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or, dans l'un & l'autre cas, ces parties exactement combinées, doivent nécessairement présenter autant de caracteres différens qu'on en aura dû reconnoître dans les ordres Grecs, & dans ceux des Romains. Avec de telles ressources, on peut varier à l'infini les différentes efpeces de productions, foit en n'employant les ordres que précisément où ils conviennent, avec des rapports fimples, mixtes ou composés, en les groupant, les accouplant, comme les modernes, en les préférant folitaires, tels que les ont employés les anciens; foit enfin en ne retenant de ces ordres que leurs fimples expreffions, qui ameneroient fur la Scene tantôt un style grave & fublime, tantôt un genre mâle ou terrible, en obfervant de réunir des parties liées, de donner du feu aux différens membres de la décoration, de faire prééminer les uns par leurs élévations, les autres par leurs faillies, de terminer les parties fuperieures d'un bâtiment par des corps pyramidaux, qui annoncent aux Spectateurs l'édifice pour ce qu'il eft, & pour ce qu'il doit être; qu'en un mot, on donne du mouvement aux plans, qu'on s'attache à l'exactitude des profils, qu'on fasse choix des ornemens. Avec de telles obfervations, on ne doit pas douter du fuccès qu'on doit attendre de ses pro

ductions.

Tous ces différens fentimens prouvent la néceffité d'établir des regles certaines & invariables, principalement eu égard à la décoration, & aux proportions des

cinq ordres d'Architecture, qui font confidérés comme bases de tout ce qui peut fe produire dans cet art. Pour le prouver, je vais établir un principe reconnu & approuvé pour parvenir à faire une décoration véritablement réguliere, fans y employer les ordres d'Architecture, mais en obfervant cependant les caracteres de ces mêmes ordres.

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Lorfqu'on a deffein de projeter un édifice quelconque il faut en déterminer d'abord les hauteurs des planchers à raison du diametre des pieces intérieures ; on ajoutera à cette hauteur celle de ces mêmes planchers enfuite on fouftraira environ un pied pour la retraite qui doit régner au-deffus du péron: on fera enforte que la partie fupérieure de l'entablement annonce le niveau du deffus du plancher, & on divifera cette hauteur depuis le deffus du focle jufque fur la corniche de l'entablement, à y placer un nombre de modules relatifs à l'ordre qu'on veut employer; comme, par exemple, en 24 modules 4 parties pour l'ordre Corinthien, &c. Alors l'intervalle, à compter depuis le deffous de l'entablement jufque fur la retraite, fera l'efpace deftiné à occuper les portes, les croifées, leurs couronnemens, leurs appuis, &c. Il refte à déterminer la hauteur de la retraite, qui dépend de la quantité & de la hauteur des marches: pour arriver au rez-de-chauffée de l'édifice, on peut donner au focle 3 pieds ou 3 pieds

6 pouces de hauteur; fur cette proportion, les foupiraux des fouterrains feront placés convenablement, & procureront le jour néceffaire pour les éclairer. Cette méthode, connue de tous les grands Maîtres, & retracée par M. Blondel, peut donc être regardée comme la plus fûre, & prouver que les bâtimens à un seul étage, font & doivent être les plus réguliers, & les plus faciles à mettre en pratique, foit que les ordres y préfident ou non, puifque tous les membres qui les compofent, font établis d'après un modele connu & choisi par l'Architecte, entre les ordres d'Architecture, source où il doit puifer l'ordonnance des bâtimens de tous les genres.

Cette conduite dictée par les plus grands Maîtres m'autorise à répéter qu'il eft de la plus grande conféquence, que les ordres d'Architecture foient déterminés invariablement, tant par rapport à leurs proportions qu'à leurs décorations, & à la diftribution de leurs détails, la régularité de leurs profils; car il faut convenir que quoique les Grecs aient paffés pour avoir inventé les proportions générales des ordres d'Architecture, on ne remarque pas dans les travaux & les ouvrages qu'ils nous ont laiffés, des déterminaisons conftantes & précises; les colonnes Doriques fe trouvent tantôt plus hautes, tantôt plus baffes, relativement à leurs diametres; leurs entablemens font ou le tiers, ou le quart, ou le cinquieme, quelquefois

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quelquefois plus, quelquefois moins dans leur Ionique & leur Corinthien, on obferve également des variétés, ainsi qu'il eft aifé de s'en convaincre par le développement des ruines de la Grece qui nous ont été données il y a quelques années : ces développemens qu'on regarde, & les proportions qu'on remarque dans les restes de l'Architecture antique, qui ont été levés avec la plus grande exactitude, prouvent qu'il se trouve dans ces édifices des proportions de tous les genres, & de quoi justifier toutes fortes d'opinions. Il est à croire que les Romains n'étoient pas plus d'accord que les Grecs, foit que ces peuples, pour paroître moins devoir à ces Inventeurs, affectaffent de faire de leurs ordres autant de compofés, foit qu'ils regardaffent véritablement les proportions de cet art comme arbitraires; la doctrine même que Vitruve nous a laiffée par écrit, ne s'accorde pas davantage avec ce qui fe pratiquoit de fon temps & les exemples qui nous reftent de l'antiquité: il en est ainfi de toutes les autres proportions fur lefquelles il y a plus de deux mille ans qu'on s'effaie, & qu'on varie fans avoir rien décidé de certain. Eft-ce par respect pour les productions des anciens? ou a-t-on cru devoir s'en tenir-là ? Il n'en eft pas moins vrai que les ordres d'Architecture ne font pas amenés au point defirable': ouvrez les œuvres de Palladio, de Scamozzy, de Serlio, de Barbaro, de Cataneo, de Philibert, de l'Orme,

C

de Viola, de Jean Bulant, de Vignole, & autres qui ont travaillé fucceffivement, d'après les édifices antiques, à fixer les beautés de cet art: vous verrez qu'ils n'ont fait que convaincre, par la diverfité de leurs opinions, de la difficulté d'y réuffir; ce qui donne lieu de croire qu'un Traité des Proportions développées des cinq ordres feroit fatisfaifant, & répondroit aux diverfes ordonnances on cefferoit par-là d'être livré à la bizarrerie des opinions; il feroit un affemblage de tout ce qui a obtenu féparément le fuffrage universel, & conféquemment susceptible de réunir tous les fentimens; avantage qu'on ne peut se promettre de tous les ouvrages qui ont été produits fur cette matiere. Il ne faut pas être efclave des usages primitifs, que la distance des temps & la force d'une ancienne habitude ont autorisés.

Je me perfuade que lorsqu'on aura pris la peine d'examiner mon Ouvrage, fi j'ai rempli avec fuccès la tâche que je me fuis impofée, j'obtiendrai les fuffrages que je defire mériter. C'eft avec confiance que je mets au jour mes idées : j'ai pensé que trop de timidité rend l'Artiste pareffeux, comme trop de hardieffe le rend téméraire ; mais je ne fuis pas enthoufiafte de mes propres idées, & ce n'a été qu'après de mûres réflexions, & de l'aveu des Artistes éclairés, que j'ai tracé le réfultat de mes recherches.

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