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Ce même Poëte dit à peu près la même chose dans ses Faf(1) Liv. 4. tes (1).

(2) Liv. 14.

Alra jacet vafti fuper ora Typhoeos Ætna,

Cujus anhelantis ignibus ardet humus.

Silius I.alicus donne au mont Etna le nom même de Typhon:

Tum Catane ardenti nimiùm vicina Typhoeo (2).

(3) En. L. 3. Ce que les autres Poëtes, tels que Virgile (3), Stace (4), Clau(4) Theb 3. dien, Cornelius Severus, &c. difent d'Encelade, doit s'enten(5)Vita Apol. dre de Typhon, puifque felon Philoftrate (5) & les plus fçavans Mythologues, Typhon & Encelade designent la même perfonne.

On peut joindre aux Poëtes les Mythologues, comme Hy(6) Fab. 151. gin (6) & plufieurs autres, qui ont tous dit de concert que c'étoit fous le mont Etna que Typhon avoit été précipité.

(7) Liv. 4. (8) Liv. 5.

(9) In Arc.

Ceux des Anciens qui n'ont pas regardé la Sicile & le mont Etna comme le tombeau de Typhon, ne s'éloignent pas du moins de la même tradition, puifqu'ils ont toujours choifi pour cela des lieux fulphureux, & connus par les feux fouterrains & les tremblemens de terre, comme dans la Campanie, ou plûtôt, près du mont Vefuve, ainsi que le prétend Diodore (7), ou dans les champs Phlegréens, comme le raconte Strabon (8), on dans un lieu de l'Afie, d'où il fort de terre quelquefois de l'eau, & d'autres fois du feu, au rapport de Paufanias (9). En un mot dans toutes les montagnes & tous les autres lieux où il y avoit des exhalaisons, comme l'a fort bien remarqué l'ancien Scholiaste de Pindare, fur la premiere Pythique, après l'Hiftorien Artemon qui dit que, toute montagne qui jette du feu, accable le malheureux Typhon, qui y eft devoré par les flammes; circonftances qui faifant allusion au nom de Typhon, à la maniere dont les Egyptiens racontoient qu'il étoit mort, & aux allegories qu'ils en tiroient, nous apprennent que les Poëtes & les Hiftoriens Grecs & Latins, nous ont confervé parmi leurs fables les plus abfurdes, les traditions de cet ancien Peuple.

Cinquiémement, l'opinion où étoient les Poëtes anciens, qui croyoient que la foudre étoit l'inftrument le plus redoutable

de la vengeance des Dieux, & qui regardoient comme des impies ceux qui en étoient frappés, venoit auffi d'Egypte, où nous voyons qu'on avoit publié pour rendre Typhon plus odieux, que c'étoit ainfi que les Dieux l'avoient puni; quoiqu'on fçût bien qu'il avoit perdu la vie dans la derniere bataille que lui livra Orus fon neveu. Virgile nous a confervé cette tradition au fujet de ceux qui avoient été touchés de la foudre, en faisant dire à Anchise:» objet de la haine des im

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mortels, depuis que le Pere des hommes & des Dieux me frappa de sa foudre, je prolonge des jours inutiles » (1): (1) Æn. L. 2,

Jam pridem invifus Divis & inutilis annos

Demoror, ex quo me Divum pater atque hominum Rex
Fulminis afflavit ventis & contigit igni.

Sur quoi il eft bon de confulter Servius & Lacerda.

Sixiémement, Plurarque nous apprend que non feulement les opinions des Philofophes Grecs, tels qu'Heraclite, Empedocle, Pythagore, Platon, Ariftote & les autres, fur la formation du monde, mais auffi celles des Poëtes, font tirées des traditions des Egyptiens au fujet de Typhon & d'Ofiris ; car, fur quoi fe fondoit Hefiode lorfqu'il a parlé du Chaos de la Terre, de l'Erebe, & de l'Amour, que fur ces mêmes traditions, puifqu'il entend par la Terre, Ifis; par l'Amour Ofiris, & par le Tartare, Typhon, au rapport du même Plutarque.

