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»na, quoique déja groffe, en mariage à Dagon, chez qui elle » accoucha peu après d'un enfant mâle, , qui fut nommé

Demaroon.

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>> par

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Pour fe mettre en fûreté, Chronos bâtit une muraille au> tour de fa maison, & fonda Byblos, la premiere Ville » de Phenicie (a). Comme il conçut quelque temps après » un violent foupçon contre fon frere Atlas, il le fit jetter, par le confeil de Trifmegifte, dans une foffe où il perit. Chronos avoit alors deux filles, Perfephoné ou Proferpine, » & Athené ou Minerve, dont la premiere mourut vierge; » & un fils, nommé Sadid, qu'il fit mourir. Il coupa même » la tête à fa fille; actions dont les Dieux, c'eft-à-dire, ceux de fon parti, qu'on nommoit Eloim (b), furent fort étonnés. Vers ce temps-là, continue l'Auteur Phenicien, les def»cendans des Diofcurès ayant conftruit des Vaisseaux, se » mirent en mer, & furent jettés par le vent, près du Mont» Casius, où ils bâtirent un Temple.

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Cependant Uranus, quoiqu'exilé, fongeoit toûjours à dreffer des embûches à fon fils Chronos, & il lui envoya, dans le deffein de le faire tuer, trois de fes filles, Aftarté, Rhée & Dione; mais celui-ci s'étant faifi d'elles, les mit au nombre de fes concubines, auffi bien qu'Eimarmené & Hora qui lui furent envoyées dans le même dessein. Il eut fept filles d'Aftarté, qui furent nommées les Titanides ou Artemides, & deux fils, fçavoir Pothos & Eros, desir & amour. De Rhée, il eut fept fils, dont le plus jeune, que l'Auteur ne nomme pas, fut mis au nombre des Dieux au moment même de fa naiffance; c'est-à-dire, fut confacré aux Dieux, & au fervice divin; il eut auffi quelques filles de Dione, qui ne font point nommées. Le même Chronos ou Saturne eut dans la Perée, trois fils, Chronos, qui porte le même nom que fon pere, Zeus Belus, & Apollon. (c)

(a) L'Auteur Phenicien avoit déja parlé de Tyr, comme la premiere Ville de ce pays-là: peut-être qu'elle n'étoit compofée que de quelques cabanes, & que Byblos fut une Ville plus réguliere.

(b) Eloim eft le pluriet d'Eloah, & fignifie les Dieux. Cumberland interprete ce mot par Chroniens, c'eft-à-dire, les gens du parti de Chronos.

(c) M. Fourmond dans la traduction de cet endroit du Fragment paroît s'être trompé, à moins qu'il n'y ait une faute d'impreffion, car au lieu des trois enfans

Sydic, ou le Jufte, ayant épousé une de ces Titanides dont on vient de parler, en eut un fils nommé Afclepius. Surquoi il eft bon de remarquer avant que de paffer plus avant, que Sydic étant, felon quelques Auteurs, Sem, fils de Noé ou Uranus, il faut felon Sanchoniathon, qu'il ait paffé dans la terre de Chanaan, & y ait époufé une fille de Cham, qui eft le Chronos de cet Auteur. Afclepius fon fils, eft le feul des enfans de Sydic, dont cet Auteur ait fait mention; car il ne prenoit interêt qu'à fon pays, qui étoit la Phenicie, peuplée par Cham & fes defcendans.

Quoiqu'il en foit, l'Auteur ajoute que ceux-ci furent contemporains de Pontus, de Nereus (a), fon fils, & de Typhon. Pontus eut deux enfans, un fils nommé Poseidon, ou Neptune; & une fille appellée Sidon, laquelle ayant une voix admirable, fut la premiere qui compofa des Odes. Demaroon fut pere de Melicertus, appellé autrement Hercule (b). Ce fut alors qu'Uranus entreprit une nouvelle guerre contre Pontus; il fe fepara de lui & se joignit à Demaroon. Celui-ci tombe fur Pontus qui le met en fuite, de forte qu'il eft contraint de faire un vou aux Dieux pour fa propre vie. Ilus, c'est-à-dire, Chronos ou Saturne, la trente-deuxième année de fon regne, s'étant mis en embuscade dans un bo- . cage arrofé de fontaines & de ruiffeaux, pour furprendre

fon

pere Uranus, il lui coupa les parties d'un coup de fabre; & ce fut en cet endroit là même qu'Uranus fût deifié. Il y avoit rendu l'efprit, & fon fang forti par fa playe, s'y voit mêlé avec les eaux : on montre encore l'endroit où cela eft arrivé.

