Mais helas! c'est en vain qu'un avide vautour Vint dévorer fon cœur reproduit chaque jour : En vain dans les tourmens éclate ta vangeance, Une fille aujourd'hui brave encor ta puissance. Ouy, d'un peu de couleurs, une fille, à nos yeux, Fait ce qu'il ofà faire avec le feu des cieux. Te conterai-je ici toutes les impoftures Que font aux yeux furpris fes vivantes peintures ? Lc fpectateur d'abord, à voir de tous côtez Chez elle, par fon art, briller tant de beautez, Interdit, enchanté, les croyant naturelles, De refpect, en entrant, eft faifi devant elles. Il s'arrête, & ne fait, par leur gefte féduit D'où vient que de leur voix il n'entend pas le bruit. Au milieu de ce cercle, attentive à l'ouvrage, On voit cette Circé, qui forma leur visage, Une baguette en main, & traçant quelques traits, Sur la toile operer fes magiques fecrets.
Par les mêmes couleurs fon adreffe fèconde Y diftingue à fon choix, fexe, áge, brune, blonde, Douceur, fierté, fouris, dédain, joie, ou langueur,, Et fur l'air du visage étale tout le cœur..
Tel entre dans ces lieux, l'ame libre & paisible; Qu'un vifage inconnu rend auffi-tôt fenfible; Et d'un air empreffé, prompt effet du poison,
De celle, qui l'enflâme, il demande le nom,
Un autre qui, laffé d'une vaine tendreffe Croyoit qu'un fier dépit eût guéri fa foibleffe S'ent r'ouvrir fa bleffure, à l'image des traits De l'ingrate Beauté, qui fit tous les fouhaits, Dont les yeux maintenant, fans fierté, sans menace, Semblent, d'un air riant, l'affurer de fa grace. Prêt à fouffrir encor ce qu'il fouffrit pour eux, Au flambeau de l'efpoir il rallume fes feux, Et furpris de la voir plus brillante, plus belle, Detefte les fermens qu'il avoit faits contre elle; Sans fonger que cet air fi brillant, fi flateur, D'un pinceau, qui fe jouë, eft l'ouvrage menteur,
Et ne te flate pas, apprenant ces prodiges, D'en voir fi-tôt perir le bruit & les veftiges. Tout finit fous le ciel, tout fuccombe à la Mort Mais, loin que fes portraits en reffentent l'effort, La Parque, avec dépit, y voit encore en vie Ceux à qui la lumiere eft par elle ravie, Et démentant leurs fils, qu'elle même a coupez, Croit l'arrêt des deftins, & fes ciseaux trompez.
Et que t'importe enfin, pour excuser l'injure, Que ces objets trompeurs ne vivent qu'en peinture, S'ils ont tout à la fois l'éciat, & le pouvoir De ces mêmes objets, qu'un ame fait mouvoir ?
Mais c'eft peu que fon art, qui la couvre de gloires Par tant d'efforts fameux affure fa memoire. Elle a voulu qu'aux yeux de l'Avenir inftruit, Son Portrait, fait par elle, en appuyât le bruit. Et que ne fera point croire la Renommée A la pofterité de son récit charmée,
Quand elle attestera ce Portrait, & ces yeux Où brille tout l'efprit qu'elle a reçu des Cieux, Ces yeux vifs, foûtenus encor du témoignage Des traits fins & charmans, qui forment son visaget Mais fans te fatiguer d'un détail imparfait,
Il faut rendre tes yeux juges de ce Portrait, Par lui feul, par lui feul, pour punir la Coupable, Tu verras les effets, dont fon art eft capable. Ainfi parla Mercure, & Jupiter comprit Que ce difcours étoit un trait de fon efprit, Un détour qu'il prenoit pour louer cette Belle, Et que pour ce portrait plein de fon nouveau zele Tout ce qu'il en disoit n'étoit que dans l'espoir De faire naître en lui le defir de le voir. Il le vit, & furpris d'une telle peinture,
Il trouve encor trop froid le récit de Mercure.
KENWARAN·MMMMMMMMMM
LES ETOILES CONJURE'ES CONTRE LE SOLEIL.
POEME ALLEGORIQUE, Traduit du Latin du R, Pere Commire.
Es Aftres indignez de voir, en fa carriere, Le Soleil étouffer leur plus vive lumiere, De l'Univers charmé seul attirer les yeux, N'aguére en leur fureur troublérent tous les Cieux. Mais fur tout Jupiter enflammé de furie, Et cet Aftre fameux qui luit fur l'Hefperie, De la fedition donnérent le signal.
L'un ne veut point de Maître, & l'autre point d'Egal. Tous demandent leur part aux honneurs de la terre. L'Envie au Ciel heureux fait-elle auffi la guerre? Aufi-tôt de grandeur, & d'éclat differens, De leurs Cercles fortis, on les voit tous errants. Nul n'eft plus fixe alors. La fureur les emporte, Et chez Mercure accourt la brillante cohorte. Le filence & la nuit aidoient à leur deffein. Le premier des Poiffons, dans un transport soudain, Jettant l'œil fur fa queue encor toute brûlée, Clairs flambeaux de l'Olympe, éclatante assemblée, De quels honteux affronts, dit-il en gemiffant,
CONJURATIO STELLARUM
IN SOLEM.
FABULA ALLEGORICA.
Folgore Solis lumen offundi fuum
Stella indignantes, fufpici mortalibus Colique folum, fe relinqui inglorias, Cuneta infuetis mifcuere motibus. Excanduiffe dicitur pra cateris Imperium Olympi forte adeptus Juppiter, Et qui plage dat nomen occidua Hesperusa Infenfi Soli dum negant, alter parem, Alter priorem ferre. Quid non & Deos Invidia cogit? Ergo Mercurii domum Per amica noctis fe ferunt filentia,
Et que majores tenent Stelle circulos Et qua minores. Fecit errantes furor Communis omnes, nulla jam fixa eft polo. Ubi coiere, tunc fic major Pifcium, Quem ambufta cauda flammis & rubens adhuc Reddebat eloquentem, cum gemitu incipit: Quo fumma rerum fit loco, cognofcitis. Odiofa Solis in dies potentia,
Per damna noftra crefcit. Aftris omnibus
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