Le duc de Ferrare fe voyant ainsi preffé craignit pour Japerte de ses états. Mais deux accidens arrivez en mê. AN.1510. CXIV. rare oblige l'ar Guicciard. l. 9. Bembo, bift. me tems le tirerent d'affaire. Un parti François brûla le Le duc de Fer. pont que l'armée Venitienne commençoit de jetter fur mée Venitienne le Pô, pour passer ce fleuve, & le pape tomba dange- de se retirer. reusement malade; les medecins desespererent presque de fol. 256. sa guérison; on crut même durant quelques jours qu'il venet. mourroit, parce que dans le fort de fon mal il ne voulut jamais s'abstenir de boire à la glace, & de manger du fruit crud. Cependant la force de fon temperamment temperat l'emporta sur sa maladie & fur fon mauvais régime. Devenu convalefcent, le premier ordre qu'il donna fut de livrer bataille à Chaumont; mais sur les remontrances qu'on lui fit, il permit à l'armée de se retirer sous Modene, pour couvrir cette place qui réciproquement couvriroit l'armée. Mais ce qui acheva de déconcerter les Venitiens, fut que le duc de Ferrare ruina entierement la flotte qu'ils avoient dans le Pô, & qui vouloit entreprendre d'aller joindre à Adria une autre flotte qui étoit dans l'Adige. Quoique le roi eût toute la vénération poffible pour la dignité du pape, il fit neanmoins peu de cas de l'excommunication dont nous venons de parler, comme étant notoirement nulle, parce que le pape avoit paffé les bornes de son autorité. CXV. Leroi de Fran bler le clergé de Tours ce fait affem fon royaume à Belc. 1. 12. κ. 14. Raynald, hos ann.n. 20. la Guice. lib. 9. Neanmoins, pour oppofer les armes fpirituelles à puissance spirituelle, il convoqua une affemblée genérale de fon clergé à Orleans, qui fut enfuite transferée à Tours, afin de confulter les plus savans de fon royaume pour savoir s'il lui étoit permis en confcience de faire valoir fon bon droit, de venger la foi des traitez violez par Jules II. & jusqu'à quel point il devoit respecter les : armes spirituelles de l'église entre les mains de son agrefAN. 1510. seur qui ne s'en servoit que pour foutenir l'injuftice & même en des affaires purement temporelles. Cette affemblée se tint sur la fin de Septembre 1510. & l'on y fit des huit propositions de la part duroi avec un temperamment qui temoignoit assez que sa majesté menageoit encore son plus grand ennemi dans la personne de Jules: on les avoit mises par écrit en forme de consultation, & le respect pour le saint siege paroissoit à chaque ligne. CXVI. Articles pro On demandoit 19. Si un pape pouvoit en conscience pofez & exami- déclarer la guerre, lever des troupes, les entretenir, & les mettre en action, lorsqu'il ne s'agissoit ni de la religion ni du domaine de l'église, & il fut répondu qu'il ne le ment. rer. Gal- pouvoit, ni ne le devoir. 2°. S'il est permis à un prin nez dans cette affemblée de Tours. Belcar. in com lic. lib. 12. p. 348. Raynald. hoc ann. n. 20. D'argentel, collect. Judic. de nov. error.t. Maffaus in fuo Chronico ad an. 1510. ce qui défend sa personne & fon bien, non - seulement de repousser l'injure par la force des armes ; mais même de saisir les terres de l'église possedées par le pape fon ennemi déclaré, non avec intention de les retenir, mais feulement pour empêcher que le pape ne devienne plus puissant par le moien de ces terres pour nuire à ce Jean. Bachet, prince: il fut répondu que cela est permis à un prince avec ces conditions. 3. S'il est permis à un prince à cause de cette haine déclarée de se soustraire de l'obéissance du Hift. Universit. pape, vû même, quand le pape a suscité d'autres princes contre lui, & quand il les a portez à se rendre les in hift. ecclef. maitres de ses terres: il fut déterminé sur ce point qu'il 9.111.2.603. le pouvoit faire, & se soustraire de l'obeissance du pa annal.Aquitan. Part. 4. Genebrard. chronol. lib. 4. Parif. t. vi. P. 45. P. Alexander. pe, non pas en tout, mais seulement pour la défense de ses droits temporels. 4°. Suppose cette soustraction, ce que doit faire un prince & ses sujets, les prélats & autres personnes ecclesiastiques, dans les chofes pour lesquelles lesquelles on avoit coûtume auparavant d'avoir recours au faint fiége: on répondit qu'il falloit garder le droit AN. 15 10. ancien & la pragmatique sanction du roïaume, prise des decrets du faint concile de Bâle. 5. S'il est permis à un prince chrétien de prendre la défense d'un autre prince chrétien qui lui est allié, & dont il soutient legitimement les interêts, (cet article regardoit le duc de Ferrare,) & l'on répondit qu'il étoit permis. 6°. Si le pape prétend avoir un droit sur quelque terre comme dépendante du patrimoine de l'église de Rome; & file prince au contraire assure que cette terre est de son domaine, & offre des'en rapporter à l'avis de gens d'honneur : on demande s'il est permis au pape, sans autre connoissance de cause, de faire la guerre à ce prince; & en cas qu'il la fasse, s'il est permis au prince d'y résister, & fi les autres princes peuvent se joindre à celui-ci, principalement lorsqu'ils lui font alliez, quand d'ailleurs il paroît certain qu'il n'y a pas cent ans que l'églife de Rome est en possession de cette terre. C'étoit le cas des Bentivoglio, que Jules II. avoit chassez de Boulogne après une poffeffion centenaire : la décision fut qu'on pouvoit en conscience prendre la protection & la défense de ce prince. 