Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Ou que Bernier compofe & le fec & l'humide

Des corps ronds & crochus errans parmi le vuide. 35 Pour moi fur cette mer, qu'ici-bas nous courons, Je fonge à me pourvoir d'efquif & d'avirons; A regler mes defirs, à prévenir l'orage, Et fauver, s'il fe peut, ma Raifon du naufrage.

C'est au repos d'efprit que nous aspirons tous: 40 Mais ce repos heureux fe doit chercher en nous.

preaux étoit trop judicieux & trop exact pour donner dans ce défaut & oublier ce qu'il a dit dans fon Art Poëtique, Chant I. vers, 155. & fuiv. Surtout qu'en vos Ecrits la Langue révérée, &c. Voyez la Remarque fur le 91. vers du IV. Chant de l'Art Poëtique, où l'on rapporte l'extrait d'une de fes Lettres. Du MONTEIL,

ces

placer, & occuper la place de divers autres corps, fi le vuide ne leur donne la liberté néceffaire à ce mouvement? A quoi les Cartéfiens répondent, qu'il fuffit pour cela,que dans le même temps qu'un corps fe meut, les corps contigus fe déplacent l'un l'autre, de telle maniere que, par un mouvement qui revient au circulaire, le dernier occupe la place du premier, à mesure qu'il VERS 31. Que Rohaut vainement la céde. Et comme la différente &c. VERS 33. Ou que Bernier com configuration des corps femble pofe &c.] S'il y a quelque vuide s'oppofer à ce mouvement, dans la Nature, ou fi tout eft abfo- Philofophes ajoûtent, que la matiere lument plein, c'eft une queftion qui étant divifible à l'infini, elle fe a partagé les Philofophes anciens brife en des parties fi petites, & fi & modernes, & particulierement différentes dans leurs figures, lors les deux plus célèbres Philofophes que la néceffité du mouvement le du dernier fiecle, DESCARTES, demande, qu'il s'en trouve toûjours. & GASSENDI. Notre Auteur les qui peuvent s'ajufter de maniere défigne en citant leurs plus décla- qu'il ne refté aucun vuide. Voilà, rés Partifans. Rohaut dit avec Des- felon eux, Comment, tout étant plein cartes, que tout efpace étant corps, tout a pú se mouvoir. ce qu'on appelle vuide feroit efpace, & corps par conféquent; & qu'ainfi non feulement il n'y a point de vuide, mais qu'il n'y en peut même point avoir. Bernier, au contraire, veut, après Gaffendi, que tout foit compofé d'atômes indivifibles, qui errent dans un espace vuide infini, & que ces atômes ne peuvent fe mouvoir fans laiffer néceffairement entr'eux de petits efpaces vuides. Car, difent les Gaffendiftes, comment les corps peuvent ils fe dé

JACQUES ROHAUT, d'Amiens en Picardie, mourut à Paris en 1675. Il eft enterré à Sainte Géneviève, où l'on voit fon Epitaphe à côté de celle du fameux Descartes. FRANÇOIS BERNIER, Docteur en Médecine de la Faculté de Montpellier, après avoir fait de longs voyages, & féjourné long-temps dans le Mogol, revint à Paris où il eft mort. Il a fait l'Abregé de Gaffendi.

[ocr errors]

Un Fou rempli d'erreurs, que le trouble accompagne,
Et malade à la ville, ainfi qu'à la campagne,

En vain monte à cheval, pour tromper fon ennui,

Le chagrin monte en croupe & galoppe avec lui." 45 Que crois-tu qu'Alexandre, en ravageant la terre, Cherche parmi l'horreur, le tumulte & la guerre? Poffedé d'un ennui, qu'il ne fauroit domter, Il craint d'être à foi-même, & fonge à s'éviter. C'est là ce qui l'emporte aux lieux où naît l'Aurore, 50 Où le Perfe eft brûlé de l'Aftre qu'il adore.

De nos propres malheurs Auteurs infortunés, Nous fommes loin de nous à toute heure entraînés. A quoi bon ravir l'or an fein du Nouveau Monde? Le bonheur tant cherché fur la Terre & fur l'Onde, 55 Eft ici, comme aux lieux où, meurit le Coco, Et fe trouve à Paris, de même qu'à Cusco : On ne le tire point des veines du Potofe. Qui vit content de rien, poffede toute chofe. Mais fans ceffe ignorans de nos propres befoins, 60 Nous demandons au Ciel ce qu'il nous faut le moins,

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors]

O que fi cet hiver un rhume falutaire, Guériffant de tous maux mon avare Beau-pere, Pouvoit, bien confeffé, l'étendre en un cercueuil, Et remplir fa maifon d'un agréable deuil!

65 Que mon ame, en ce jour de joie & d'opulence,
D'un fuperbe convoi plaindroit peu la dépenfe!
Difoit le mois paffé, doux, honnête & foûmis,
L'Héritier affamé de ce riche Commis,
Qui, pour lui préparer cette douce journée,
70 Tourmenta quarante ans fa vie infortunée.

