Imágenes de páginas
PDF
EPUB

le doit à l'accompliffement du grand précepte fans defirs, fans efforts, fans le demander même, & fans rien faire par conféquent de tout ce qui peut le préparer & le difpofer à cet acquiefcement à la grace que le Concile éxige, & à cette volontaire & libre ac-· ceptation des dons par lejquels l'homme d'injufte & d'ennemi de Dieu qu'il étoit, devient jufte & l'ami de Dieu.

Que fi l'on infifte encore, & fi l'on nous demande comment le Pénitent dont nous parlons, peut avoir dans fa volonté cet amour fuprême; nous répondrons qu'il l'a fans doute dans un fens véritable, puifqu'il tend à cet amour de toutes fes forces; & qu'il ne l'a pas dans un autre fens, puifqu'il fent bien qu'il lui manque, & qu'il defire de l'obtenir. Il eft donc en mouve

Sup. c. 11.

12. 13. 14

15.

ment pour arriver à l'amour,plûtôt qu'en poffeffion de l'amour même, parce qu'à raison du ferme propos qu'il a conçu de l'avoir & de l'exercer, il le defire, il le veut, & l'a même par forme de difpofition qui lui fert comme de paffage à la justice; mais non encore par maniere d'habitude fixe & ftable, ou d'amour habituel & formé, en quoi confifte la juftice pleine & parfaite. Car, ce que nous défirons qu'on remarque avec foin, quoique la volonté d'aimer & d'obferver le précepte de la charité foit ferme à fa maniere dans les Pénitens dont nous parlons cette volonté n'a pourtant pas atteint encore ce degré de stabilité, qui rend l'amour habituel de forte qu'elle n'est ferme encore qu'en genre de propos, de defir, d'effort, ou de volonté commencée,

[ocr errors]

commencée, & non en genre
d'habitude formée & pleinement
affermie. Servons-nous de la di-
ftinction de l'Ecole. Autre cho-
fe, nous dit-elle, eft une vertu,
comme l'amour de Dieu par
exemple, lorfqu'il n'eft qu'en
mouvement & comme en ten-

dance à fe former; ce que les
Scholaftiques appellent in fieri.
Autre chofe eft l'amour parfait
& formé dans le cœur, & qu'ils
appellent in facto effe. C'est à
quoi fe rapporte encore cette pa-
role du Seigneur: Si quelqu'un Jean. XIV.
m'aime, il fera aimé de mon Pe- 21.
re, & je l'aimerai. Ce qui ne
peut être entendu que de l'amour
déja formé qui donne la juftifi-
cation, c'est-à-dire, qui nous
attache fouverainement à Dieu
par cette charité, qui fuivant le
témoignage de l'Apôtre ne finit 1. Cor.
jamais, parce que la charité for. *1.

N

XIII.

[ocr errors]

Greg. hom. 15. in Ev.

mée & habituelle eft fi ferme
par elle-même, qu'elle nous uni
roit éternellement à Dieu, fi
nous ne nous en féparions nous-
mêmes par notre propre volonté.
Or il arrive quelquefois qu'un
Pénitent, fans le fçavoir lui-
même, obtient enfin par fes
vœux & par fes efforts cette ju
ftice, après laquelle il foûpire,
& que fouhaitant de la defirer,
il la defire en effet fi pleinement,
qu'il l'atteint comme par une fui-
te naturelle du mouvement qui
l'emporte : à quoi l'on peut ap-
pliquer cette parole fi connue de qu
faint Grégoire le Grand : Les
defirs s'accroißent par les délais,
&s'accroiffans ils obtiennent ce
qu'ils demandent. De ces pre-po
mieres étincelles du feu céleste,
qui fe gliffent en fecret dans le
cœur, & qui s'y agitent, pour
ainfi dire, de toutes parts,
s'al-

lume en effet le véritable feu de la charité qui penetre jufqu'au plus intime du cœur, qui le faifit, qui s'y fixe & qui l'embrase, & le poffede fous les yeux de Dieu feul: & c'eft là cette contrition véritable & parfaite en charité, qui juftifie l'homme tout-à-coup avec le feul vœu du Sacrement. Mais dans quel tems, & de quelle maniere cela fe faitil: A quel point faut - il que lo cœur foit dégagé de la concupifcence & des paffions? Et quel eft le degré de force, & de ftabilité que doit avoir cet amour ? Voilà ce qu'il n'eft ni possible, ni peut être même utile que nous fçachions. Il nous fuffit de ne point douter que cela n'arrive quelquefois; & nous ne devons pas pouffer plus loin notre aveugle curiofité. C'est ainsi que, felon l'Apôtre faint Jean, la cha 1. Ep. de S.

« AnteriorContinuar »