoit auffi fon disciple & fon ami, 1 le défend -il autrement, qu'en af- CHAP. Î, mêmes divinités Platon lui-même n'eft-il pas contraint d'avouer que ce lâche prévaricateur ordonna un facrifice impie, quoiqu'il fut certain de mourir? Un petit Fragmen extrait d'une lettre de Platon nous platonis ad tum Epiflole fait voir combien il craignoit de s'ex- Dion. pliquer fur la nature & l'unité de Dieu, & combien par conféquent il étoit éloigné de lui rendre graces, de le confeffer devant les hommes, & de s'expofer au moindre danger en lui rendant témoignage. Les actions. hontenfes qu'on attribuoit aux faux Dieux, le faifoient rougir; mais il fe contentoit de dire, ou qu'ils n'étoient pas coupables de ces crimes, s'ils étoient Dieux, ou qu'ils n'é- Plato de toient pas Dieux, s'ils les avoient republic. libe commis: fans ofer dire qu'il n'y avoit qu'un feul Dieu, & fans avoir le courage de s'élever contre le culte public fondé fur les crimes mêmes dont il avoit honte.. 2. Quelle apparence y avoit-il qu'on pût jamais détromper des hommes charnels, groffiers, prévenus, CHAP. I. attachés à un culte qui favorifoit tou tes leurs paffions, & qui juftifioit tous leurs vices, qu'on pût leur perfuader des vérités auffi fublimes que celles qui font le fondement de la religion chrétienne; qu'on pût les rendre capables d'un culte intérieur & fpirituel, où les fens ne comprennent rien, & dont la cupidité eft ennenrie? Et qui, s'il avoit été confulté fur le choix des moyens pour réuffir à ce grand ouvrage, auroit pensé à la Croix & aux opprobres dont elle étoit couverte ? 3. Cependant c'est de cette Croix qu'eft venue toute la lumiere & toute la fageffe des nations. C'est en y voiant le Fils de Dieu attaché, qu'elles ont connu la vanité de l'idolatrie ; l'unité de l'effence divine dans des perfonnes diftinctes; la corruption générale de la nature humaine, dont l'origine eft infectée; le befoin qu'avoient les hommes d'un médiateur; l'impuiffance où ils étoient de retourner à Dieu par leurs feuls efforts, ou par des moyens qui ne réformaffent pas leurs volontés; la néceffité de vivre fous les yeux de Dieu, & |