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qu'à de petites Chapelles, élevées la plûpart par de fimples particuliers, & au milieu des champs, fuccederent bientôt des bâtimens reguliers, & enfin des Chefs-d'œuvres d'Architecture. On peut voir dans Herodote, & dans d'autres Auteurs, quelle étoit la magnificence du Temple de Vulcain en Egypte, que tant de Rois eurent bien de la peine à achever c'étoit une grande gloire fi dans un long regne un Prince avoit pû en conftruire un portique. Vous verrez dans Paufanias la defcription du Temple de Jupiter Olym(1) in Elia. pien (1), que je donnerai à la fin de ce Chapitre, avec. celle des autres Temples que je nomme ici. Celui de Delphes, auffi celebre par fes Oracles que par les préfens immenfes dont il étoit rempli, merite d'être connu. Celui de la Diane d'Ephese, ce chef-d'œuvre de l'art, & fi renom(2) Eroftrate. mé qu'un infensé (2) crut se rendre immortel en le brûlant étoit auffi riche que magnifique. Le Pantheon, ouvrage de la magnificence d'Agrippa, gendre d'Augufte, fubfifte encore, & eft dédié à tous les Saints, comme il l'étoit auparavant à tous les Dieux. Enfin celui de Belus, ou plûtôt cette grande & magnifique Tour, compofée de fept étages, dont le plus élevé renfermoit la Statue de ce Dieu, avec les autres chofes dont parle Herodote, comme il étoit le plus ancien de tous ceux dont je viens de parler, il étoit auffi le plus fingulier & le plus magnifique.

Voila les Temples les plus fuperbes des Payens, dont l'Hiftoire nous ait confervé la memoire. Les autres, moins celebres, font en fi grand nombre, qu'il faudroit des Volumes pour les décrire, & la chofe feroit fort inutile: on croit qu'il y en avoit plus de mille, grands ou petits, dans la feule ville de Rome. Les Antiquaires ont fait deffiner le plan & l'élevation de quelqus-uns de ces Temples, fur-tout le P. de (3) Anti. Exp. Montfaucon (3), que l'on peut confulter.

T. 2. p. 54. & (niv.

Comme les Latins expriment le mot de Temple de plufieurs manieres, Templum, Fanum, Ædes, Sacrarium, Delubrum, &c. les Grammairiens & les Commentateurs ont cherché l'étymologie de chacune de ces dénominations; mais tout bien examiné, il paroît que ces noms fignifioient des lieux confacrés aux Dieux, differens entre eux plus par la

y

Verrine.

grandeur que par la forme ; quoique de très-bons Auteurs ayent mis quelquefois d'autres differences. Il paroît que dans les premiers temps, Fanum fignifioit la place deftinée à un Temple, & que le même mot fut employé dans la fuite, pour marquer un petit Temple, de même que le mot Sacrarium. Ciceron en effet (1), employe deux fois ces deux mots, (1) Dans fa pour decrire un petit Temple que Cerès avoit à Catane en quatrième Sicile. Cet Orateur employe ailleurs le mot de Sacrarium, pour les Chapelles particulieres que chacun avoit dans fa maison; mais ces Chapelles étoient plus fouvent exprimées par le mot Lararium. Ædes, fi nous en croyons Varron, dont le témoignage eft rapporté par Aulu-Gelle, marquoit que le Temple étoit établi les Augures; d'où il conclut d'où il conclut que tout ce qu'on appelloit Ædes, n'étoit pas un Temple; mais cette distinction eft fans fondement, car les Auteurs se servent également des deux expreffions, pour les bâtimens confacrés aux Dieux. Il n'en eft pas de même du mot Delubrum, qui fignifioit proprement, felon Afconius, un Temple con facré à plufieurs Divinités, & dans lequel il y avoit plufieurs Chapelles, comme le Pantheon étoit un Temple confacré à tous les Dieux. Le mot Templum, ne marquoit pas même toujours un bâtiment, puifque les Augures l'employoient pour les enceintes fermées de paliffades ou de toiles, qu'ils formoient avec le bâton Augural, pour tirer les Augures.

