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ARTICLE SECOND.

Paralléle des Farces de Moliere avec celles des Modernes.

L feroit à fouhaiter que nous cuffions quelques-uns des Mimes de Sophron, que Platon a fi exaltés, pour les comparer auxFarces de Moliere quoique je ne puis croire que les Anciens. aient porté ce genre auffi loin qu'il l'a fait dans fes Précieufes ridicules.

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Si la Farce qui eft, comme on l'a dit, une imitation des Mimes des Anciens, ne doit avoir d'autre but que de critiquer les vices, ou les paffions en général, par les traits les plus chargés & les plus rifibles : la Farce des Précienfes ridicules, eft un chef-d'œuvre en ce genre. On y trouve

d'une maniere admirable ce Comique forcé, & tout-à-fait différent de celui de la bonne Comédie, furtout dans la Scène de Mafcarille avec les Précieufes. Et fi on l'examine bien, on fe convaincra aisement, que pour Comique elle a fervi de modéle au Théatre Italien de Gherardi compofé & imprimé après la mort de Moliere.

le

Le Mariage forcé eft une Piéce de la même nature que les Précieufes ridicules; mais le Comique en eft différent. La Scéne des deux Philofophes, nous apprend que les fujets les plus graves peuvent être traités d'une maniere facétieufe, foit par le deffein même, foit par la critique que l'on recherche principa lement dans le genre de Comé die dont nous parlons.

Les petites Piéces d'un Acte

qui occupent aujourd'hui la place de la Farce, & que l'on donne à la fuite d'une Tragédie, ou d'une Comédie, ne rempliffent point l'intention pour laquelle

les Farces ont été introduites fur la Scéne : au lieu de délaffer l'efprit, elle le fatiguent par une nouvelle attention. Ces petites Piéces, ou font compofées dans le ton noble & fur des fujets fufceptibles de cinq Actes, ou ne forment fouvent qu'un amas de Scénes Métaphyfiques & détachées, dans lesquelles on perfonnifie le caprice, la volupté, l'intérêt, la fatyre, &c. On y introduit Jupiter, Diane, Apollon, faifans fur les fentimens du cœur des differtations, qui reffemblent bien plus aux Dialogues de Lu rien, qu'à des Piéces Comiques de quelque genre qu'elles puiffent

être.

ARTICLE

ARTICLE TROISIE'ME.

Des différentes espéces de Farces dans Moliere.

O

N nomme abufivement toutes les Comédies qui ne font point en cinq Actes, petites Pieces ou Farces, quoique ces deux termes ne foient point du tout fynonimes. Le nom de Farce, par exemple, ne convient pas à toutes les Comédies de Moliere qui font en trois Actes, & même en un Acte feul. On s'apperçoit aisément combien le plan & la diction se reffemblent peu. Les Précieufes ridicules; les Fourberies de Scapin; Pourceaugnac, & le Médecin malgré lui, font dans le genre de Comique, qui convient proprement à la Farce; il y a auffi d'autres Piéces

E

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qu'il faut mettre dans la même claffe, quoiqu'il y ait entre celles-ci & les premieres dont j'ai parlé, une différence remarquable. On ne doit pas à mon avis appeller Farces le Mariage forcé, & le Sicilien: outre que ces Piéces font écrites d'un ton plus éle vé, le fonds du Comique en eft plus noble, le caractére des perfonnages plus décent, le motif ou principe de l'action plus grand, & l'action plus régulierement conduite.

Si on lit avec réflexion l'Ecole des Maris, George-Dandin, & le Cocu imaginaire, on y trouvera une forme plus exacte, une diction plus foutenue, & un Comique plus fort que dans les Précieufes ridicules, Pourceaugnac, ·les Fourberies de Scapin, & le ·Médecin malgré lui ; enforte qu'on ne peut fans injustice les compa

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