Voilà donc, (& c'eft une reflexion qu'Eusebe joint au recit de l'Auteur Phenicien) voilà l'Hiftoire de Chronos ou

que Sanchoniathon donne à Chronos rpes naïdes, il en nomme quatre, Chronos Zeus ou Jupiter, Belus & Apollon, pendant qu'il faut lire Zeú's Bŷλos, A'mmov. Ref. Crit. T. 1. p. 16.

(a) Cumberland ne doute pas que Nereus ne foit Japhet, & il eft difficile de ne pas fe rendre à fes raifons, que l'on peut voir dans fon Ouvrage, & dans une Note des Auteurs Anglois qui ont donné un premier volume de l'Hiftoire univerfelle P. 247.

(b) C'eft l'Hercule Phenicien le plus ancien de tous, lequel avoit un Temple à Gadira ou Gadis, qui fubfiftoit encore du temps de Silius Italicus, qui en parle dans fon fecond livre.

Saturne, & ce qu'il y a de veritable fur le regne d'un Prince que les Grecs ont regardé comme fi heureux, qu'ils en ont fait be fiecle d'or.

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Après quelques autres chofes, l'Auteur continue ainsi (a). » Aftarté la Grande, Jupiter Demaroon, & Adod le Roi » des Dieux, regnoient dans le pays, fuivant les confeils de Chronos ou Saturne. Aftarté pour marque de fa Royauté, » mit fur la tête celle d'un taureau. Parcourant la terre, elle trouva un aftre tombé du ciel (b); elle le prit & le confacra dans Tyr, l'Ifle fainte. Aftarté, fuivant les Pheniciens, » eft Aphrodite ou Venus. Chronos faifant auffi fon tour de la terre donna à Athene fa fille, le Royaume de l'Attique. Cependant la pefte & la famine s'étant fait fentir, Chronos > offre à fon pere Uranus, fon fils Sadic, & fe circoncit, > ordonnant à tous les foldats de fon armée d'en faire au» tant. Quelque temps après, un fils qu'il avoit eu de Rhea, appellé Mouth, fut mis au rang des Dieux. Le nom que les Grecs donnent à ce fils, peut fe rendre en Grec par » Dávalos, ou Pluton. Chronos après cela donna deux de fes villes, fçavoir, Byblos à la Déesse Baaltis ou Dioné, Beryt » à Neptune & aux Cabires, aux Agrotès ou Laboureurs, » & aux Pêcheurs, c'eft-à-dire, aux Dieux appellés amis.

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το Θάνατος

(1) Voila

Janus qui

» Mais avant ces chofes le Dieu Taaut fit auffi le portrait » des autres Dieux, de Saturne ou Chronos, de Dagon, &c. » pour en former les caracteres facrés des Lettres. Pour figne ⚫ de Royauté, il donna à Chronos quatre yeux, deux de» vant & deux derriere. De ces quatre yeux, deux fe fer> moient pendant que les deux autres veilloient (1). De mê> me fur fes épaules il mettoit quatre ailes, dont deux étoient l'origine de étenduës, les deux autres demeurant dans un état de repos; étoit le Satur fon idée étant de faire entendre, par les yeux, que Chronos ne des Latins. couché veilloit, & qu'éveillé il demeuroit couché & fe repofoit; par les ailes, que fe repofant il ne ceffoit pas de voler, & qu'avec ce mouvement il demeuroit tranquille. - Aux autres Dieux il ne donnoit que deux ailes, une fur chaque épaule, pour montrer que leur vol étoit feulement

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(a) Ce dernier article paroît fort mêlé des reflexions de Philon.
(b) Un Aigle, comme on le dira dans les remarques fur ce Fragment.

» pour accompagner Chronos. Il avoit même ajouté au portrait de Chronos deux autres ailes au haut de la tête; une » pour marquer la fuperiorité de fon efprit dans l'art de re» gner, l'autre pour defigner la delicateffe de fes sensations. Chronos étant allé dans le pays du midi, donna toute l'Egypte au Dieu Taaut, pour en former un Royaume, qui lui appartînt en propre.

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&

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Après avoir traduit ce Fragment, Philon de Byblos ajoute, que cette hiftoire avoit été laiffée aux defcendans de Sydik que le fils de Thabion, c'eft-à-dire, Sanchoniathon luimême, après l'avoir enveloppée, & y avoir mêlé quelques idées phyfiques fur l'origine du monde, en avoit tranfmis le fyfteme aux Prophetes des Orgies.

