la carrière des Humanitez,avanç que d'avoir treize ans faits. Pour sa Philosophie , il tomba sous un excellent (2) Profefleur, qui, à la maniére de Platon, vousur qu'il commençat par apprendre un peu de Géométrie. Mais le disciple alla plus loin qu'on ne souhaitoit. Il prit un tel goût à la Géométrie, qu'il en fit son capital, & méprisa presque les écrits que dictoit son maître, qui heureusement étoit assez sage & assez habile en savoir pas mauvais gré. Il parcourut tout de suite les autres parties des Mathématiques; & quoique cette science ne fût pas encore accréditée dans les colléges , ni même dans le monde, au point qu'elle l'a été depuis, on lui en fit solltenir des (2) Le P. Mambrun, connu pas ses vers La. tins, & par un Traité du Poème Epique, pour ne lui théfes publiques, les premiéres qui aient été loûtenuës à Caen. Il devoit, au sortir de ses clafses, étudier en Droit , & y prendre des degrez. Deux ouvrages, qui parurent (3) en ce temps-là, interrompirent cette étude utile, & le jettérent dans une autre plus amusante. Ces deux ouvrages étoient les Principes de Defa cartes, & la Géographie sacrée de Bochart. Une preuve qu'on ne doit jamais avoir de préjugez, ou du moins s'y opiniâtrer, puifqu'un même homme, & un homme très-judicieux , peut quelquefois, dans ses âges differens, penfer fi différemment ; c'est que M. Huer, qui a vivement censuré Descartes long - temps après, le goûta d'abord, l'ada mira, & le suivit durant plufieurs ( 3 ) Les Principes de Descartes, imprimez en 1643, & le Phaleg de Bochart, en 1646. années. Quant à la Géographie de Bochart , elle fit une double impression sur lui , & par l'érudition immense de l'ouvrage, & par la présence de l'auteur, Ministre des Protestans à Caen. Tout ce livre écant plein d'Hébrer & de Grec, aussi-tôt il voulut sam voir ces deux langues , alla falüer l'auteur, lui demanda fes conseils, son amitié, & fe fit fon disciple, mais disciple prêt à devenir émule. Souvent un jeune homme, avec de l'esprit & du courage, n'a besoin que delle vivant, pour déterminer le genre de ses études. Tel , qui n'a fait toute sa vie que des Madrigaux , auroit été un Savane du premier ordre, s'il avoit eû de bonne heure un Bochart de yeux. Qu'on ne croie pas.cependant, que M. Huec fût ennemi des d'un mo vant les amusemen's, & des exercices, qui conviennent à la jeunesse. Il voyoit (4) le monde il avoit soin de se bien mettre, il cherchoit à plaire. Véritable. ment , il n'avoit il n'avoit pas de grace à danser;mais il primoit à la course, il étoit meilleur homme de che. val, il faisoit mieux des armes, il fautoit mieux, il nageoit mieux , dit-il, que pas un de ses égaux. A vingt ans & un jour , la Coûtume de Normandie le dé. livra enfin de ses tuteurs, qui lui épargnoient fordidement toue ce qu'ils pouvoient. Sa plus forte passion, & la première qu'il fa. Eisfit, dès qu'il se vit son maître, fut de voir Paris : non pas tant par curiosité, que pour se fournir de livres , & pour connoître les princes (s) de la (4) Commentar. lib. I. p.55.56.57. á iiij Literature. C'est une de fes expressions. Il rendit d'abord fes devoirs au P. Sirmond, plus que nonagénaire. Cet aimable & respectable vieillard joignoit son grand favoir une grande candeur, qui lui venoit de son propre fonds; & une grande policelle, que la Cour de Rome & celle de France lui avoient donnée. Le P. Perau, bien moins âgé, mais' naturellement plus rigide que son confrére , se dérida le front en faveur d'un jeune provincial, qui non seulement étoit déjà digne de l'écouter , mais qui osoit même quelquefois (6) n'être pas de son avis, & lurcer, presque enfant, contre un á grand homme. Je nommerois tous nos Savans d'alors, si je nommois tous ceux (6) Voyez les Differtations sur diverses. matieres, &c. Tom. II. p.41.2. 433.. |