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Septiémement, Typhon étoit devenu fi odieux aux Egyptiens, qu'on avoit horreur même pour tout ce qui pouvoit avoir quelque reffemblance avec lui; & c'eft pour cela qu'ils précipitoient tous les ans du haut d'un Rocher, les Afnes qui par leur poil imitoient la couleur rouffe des cheveux de ce Tyran. La Mer leur étoit auffi en abomination, parce qu'ils croyoient qu'elle étoit elle-même Typhon : mais autant qu'il étoit odieux à cet ancien Peuple, autant il honoroit la memoire d'Ifis & d'Ofiris.

ARTICLE III.

Hiftoire du culte rendu à Ifis & Ofiris.

Isis étant morte quelque temps après la victoire de fon fils fur Typhon, les Egyptiens l'adorerent, avec fon mari Ofiris, comme des Divinités; & parce qu'ils s'étoient appliqués pendant leur regne à enfeigner l'Agriculture, le bœuf & la vache devinrent leurs fymboles. On inftitua des fêtes en leur honneur, où il fe mêla dans la fuite plufieurs infamies. On portoit dans les Proceffions l'image infame du Phallus qu'Ifis avoit confacré, & qui devint le fymbole de la fecondité, quoique dans fon inftitution il n'eût été que la marque de la paffion d'Ifis pour Ofiris fon mari.

Une des principales ceremonies des fêtes d'Ofiris, étoit l'apparition du boeuf Apis, qui devoit fucceder à celui que les Prêtres avoient noyé dans la fontaine facrée, ou qui étoit mort naturellement. Ce bœuf que les Prêtres nourriffoient avec tant de foin, & pour lequel toute l'Egypte avoit tant de veneration, étoit regardé comme un Dieu. Pour donner quelque croyance à cette fuperftition, on difoit qu'il reprefentoit l'ame d'Ofiris, qui après la mort de ce Prince s'y étoit retirée, & qu'elle avoit choifi préferablement à tous les autres animaux, parce qu'il étoit le fymbole de l'Agriculture, que ce Prince avoit pris tant de foin de perfectionner.

Herodote dit qu'il falloit que ce boeuf fût noir par tout le corps, avec une marque blanche & quarrée fur le front: il devoit avoir fur le dos la figure d'un Aigle, un noeud fous la langue de la figure de l'Escarbot, les poils de la queue doubles; & felon Pline, une marque blanche fur le côté droit, laquelle, fuivant Ammian Marcellin & Ælien, devoit reffembler au croiffant de la Lune. Enfin la Geniffe qui le portoit devoit (1) De Abft. l'avoir conçu d'un coup de tonnerre (a). Porphyre (1) dont le deffein étoit de tourner en allegories l'ancienne Theologie des Egyptiens, & des autres Peuples, dit que toutes ces marques avoient rapport au Soleil & à la Lune, aufquels le bœuf

(a) Voyez Pline, Plutarque, Diodore, &c.

rayons

Apis étoit confacré que le poil noir qui étoit dominant en
lui, reprefentoit le Soleil, dont les
brûlent les corps ;
& que la tache blanche qu'il avoit au front, & le croiffant
qu'il portoit fur le côté, marquoit la Lune. Cet Auteur pouvoit
ajouter que l'Aigle, & l'Escarbot étoient auffi les symboles du
Soleil.

Sans y chercher tant de myfteres, je crois que les Prêtres imprimoient les marques dont je viens de parler, à quelques jeunes veaux qu'ils faifoient nourrir fecretement : & s'ils demeuroient quelquefois long-temps à faire paroître leur Dieu Apis, c'étoit pour ôter le foupçon de cette fupercherie (a). La fête d'Apis duroit fept jours: on alloit en foule le prendre dans le lieu où on l'avoit trouvé ; les Prêtres menoient la pompe, & chacun s'empreffoit à le recevoir dans fa maison. On croyoit que les enfans qui avoient fenti fon haleine, devenoient capables de prédire l'avenir, ainsi que Pline, Solin, & Lucien le rapportent.