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Les Temples des Anciens étoient partagés en plufieurs parties qu'il eft bon de diftinguer, pour entendre les defcriptions qu'ils en font. La premiere étoit le Veftibule, où étoit la Piscine, dans laquelle les Prêtres, Editui, puifoient l'eau luftrale pour expier ceux qui vouloient entrer dans les Temples; la Nef, 's; & le lieu Saint, appellé penetrale, facrarium, adytum, dans lequel il n'étoit pas permis aux particu liers d'entrer; & enfin l'artiere-Temple imdigs; mais tous n'avoient pas cette partie. Les Temples avoient fouvent des Portiques, & toujours des marches pour y monter. Il y en avoit auffi avec des galeries autour; ces galeries étoient formées d'un rang de colonnes, pofées à un certain espace du

nommés Peripteres, c'eft-à-dire, ailes; & Dipteres, quand la galerie avoit deux rangs de colonnes; Proftyles, lorfque les colomnes formoient le Portique fans galerie ; & enfin Hypethres, quand ils avoient en dehors deux rangs de colonnes, & autant en dedans, tout le milieu étant découvert, à peu près comme nos Cloîtres. Vitruve remarque encore d'autres particularités, qu'on peut voir dans fon Ou

vrage.

L'interieur des Temples étoit fouvent très-orně, car outre les Statues des Dieux, qui étoient quelquefois d'or, d'yvoire, d'ébene, ou de quelque autre matiere précieuse, & celles des grands hommes qui y étoient quelquefois en grand nombre (a), il étoit ordinaire d'y voir des peintures, des dorures, & d'autres embelliffemens, parmi lefquels il ne faut pas oublier les offrandes, ou les Ex voto; c'est-à-dire, des Proues de Vaisseau, lorfqu'on croyoit avoir été garanti du naufrage par le fecours de quelque Dieu; des Tableaux, Tabellas, pour la guérifon d'une maladie; les Armes prifes fur les ennemis, les Drapeaux, des Trepieds, & les Boucliers votifs, tels que font les deux qui fe trouvent dans le Cabinet des Medailles du Roi, & dont l'hiftoire eft dans le neuviéme Volume des Memoires de l'Académie des Belles-Lettres (b). Il y avoit fur-tout dans le Temple de Delphes, & dans plufieurs Temples de Rome, des richesses immenses de ce genre. Outre ces fortes d'ornemens, on ne manquoit gueres au jour de Fêtes de parer les Temples de branches de laurier, d'olivier, & de lierre.

Lorfqu'on vouloit bâtir un Temple, les Harufpices étoient employés à choisir le lieu, & le temps auquel on devoit en commencer la conftruction. Ce lieu étoit purifié avec grand (1) Voyez foin; on l'environnoit même de rubans & de couronnes (1). Tacite Hift. L. Les Veftales accompagnées de jeunes garçons & de jeunes filles, lavoient cet efpace avec de l'eau pure & nette, & le Pontife l'expioit par un Sacrifice folemnel. Enfuite il touchoit la pierre qui devoit fervir la premiere à former le fondement, & qui étoit liée d'un ruban; & le peuple animé d'un grand

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(a) Voyez la defcription des Temples les plus celebres, à la fin de ce Chapitre. (b) Voyez le Traité de Donariis, par Thomafinus.

zele,

zele, l'y jettoit, avec quelques pieces de monnoye, ou de métal qui n'avoit pas encore paffé par le creufet. Lorfque l'édifice étoit achevé, la confécration s'en faifoit auffi avec de grandes ceremonies, & c'étoit le Pontife, ou en fon abfence, quelqu'un de fon College, qui y préfidoit.

