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fiècle, une confirmation bien marquée de cette opinion. Il feroit difficile de donner à cet égard une plus jufte idée des premiers fiècles, qu'en faifant obferver la groffièreté avec laquelle ils conduifoient cet élément pour un besoin des plus fimples & des plus répétés. Lorsqu'ils vouloient faire cuire, ou chauffer leurs viandes, ils mettoient de l'eau dans le creux d'un rocher, enfuite ils y jettoient une grande quantité de charbons allumés.

On conviendra que cet exemple présente une lenteur dans le génie inventif, qu'on auroit peine à fe perfuader, fi les Hiftoriens de ce pays & les Voyageurs ne l'avoient attesté. Il en résulte que les hommes qui ont formé les plus grands Empires de l'Antiquité n'ont pas été plus inftruits pendant un certain tems. On me demandera fans doute par quelle raifon ils ont été plus promptement éclairés que ceux de l'Amérique Septentrionale : ne peut-on pas répondre que la douceur du climat & la fécondité du terroir, leur rendant la vie plus aisée, ont laiffé plus de liberté à leurs réflexions & à leurs recherches? Les Sauvages de Canada, habitant un pays froid, peuvent avoir eu moins de génie, & n'ayant point réfléchi fur les augmentations des moyens que le hasard leur a présentés, ils font demeurés attachés à une première invention, qui leur a fuffi pour fatisfaire à leurs befoins.

Sans recourir à ces exemples anciens, les ré

flexions, & les faits plus récens fuffifent pour apprendre que les premiers moyens ont été perfectionnés très-lentement, & par de très-légères ́ additions, inspirées par la pratique, & principalement par la continuité des befoins.

J'ai voulu faire fentir que l'étude de l'Antiquité, c'est-à-dire, les réflexions auxquelles elle peut conduire, éclairent l'Antiquaire, & le mettent en état de connoître les hommes, & de les eftimer pour ce qu'ils valent. Je crois que l'on conviendra de la lenteur de leur génie, par rapport à l'invention; j'ajouterai à cette médiocrité de leur nature, qu'ils font nés finges & copistes: l'une & l'autre de ces efpèces charge toujours; & la charge eft fans contredit une augmentation, qui, dans les premiers fiècles, a pû conduire au progrès.

L'Antiquaire, en abandonnant les idées vagues 'de ces premiers fiècles, dont l'ignorance étoit abfolue, voit naître les Divinités ; c'eft-à-dire, que les hommes bienfaifans, & les Rois courageux obtiennent des autels long-tems après leur mort. Il distingue enfuite les augmentations de la fuperftition, dont les petites foibleffes particulières deviennent elles-mêmes l'objet d'un culte général, mais toujours avec la même lenteur que les fecours contre les befoins. On peut donc af fûrer que tous les tableaux du monde ancien conduisent à la preuve de la médiocrité du génie inventif. b iij

Enfin, ce qui décèle encore plus la médiocrité de toutes les Nations en ce genre, c'eft la peine que leur vanité fe donne pour cacher les fources dans lefquelles elles ont puifé. L'Antiquaire les démêle, ou les entrevoit. Il reconnoît qu'on a déja traité plus anciennement ce qu'on lui donne pour une nouveauté, dans une autre partie du monde. Il eft impartial, & juge, par les exemples plus modernes, des faits arrivés dans l'antiquité la plus reculée. Il en fait l'application aux Peuples plus voisins, avec d'autant plus de facilité, que l'efprit de l'homme a été, & fera toujours le même. Si, pour fe délaffer des grands objets que lui préfente l'examen des cultes & des Empires qu'il voit naître & mourir, l'Antiquaire cherche dans les tems anciens, & veut confidérer les fimples Particuliers, il ne démêlera qu'avec peine quelques atômes dans l'immenfité du vuide; fes recherches ne lui préfenteront qu'un très-petit nombre d'hommes, dont les noms font connus de la postérité, ou qui ont obtenu deux ou trois lignes d'une Infcription,dont fouvent on ne com→ prend plus le sens; ou s'il eft poffible de la lire, on apprend, en général, qu'un tel homme a vécu. Si quelque Hiftorien a parlé de ce même homme, c'est une petite confirmation qui peut avoir fon agrément pour le Lecteur. J'avoue que cet examen particulier eft le point effentiel, & l'objet principal de ces réflexions, puifqu'il présente en

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effet le plus grand avantage de l'étude dont il est queftion, & qu'il montre à l'Antiquaire des millions d'hommes,noyés dans l'abîme du tems, dont le tourbillon doit l'emporter lui-même. Il apperçoit un nombre confidérable de Rois, abfolument ignorés, ou dont le nom eft à peine connu. Qui eût dit à ces Princes, dans le centre de leur faste, que leurs noms feroient effacés du registre du monde, auroit couru quelque rifque. Qui l'eût dit à leurs fujets, n'auroit point perfuadé. Si de tels personnages font oubliés, malgré leur rang, leur magnificence, & peut-être leurs belles actions; que de peines inutiles ont pris des centaines de milliers d'Egyptiens, d'Ethiopiens, d'Affyriens, de Perfes, d'Indiens, &c. dans l'efpérance de paffer à la postérité, dont ils font inconnus. Cependant on ne peut douter que dans ce nombre immenfe plufieurs n'aient poffédé des vertus, des talens, & de l'efprit dans le dégré le plus éminent. Enfin,fuppofé que l'on oppofât à des exemples fi convaincans, que plufieurs des Anciens ont été célébrés, & que l'on retrouve tous les jours des Monumens élevés à leur honneur, l'Antiquaire remarque fans peine que ceux qui font parvenus à quelque diftinction, font nos voisins de fiècles & de pays. Ce voifinage lui démontre la raifon phyfique qui met leur mémoire à portée de recevoir cette légère fumée; & le retour que ces exemples l'engagent à faire fur lui-même

eft peut-être le moyen le plus efficace pour la deftruction de l'Egoifme, ce grand ennemi des hommes, & le défaut le plus importun dans la société.

J'ai donc eu raison de dire que les réflexions produites par l'étude de l'Antiquité, conduifoient aifément celui qui s'en occupe, à démêler les plus grands ridicules de l'humanité, à s'affecter de leurs inconvéniens, & conféquemment à se procurer, par l'amour de l'humanité, par l'excuse de fes défauts, & fur-tout par une indifférence complète fur tous les petits intérêts qui divisent les hommes, le bonheur du peu de jours qu'il doit passer fur la terre.

Je vais rapporter les fautes du quatrième Volume, dont on a bien voulu m'avertir, ou dont je me fuis apperçu.

CORRECTIONS ET ADDITIONS pour le quatrième Volume.

J'AI dit, page xv11. de la Préface, que la représentation de deux

vifages réunis fur la même tête, étoit originaire de l'Etrurie : alors j'ai parlé comme on a fait jufqu'ici ; & je parlerois encore de la même manière, fi je n'avois vû le Bronze Egyptien de la Planche VII. N°. I. du quatrième Volume. L'Explication relève cette erreur; mais il est toujours plus certain d'en avertir encore. Page xvIII. de la Préface. Cul-de-lampe des Gaulois, lif. des Grecs. Page 7. lig. 14. de les admettre, lif. de l'admettre.

Page 8. No. II. Le talon préfente ces trois lignes, lif, ces quatre

gnes.

Page 12. lig. 6. poignet, lif. poignée,

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