La Mort vient de faifir le Vieillard catherreux.
Voilà fon Gendre riche. En eft-il plus heureux ?
Tout fier du faux éclat de fa vaine richeffe,
Déja nouveau Seigneur il vante fa nobleffe.

75 Quoique fils de Meûnier encor blanc du moulin,
Il est prêt à fournir fes titres en vélin.

En mille vains projets à toute heure il s'égare. Le voilà fou, fuperbe, impertinent, bizarre, Rêveur, fombre, inquiet, à foi-même ennuyeux. 80 Il vivroit plus content, fi, comme fes ayeux,

[merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small]
[ocr errors]

Dans un habit conforme à fa vraie origine,

Sur le mulet encore il chargeoit la farine.

Mais ce difcours n'eft pas pour le peuple ignorant, Que le fafte éblouit d'un bonheur apparent. 85 L'Argent, l'Argent, dit-on; fans lui tout eft ftérile. La Vertu fans l'Argent n'est qu'un meuble inutile. L'Argent en honnête homme érige un fcélérat. L'Argent feul au Palais peut-faire un Magiftrat.

Qu'importe qu'en tous lieux on me traite d'infame, 90 Dit ce Fourbe fans foi, fans honneur, & fans ame; Dans mon coffre, tout plein de rares qualités, J'ai cent mille vertus en Louis bien comptés. Eft-il quelque talent que l'Argent ne me donné? C'est ainfi qu'en fon cœur ce Financier raisonne. 95 Mais pour moi, que l'éclat ne fauroit décevoir, Qui mets au rang des biens, l'Efprit & le Savoir,

J'eftiIMIT. Vers 86. La Vertu fans vers qui font ici, il y avoit dans l'argent n'eft qu'un meuble inutile.) les premieres éditions":

Horace, Epitre I. Liv. I. v.

35.

O Cives, Cives, quærenda pecunia

primum eft;

Virtus poft nummos.

Jefais, que dans une amè, où manque la Sageffe,

[blocks in formation]

Et dans la Satire premiere du Livre Mais après la mort de Mr. Patru,

I. vers 61.

qui arriva au mois de Janvier 1681, l'Auteur fupprima ces derniers vers,

At bona pars hominum decepta cu- & mit les deux autres à la place.

pidine falfo,

Nil fatis eft, inquit, quia tanti,

quantum habeas, fis.

CHANG. Vers 97. J'eftime autant Patru &c.) Au lieu des deux

Ibid. J'eftime autant Patru &c.) OLIVIER PATRU, fameux Avocat, & le meilleur Grammairien de notre Siecle. Voyez la Remarque fur le vers 123. de la Satire I.

VERS 99. - De ce Sage infenfé.) CRATES, Philofophe Cy

J'eftime autant Patru, même dans l'indigence,

Qu'un Commis engraiffé des malheurs de la France. Non que je fois du goût de ce Sage infenfé, 100 Qui d'un argent commode efclave embarraffé, Jetta tout dans la mer, pour crier: Je fuis libre. De la droite Raifon je fens mieux l'équilibre: Mais je tiens qu'ici-bas, fans faire tant d'apprêts, La Vertu fe contente, & vit à peu de frais. 105 Pourquoi donc s'égarer en des projets fi vagues? Ce que j'avance ici, crois-moi, cher GUILLERAGUES, Ton Ami dès l'enfance ainfi l'a pratiqué.

Mon Pere foixante ans au travail appliqué,

En mourant me laiffa, pour rouler & pour vivre,
110 Un revenu léger, & fon exemple à fuivre.
Mais bientôt amoureux d'un plus noble métier,
Fils, frere, oncle, coufin, beau-frere de Greffier,

nique. Horace dit à peu près la même chofe du Philofophe Ariftip pe, qui voyageant dans la Libye, ordonna à fes Efclaves de jetter fon Argent qu'ils portoient, afin d'aller plus vite. Voyez la Note fui

vante.

la Grand Chambre : également recommandable par fa probité, & par fon expérience dans les affaires. Il mourut en 1657. âgé de 73. ans.

VERS 109. En mourant me laissa &c.] Environ douze mille Écus de Patrimoine, dont notre Auteur mit environ le tiers à fond-perdu fur l'Hôtel de Ville de Lyon, qui lui fit une rente de quinze cens livres pendant fa vie. Mais fon bien s'augmenta confidérablement dans la fuite, par des fucceffions, & par In media juffit Libya: quia tardius des penfions que le Roi lui donna.

IMIT. Ibid. De ce Sage infenfé, &c.] Horace, L. II. Sat. III. v. 100. Græcus Ariftippus, qui fervos proji

cere aurum

Propter onus fegnes.

irent

VERS 108. Mon Pere.] GILLES
BOILEAU, Greffier du Confeil de
Tome I.

[blocks in formation]
« AnteriorContinuar »