timens, la richefle de leurs habits, les pierreries dont ils fe paroient, ce nombre prodigieux d'Efclaves, d'Affranchis, & de Clients dont ils étoient environnez en tout tems, & furtout la dépenfe & la profusion de leurs tables. Dans le tems même de la République, ils n'étoient point Panegyr contens, dit Pacatus, fi au miTh. Aug. lieu de l'hyver les roses ne nâgeoient fur le vin de Falerne qu'on leur prefentoit; & fi dans l'Eté on ne l'avoit fait rafraî chir dans des vafes d'or. Ils n'e ftimoient les feftins que par le prix des mets qu'on y fervoit. Il falloit au travers des perils de la mer leur aller chercher les oifeaux du Phafe; & pour comble de corruption, on commença après la conquête de l'Afie à introduire dans ces feftins des Chanteufes & des Baladines. Les Les jeunes gens en faifoient l'objet de leurs ridicules affections. Ils fe frifoient comme elles; ils affectoient même d'imiter le fon de leur voix, & leur démarche lafcive; ils ne furpaffoient ces femmes perduës que par leur moleffe &leur lâcheté. Capillum frangere, & Sen. Rhet. ad muliebres blanditias vocem Controv.I extenuare, mollitie corporis certare cum fœminis,& immundissimis fe excolere munditiis, noftrorum adolefcentium fpecimen eft. Auffi Jules Cefar qui connoiffoit la fauffe délicateffe de cette jeuneffe effeminée, ordonna à fes Soldats dans la bataille de Pharfale, au lieu de lancer de loin leurs javelots, de les porter droit au vifage: Mi- Fl. 1. 4. C.§ les, faciem feri. Et il arriva, comme ce grand homme l'avoit prévû, que ces jeunes-gens idolâtres de leur beauté, fe tournerent en fuite, de peur de Lucan. s'exposer à être défigurez par des bleffures & des cicatrices. Quelle reffource pour la liberté ou pour mieux dire, quel augure d'une fervitude prochaine ! Il n'en falloit point d'autre que de voir un Etat où la valeur étoit moins confiderée que le luxe; où le pauvre Officier languiffoit dans les honneurs obfcurs d'une Legion,pendant que les Grands tâchoient de couvrir leur lâcheté, & d'éblouir le public par la magnificence de leur train,&par l'éclat de leur dépense. Sævior armis Luxuria incubuit, victumque ulcifcitur orbem. Un luxe auffi general eut bien-tôt confumé les biens des particuliers. Pour fournir à une dépenfe fi exceffive, après avoir vendu fes maisons & les terres, on vendit par d'indignes adoptions & par des alliances hon teuses le fang illuftre de ses Ancêtres: & quand on n'eut plus rien à vendre, on trafiqua de fa liberté. Le Magiftrat comme le fimple Citoyen, l'Officier & le Soldat porterent leur fervi tude où ils crurent trouver leur interêt. Les Légions de la République devinrent les Légions des Grands & des Chefs de parti: & pour attacher le Soldat à leur fortune, ils diffimuloient fes brigandages, & negligeoient la difcipline militaire, à laquelle leurs Ancêtres devoient leurs conquêtes, & la gloire de la République. Le luxe & la moleffe étoient paffez de la Ville jufques dans le Camp. On voyoit une foule de Valets & d'Efclaves, avec tout l'attirail de la volupté, fuivre l'armée comme une autre armée. Cefar après avoir forcé le camp de Pompée dans les plaines de Pharfale, y trouva les tables dreffées comme pour De bel. des feftins. Les buffets, dit-il, plioient fous le poid des vafes d'or & d'argent; les tentes étoient accommodées de gazons verds; & quelques-unes, comme celle de Lentulus, pour conferver le frais, étoient ombragées de rameaux & de lierre. En un mot, il vit du côté qu'il força, le luxe & la debauche ; & dans l'endroit où on fe battoit encore, le meurtre & le Tacit. carnage: Alibi pralia & vulnera, alibi popine, fimul cruor & ftrues corporum, juxta fcorta & fcortis fimile. civ. 5. Après cela, faut-il s'étonner fi des hommes qui recherchoient les voluptez, au milieu même des périls, & qui ne s'expofoient aux périls que pour pouvoir fournir à leurs plaisirs, ayent vû ensevelir leur liberté dans les champs de Pharfale? Au lieu que tant que cette li |