7°. Si le pape ne veut point accepter les offres que le prince lui fait de s'en rapporter au jugement des arbitres dont on conviendra, niles autres voïes juridiques; & qu'il rende quelque sentence contre lui: est-il obligé d'obeir, principalement lorsqu'il n'est pas fûr à ce prince d'aller où d'envoyer à Rome pour défendre son droit? il fut répondu que ces censures devoient être estimées nulles, & ne pouvoient obliger. 8. Si le pape sans garder aucune justice ni formalité du droit, n'emploïant que ses armes & les voïes de fait, Tome XXV. M publie des censures contre ce prince & contre ceux qui AN. 1510. le protegent & le défendent, faut-il y déferer? l'affemblée prononça que de telles censures seroient nulles, & que selon le droit elles ne lieroient point. Le conseil d'état n'eut pas plûtôt vu ces décisions qu'il tacha de perfuader au roi de partir à l'heuremême, de passer les Alpes, de porter la guerre en personne dans le Boulonnois, & d'obliger par cette irruption le pape à sa propre fûreté. Louis avoua de bonne foi qu'il lui feroit avantageux de suivre l'avis de son confeil; mais Arrivée de l'é- Matthieu de Lang évêque de Gurck que l'empereur envoïoit à la cour de France étant arrivé à Tours sur ces entrefaites, Louis differa son départ, se flattant que le Guicciard. 1. 9. paperentreroit en lui-même, il dit qu'il lui donnoit tout CXVII. vêque de Gurck envoïé de l'empereur à la cour de France. Raynald. ad bunc an 1,21, l'hyver pour se reconnoître, & que ce seroit affez-tôt l'attaquer au commencement du printems. Le conseil peu content de ce retardement le pressa de ne point differer, mais Louis ne changea pas de sentiment. Il fit même un nouveau traité avec cet évêque, par lequel il fut convenu, que l'empereur passeroit en Italie au printems pour attaquer les Venitiens avec une armée à laquelle le roi de France joindroit la sienne; & qu'on fommeroit le pape & le roi d'Espagne d'observer le traité de Cambray, faute de quoi on les prieroit d'accepter un arbitrage; & qu'en cas de refus, on procederoit à la convocation d'un concile géneral pour réformer l'éVarillas hist. glise dans son chef & dans ses membres; que l'empereur & le roi de France y envoyeroient leurs prélats. Quelques auteurs rapportent l'extrait du traité fait entre ces deux princes pour la tenuë du concile, quoiqu'il n'y ait rien d'assuré la dessus., Ce qu'on lit de plus positif dans une lettre de Maximilien au baron de Liechtenstein, de Louis XII.1.6. Daniel, hist. de France, t.v.in 4-P.307. 1 ad S. I. R. Prix est que ce prince avoit envie d'estre pape après la mort de Jules II. ou après sa déposition, & Mariana dit po- AN.1510. sitivement que le but de cet empereur dans ses liaisons Monita politica avec le roi de France pour la convocation d'un concile, cipes Imp. Franétoit de parvenir à faire déposer Jules pour se faire élire en sa place. Preuve de la conduite bizarre de cet empereur, & de son ambition mal placée. Le traité entre sa majesté très-chrétienne & l'évêque de Gurck fut signé à Blois, le dix-septiéme de Novembre. cofurt. an. 1609. Hifp.lib. Mariana, hist. CXVIII. Cenfures du clergé de France & le maréchal d'Amboife. Mariana, bift. Hifp. 1. 30.1.15. II. const. 27. Bullar. in Jul. Le pape trop habile pour ne pas prévoir les suites & de ce traité & des articles de l'assemblée de Tours, ful- pape contre le mina publiquement des censures contre ceux qui obéiroient au decret du clergé de France, qu'il regardoit comme un attentat contre l'autorité du faint siege. Il changea le monitoire publié contre le duc de Ferrare en une excommunication, & comprit dans ses censures les troupes françoises auxiliaires, & nommément le maréchal de Chaumont qui les commandoit, Jean Trivulce & tous les autres officiers qui portoient les armes en Italie au service & à la folde du roi de France; auffi-bien que contre les évêques & ecclesiastiques qui se trouveroient aux assemblées du clergé de France, & au concile que l'on voudroit y tenir. Toutes les mesures qu'on avoit prises en France inquieterent d'autant plus sa sain. teté, qu'elle fut informée queles cardinaux entroient dans ce dessein, & que cinq d'entre eux l'avoient déja quitté dans son voyage de Rome à Boulogne, & s'étoient rendus à Milan, tout préparez à agir contre lui. Ces cardinaux étoient Bernardin de Carvajal, François de Borgia archevêque de Cofence, René de Prié évêque de Baïeux, Frederic de faint Severin, & Guillaume Briçonnet évêque de saint Malo qui avoit eu tant de cré CXIX. Cing cardinaux & fe retirent à quittent le pape Milan. Hifp. 30. n. 4. Raynald. hoe an. n. 19. |