Tacite (1) parlant du rétablissement du Capitole, nous a (1) Hift. L. 2. confervé la formule, & les autres ceremonies de la confécration du lieu destiné à bâtir un Temple. Vefpafien, dit-il, ayant chargé L. Veftinus du foin de rétablir le Capitole, ce Chevalier Romain confulta les Arufpices, & il apprit d'eux qu'il falloit commencer par transporter dans des marais les reftes du vieux Temple, & en bâtir un nouveau fur les mêmes fondemens. L'onzième jour avant les Kalendes de Juillet le Ciel étant ferain, tout l'efpace deftiné pour l'édifice fut ceint de rubans & de couronnes. Ceux des Soldats dont le nom étoit de bon augure, entrerent dans cette enceinte avec des rameaux à la main; puis vinrent les Veftales, accompagnées de jeunes garçons, & de jeunes filles, dont les peres & meres vivoient encore, qui laverent tout ce lieu avec de l'eau de fontaine, de lac, ou de fleuve. Alors Helvidius Prifcus Préteur, précedé de Plaute Elien Pontife, acheva d'expier l'enceinte par le facrifice d'une vache, & de quelques taureaux, qu'il offroit à Jupiter, à Junon, à Minerve, & aux Dieux Patrons de l'Empire; & les pria de faire en forte que le Bâtiment que la pieté des hommes avoit commencé pour leur demeure, fût heusement achevé. Les autres Magistrats, qui affiftoient à cette ceremonie, les Prêtres, le Sénat, les Chevaliers, & le Peuple, pleins d'ardeur & de joye, se mirent à remuer une pierre d'une groffeur énorme, pour la traîner au lieu où elle devoit être mise en œuvre. Enfin, on jetta dans les fondemens plufieurs petites monnoyes d'or, & d'autres pieces de métal, comme nous venons de le dire.

De ces Temples, il y en avoit quelques-uns qui ne devoient pas être bâtis dans l'enceinte des Villes, mais hors les murs ; comme ceux de Mars, de Vulcain, & de Venus, pour les raifons qu'en apporte Vitruve. (2) « Quand on veut, dit cet (2) Liv. 2; » Auteur, bâtir des Temples aux Dieux, fur-tout à ceux qui font les Patrons de la Ville, fi c'eft à Jupiter, à Junon,

C. 2.

» ou à Minerve, il faut les placer aux lieux les plus élevés, d'où l'on puiffe voir la plus grande partie des murs de la Ville. Si c'eft à Mercure, on doit les mettre à l'endroit » où fe tient le marché, ou la foire, ainfi qu'on l'obferve » pour ceux d'Ifis & de Serapis. Ceux d'Apollon, ou de » Bacchus doivent être près du Theatre. Ceux d'Hercule, lorfqu'il n'y a ni Gymnafe, ni Amphitheatre, doivent être placés près du Cirque. Ceux de Mars hors de la Ville, & dans les champs; comme ceux de Venus, aux portes

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la Ville. On trouve, c'est toujours le même Auteur qui parle, dans les écrits des Arufpices Etrufques, qu'on a » coutume de mettre les Temples de Venus, de Vulcain, » & de Mars, hors des murs, de peur que fi Venus étoit » dans l'interieur de la Ville-même, cela ne fût une occafion de débauche pour les jeunes gens, & pour les meres de famille. Vulcain devoit être auffi en dehors, pour éloigner des maifons la crainte des incendies. Mars étant hors des murs, il n'y aura point de deffention entre le peuple; » & de plus, il fera là comme un rampart pour garantir les murailles de la Ville des périls de la guerre. Les Temples de Cerès étoient auffi hors des Villes, en des lieux où on afin que n'alloit guere que pour lui offrir des facrifices, la pureté n'en fût point fouillée ». Cependant ces diftinctions ne furent pas toujours obfervées exactement.

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On ne peut rien ajouter au refpect que les Idolâtres avoient leurs Temples.. Si nous en croyons Arien, il étoit défendu de s'y moucher & d'y cracher; & Dion ajoute que quelquefois on y montoit à genoux. Ils étoient un lieu d'afyle pour les coupables & pour les débiteurs, comme nous. le dirons dans le Chapitre fuivant. Enfin, dans les calamités. publiques, les femmes fe profternoient dans les lieux facrés & en balayoient le pavé avec leurs cheveux. Il eft arrivé cependant quelquefois, que les malheurs publics ne ceffant pas, le peuple perdoit tout le respect dû aux Temples, & s'emportoit jufqu'à jetter des pierres contre les murailles, (1) In Calig. Comme pour les lapider; ainfi qu'on le voit dans Suetone. (1). Quoique communément les hommes & les femmes entraffent dans les Temples, il y en avoit dont l'entrée étoit

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