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Les Grecs, dit encore le même Traducteur, qui par » la beauté de leur genie l'ont emporté fur toutes les autres > Nations, fe font approprié toutes les anciennes Hiftoires les ont ornées & exagérées, n'ayant cherché qu'à divertir D par leurs recits; & dès-là, ils ont infiniment changé ces » mêmes Hiftoires. C'eft de là qu'Hefiode & les autres Poë→tes Cycliques ont forgé des Theogonies, des Gigantomachies, des Titanomachies, & d'autres morceaux par lefquels > ils ont comme étouffé la verité. Nos oreilles accoutumées → dès l'enfance à leurs fictions, prévenuës d'opinions accre» ditées depuis plufieurs fecles, confervent comme un depôt facré la vanité de ces fables. Et parce que le temps a donné infenfiblement à ces contes frivoles, la force de s'emparer de nos efprits, ils en font tellement en poffeffion, qu'il eft très-difficile de les rejetter. Il est même arrivé par » là que la verité, lorfqu'on la decouvre aux hommes, paroît avoir l'air du menfonge, pendant que les narrations fabuleufes, quelqu'infenfées qu'elles foient, paffent pour les faits les plus authentiques,»

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Tel eft le Fragment de Sanchoniathon. Comme j'aurai occafion dans la fuite de cet Ouvrage, de parler de tous les perfonnages dont l'Auteur fait mention, je ne joindrai ici peu de reflexions.

que

1o. Les Auteurs font fort partagés fur l'authenticité de ce morceau; & s'il y en a quelques-uns qui ayent foutenu qu'il

eft veritablement de l'Auteur Phenicien, quoiqu'interpolé par Philon fon Traducteur, & mêlé de plufieurs reflexions qui ne font pas de Sanchoniathon, le plus grand nombre l'a toujours regardé comme un ouvrage fuppofé. Le celebre Cumberland & M. Fourmont l'aîné, font les deux qui en ont foutenu la verité avec le plus de force & d'érudition. On peut voir dans ce dernier fur tout (1), l'hiftoire des fentimens des Sçavans fur ce fujet, & les raifons qu'il a eues de les réfuter.

(1) Refl.

crit. fur les an

ciens Peuples.

2o. Il n'eft pas douteux que Sanchoniathon n'ait pris les idées de fa Theogonie dans des traditions très-anciennes, L. I. mais déja corrompues chez les Pheniciens, par les fictions qu'on y avoit mêlées mais il est évident en même temps, que l'Auteur dans le deffein d'accrediter l'Idolatrie, n'a parlé pour les Genealogies d'avant le Deluge, que de la branche de Caïn, fans faire aucune mention de celle de Seth.

3o. L'Auteur eft plus clair & moins interpolé pour ces dix premieres Genealogies, dont nous avons donné la Table que pour celles qui ont fuivi le Deluge, fur lefquelles on trouve plus de confulion, & moins de liaison; quoiqu'on voye bien qu'il a voulu les conduire jufqu'à la famille d'Abraham, & à quelques-uns de fes defcendans (2).

(2) Voyez la Table qu'en

a donnée M.

4°. Il paroît que le but de l'Auteur, après celui du crédit qu'il vouloit donner à l'Idolatrie, a été de faire connoître les Fourmont, L inventeurs des arts; en quoi il eft quelquefois d'accord avec 1.p.86. Moyfe; & en même temps l'hiftoire des Apotheoses, ne manquant jamais d'indiquer ceux qui par des inventions utiles, avoient été mis au rang des Dieux, & honorés d'un culte public.

D'où il fuit, 5°. qu'ayant donné peu ou point de part au fouverain Etre, dans la formation du monde, fa Cofmogonie eft un atheisme (3); & par une contradiction des plus groffieres, fa Theogonie eft une imagination extravagante.

6o. Dans les deffeins que nous venons de donner à cet Auteur, & qu'il eft évident qu'il a eu, il n'a dû faire aucune mention du Deluge, qu'il avoit fans doute connu aussi bien que les Chaldéens & les Egyptiens qui en ont parlé.

7°. Quand il ne feroit pas auffi évident qu'il l'eft, que c'est dans cette Hiftoire Phenicienne que les Grecs ont puifé leur

(3) V. Eu

febe loc. cit.. Cumberland

&

M. Four

mont.

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