Pline (1) nous apprend que ce Dieu avoit deux Etables, (1) Liv. 8. ou plûtôt deux Temples, Delubra, au lieu qu'Herodote (2) (2)L. 2.c. 464 dit feulement que c'étoit une Salle, Ouvrage de Pfamme

x ticus, laquelle au lieu de colomnes, étoit foutenue de Statues coloffales de douze coudées, ou de dix-huit pieds de hauteur (b).

Quoiqu'il en foit, le jour de la fête d'Ofiris, les Prêtres conduifoient le boeuf Apis fur le bord du Nil, & le noyoient avec beaucoup de ceremonie, & cela précisément au jour, au-delà duquel, felon leurs Livres facrés, il ne lui étoit plus permis de vivre (c). On l'embaumoit & on l'enterroit à Memphis, & après cela il étoit permis aux Prêtres d'aller dans le Temple de Serapis, dont l'entrée leur avoit été interdite dant toute la fête. Après la mort du boeuf Apis le peuple pleuroit & fe lamentoit, comme fi Ofiris venoit de mourir : les Prêtres fe coupoient les cheveux ; ce qui étoit en Egypte la marque de plus grand deuil; & ce deuil duroit jufqu'à ce

pen

(a) Saint Auguftin a cru que les Demons prefentant aux Vaches dans le temps de la conception, les marques dont il eft ici queftion, elles s'imprimoient fur leurs Veaux.

(b) Voyez Strabon, L. 7.

(c) Stato die, ultra quem vivere fas non erat, aquis mergebant. Pline, Liv. 8.

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qu'on eût fait paroître un autre boeuf femblable au premier par les mêmes marques. Alors on commençoit à fe rejouir, comme fi le Prince fût reffufcité lui-même. Cette fête duroit encore au temps de Cambyfe, lequel étant arrivé à Memphis à fon retour d'Ethiopie, dont le voyage lui avoit été si funefte, trouva le Peuple occupé à celebrer la Fête d'Ofi(1) Herod. ris (1), & s'étant imaginé qu'on fe réjouiffoit de fa difgrace, il fit appeller les Prêtres pour leur demander le fujet de leur joye. Ceux-ci ayant répondu que l'on celebroit l'apparition d'Apis qui avoit été long-temps fans fe faire voir, Cambyfe peu fatisfait de cette reponse, fit amener devant lui ce prétendu Dieu, à qui il donna un coup d'épée dont il mourut fit fuftiger les Prêtres, & ordonna à ses Soldats de massacrer tous ceux qu'on trouveroit celebrant cette Fête.

Liv. 2.

J'ai oublié de dire qu'après qu'on avoit découvert un Taureau propre à representer Apis, on le laiffoit, avant que de le conduire à Memphis, dans la ville du Nil, où il étoit nourri pendant quarante jours. Les femmes feules avoient la liberté de le voir durant ce temps-là, & elles fe prefentoient devant lui d'une maniere très-indecente. La quarantaine expirée, on le mettoit dans une barque, où il y avoit une niche dorée pour le recevoir ; & c'eft ainsi qu'il defcendoit le Nil jufqu'à Memphis.

Il eft bon, avant de paffer outre, de faire remarquer, qu'outre le bœuf Apis adoré à Memphis, il y en avoit un autre à Heliopolis, nommé Mnevis, qui étoit auffi le symbole d'O(2) Liv. 2. firis, fì nous en croyons Diodore (2); quoique plufieurs Auteurs prétendent que le premier étoit confacré à Ofiris, & le fecond à Ifis. Ce qui eft für, c'eft que la fuperftition des Egyptiens au fujet du bœuf Apis, étoit pouffée jufqu'au dernier excès. Ils l'honoroient comme un Dieu, & le confultoient comme un Oracle. Lorfqu'il prenoit ce qu'on lui prefentoit (3) Plin. L. 8. à manger (3), c'étoit une reponse favorable, & on regardoit comme un mauvais prefage, le refus qu'il en faifoit. Pline obferve qu'il n'avoit pas voulu manger ce que l'infortuné Germanicus lui avoit offert, & ce Prince mourut en effet bientôt après, de la maniere que chacun fçait. Il en étoit de même des deux Loges qu'on lui avoit bâties; lorsqu'il entroit

C. 48.

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