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TRADUC

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Poëtes de meilleur goût, & qui poffédoient mieux notre Langue. Je conjecture cependant que cet ouvrage étoit POET. LAT. plus ancien de quelques années, & il Mor.. paroît que c'étoit un des premiers fruits de la veine de l'Auteur, puifque dans fon Epître en profe à Georges de Créquy Seigneur de Riffay, il prie fon Mé. cene d'excufer les fautes de fa verfion & de fon langage fur fa jeunesse, & fur ce qu'il le trouvoit embarraffé dans le tumulte d'une Cour orageufe.

Outre cette Epître en profe dans laquelle Michel témoigne fa reconnoiffance à M. de Créquy des bienfaits qu'il en avoit reçus, notre Poëte Traducteur en adreffe une autre en vers de dix fyllabes, femblables à ceux de fa traduction, à Robert de la Marck, Maréchal de France. Cette feconde : Epître eft fort longue. C'est un panégirique en forme de ce Général. Le Poëte le loue fur fes exploits militaires, & fur les commiffions importantes qui lui avoient été confiées. Ce n'eft pas affez: il en fait un Savant du premier ordre : c'est un grand Orateur, un Poëte dif tingué, un habile Géometre. Mais ce n'étoit pas feulement pour rendre hommage à ces qualités fupérieures que Mi

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chel adreffoit cette Epître à M. de la TRADUC- Marck, il avoit un autre motif affez PORT. LAT. Commun aux Poëtes, celui d'obtenir MOD. une protection qui pût lui être utile.

A celle fin, qu'ainfi comme propofe,

Je puiffe un jour deffous tes étendards
Marcher au nombre de tes humbles foudards...
Si tu t'enquiers de cil qui par fte voie
C'estuy escript assez facheulx t'envoye,

Veoir tu le peulx; ailleurs ne le demande ;
Litz s'il te plaift, Monfieur je te le mande;
C'eft ung qu'on nomme en quelque part qu'il voyfe,
Michel par nom, & par furnom d'Amboyse,
Ou aultrement l'Esclave fortuné,

A mal avoir toujours prédestiné,
Lequel fupplie au puiffant Plafmateur,
Qui foit de toi & des tiens Salvateur,
Après qu'auras, en fanté forte & bonne,
Vefcu les ans de l'antique Titonne:

Si M. de la Marck avoit autant d'ef prit, de goût & de lecture que Michel lui en fuppofe, ce Seigneur dût trouver que la traduction que le Poëte lui envoyoit étoit trop paraphrafée, qu'elle ne rendoit pas toujours avec fidélité le fens de l'original; que Michel auroit peut-être mieux fait de ne traduire que quelques-unes des dix Eglogues du Mantouan, & de laiffer du moins cel-

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POET. LAT.

les où l'on trouve répandues des maximes dangereuses, trop de licence dans TRADUCles peintures, trop d'aigreur dans la fatyre. Le texte Latin eft à côté de la MoD. traduction, & le tout eft chargé de figures en bois qui ne montrent pas certainement l'habileté du Graveur. J'ai remarqué que la premiere figure repréfente Michel d'Amboife lui-même, en robbe longue & en bonnet plat en forme de calotte; la tête un peu panchée & appuyée fur la main droite, on le voit réver à fes mauvais vers.

La Complainte de vertu tirée & traduite du poëme du Mantouan de la Calamité des tems, parut deux ans après. la traduction des dix Eglogues du même, en 1532. à Paris, à la fuite des cent Epigrammes de Michel & de la piéce intitulée, la Vision advenuë à l'Escla ve fortunée. C'est dans cette derniere piéce que l'on apprend que Michel étoit fils naturel de George d'Amboife, fecond du nom, Seigneur de Chaumont fucceffivement Grand-Maître, Maréchal & Amiral de France, &c. ce qui paroît avoir été ignoré de ceux qui ont dreffé des Généalogies de la Maison d'Amboife. On y lit auffi plufieurs autres particularités de la vie de Michel

dont je vous inftruirai ailleurs. Dans la TRADUC- Complainte, la vertu fait elle-même fon POET. LAT. Propre éloge; elle raconte ce qu'elle

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MOD.

eft, ce qu'elle a fait, & fe plaint du peu de reconnoiffance des hommes. Le Poëte y a enchâffé l'éloge de plufieurs de nos Rois, comme de Charles VIII. & de Louis XII. & celui du Cardinal d'Amboife. Ces éloges doivent être fin ceres, puisque c'est la vertu qui les donne; mais malheureufement ils paffent par la bouche d'un Poëte.

Laurent de la Graviere, qui étoit attaché en qualité de Secrétaire à M. le Vicomte de Joyeuse, Baron d'Arques, &c. montra un peu plus de circonfpection que Michel d'Amboise. Des dix Eglogues du Mantoian, il n'a ofé en traduire que cinq, les quatre premieres & la fixiéme. La cinquiéme lui parut trop peu refpectueuse pour les Princes: il ne crut pas qu'il lui fût permis de contribuer à affoiblir le refpect & la foumiffion qu'on leur doit, en faifant entendre à tout le monde des maximes & des déclamations qui lui paroiffoient contraires aux devoirs des fujets envers ceux qui les gouvernent. La matiere des quatre dernieres ne lui plaifoit pas davantage: il la croyoit trop

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importante, trop élevée ; je ne vois pas bien par quelle raifon ; & il craignoit TRADUCde l'affoiblir en la faifant paffer dans une autre langue : elle doit être, dit-il, MOD. épluchée d'autre efprit que le mien. S'il a traduit la quatriéme Eglogue, il protefte que c'eft malgré lui; il n'avoit pû, fi on l'en croit, défobéir à certaines pernes de marque qui avoient autorité sur lui, & qui l'avoient preffé de faire cettetraduction. Il en demande férieusement pardon aux Dames, que le Poëte maltraite extrémement dans cette Egloguefatyrique, & il témoigne qu'il feroit fort affligé fi fa complaifance pouvoit en irriter quelqu'une contre lui. La crainte de ce mal qui n'étoit apparemment qu'imaginaire, valut même aux Dames de fon tems une espece de panégirique qui dût les flatter. La Graviere trouva que les portraits du Poëte Latin ne reffembloient à aucune de celles qui vivoient alors; qu'aucune n'avoit les vices que le Mantoüan repro che à ce fexe, & que du tems même de ce Poëte il n'y avoit que le très-petit nombre qui pût fe reconnoître dans ses peintures.

La traduction de la premiere de ces Eglogues avoit déja paru, je ne sçai en

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